Classement thématique série 1848–1945:
IV. RÉFUGIÉS, IMMIGRATION, POLICE DES ÉTRANGERS
IV.1 LA SUISSE ET L'IMMIGRATION JUIVE
Également: Réprimande et sanction contre deux fonctionnaires du Consulat général de Suisse à Milan. Annexe de 9.1.1939
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 12, doc. 454
volume linkBern 1994
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001D#1000/1552#3216* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(D)1000/1552 115 | |
Dossier title | Beschwerde der eidg. Polizeiabteilung über die Missachtung der Vorschriften betr. Wiedereinführung des Visazwanges für Inhaber österreichischer Pässe durch gewisse schweiz. Konsulate in Norditalien (1938–1939) | |
File reference archive | B.44.31.1 • Additional component: Deutschland |
dodis.ch/46714 Le Chef de la Division de Police du Département de Justice et Police, H. Rothmund, au Chef de la Division des Affaires étrangères du Département politique, P. Bonna1
La décision, prise par le Conseil fédéral le 28 mars de cette année2, de réintroduire le visa consulaire pour l’entrée en Suisse des détenteurs de passeports autrichiens, a été communiquée à nos Légations et à nos Consulats par la circulaire de notre Département No 207 du 29 mars3. Cette circulaire établissait une distinction bien nette entre deux catégories de porteurs de passeports autrichiens:
a) Ceux qui avaient des relations normales avec leur pays et dont le trafic ne devait en aucune manière être entravé;
b) ceux qui quittaient ou étaient obligés de quitter l’Autriche sans idée de retour (c’est-à-dire les émigrants), pour lesquels la Suisse ne peut être qu’un pays de transit et dont l’entrée, sans un sérieux examen préalable, devait être empêchée. Cet examen devait permettre de vérifier tout spécialement si le départ des requérants, après un court séjour en Suisse, était assuré et si ces étrangers possédaient des moyens d’existence suffisants.
Vous voudrez bien trouver, en annexe, la circulaire susmentionnée. Nous attirons tout spécialement votre attention sur le 3e alinéa de la 4e page, ainsi que sur le 2e alinéa de la 5e page. Ces deux passages, en particulier, contiennent des instructions précises adressées à tous nos consulats sur le traitement des cas d’émigrants d’Autriche (porteurs de passeports autrichiens et autres étrangers soumis à l’obligation du visa et provenant d’Autriche).
Au cours du mois d’août dernier, plusieurs cantons se sont plaints de la présence sur leur territoire de nombreux émigrants provenant d’Autriche et entrés en Suisse avec des visas délivrés par nos consulats en Italie. Les plaintes des cantons se répétant, nous avons fait savoir, le 30 août, à nos consulats en Italie qu’ils ne devaient plus délivrer désormais aucun visa de leur chef à des émigrants d’Autriche; nous les avons invités, en même temps, à nous faire parvenir les listes de tous les émigrants ou réfugiés d’Autriche auxquels ils avaient délivré des visas de leur chef depuis 1’«Anschluss».
Les craintes qu’avaient éveillées les réclamations des autorités cantonales se sont trouvées largement dépassées par les renseignements qui nous sont parvenus. Bien que toutes les listes ne soient pas absolument complètes, les noms qui y figurent atteignent le total impressionnant de 28004. Trois consulats surtout se font remarquer par le nombre des visas délivrés: en effet, alors qu’à eux tous notre Légation à Rome et nos consulats à Florence, Gênes, Naples, Turin et Catane avaient délivré environ 250 visas, notre consulat à Trieste en avait octroyé 450, celui de Venise 500 et celui de Milan 1600.
Il est vrai que ces trois consulats, qui sont les plus rapprochés de la frontière d’Autriche, sont aussi ceux qui ont reçu de beaucoup le plus grand nombre de demandes. Nous savons qu’ils se sont trouvés en présence d’une tâche très difficile; qu’assaillis de demandes, obligés de discuter avec la foule des visiteurs impatients, devant résister aux supplications, aux larmes et peut-être parfois aux menaces et n’arrivant qu’avec les plus grands efforts à se débarrasser de quémandeurs dont nous connaissons aussi la ténacité, nos consulats ont passé par des moments très pénibles. S’ils se voyaient débordés, ils auraient pu néanmoins nous le faire savoir et demander de nouvelles instructions; mais il est tout à fait inadmissible que, sans tenir compte des instructions précises qui leur avaient été données, ces consulats aient simplement délivré à tort et à travers des visas à des émigrants d’Autriche très souvent, comme nous avons pu le constater, sans s’être renseignés de manière quelque peu précise ni sur leurs intentions, ni sur leurs moyens d’existence, ni sur la possibilité qu’ils avaient de passer dans un autre pays. On nous a même signalé, et nous avons pu le vérifier dans un cas, que des émigrants juifs, qui n’avaient pas réussi à se faire délivrer un visa par notre consulat général à Vienne, l’ont obtenu de notre consulat à Venise, par l’intermédiaire d’une agence de voyages de Vienne et sans même être allés en Italie5.
Que sont devenus tous ces émigrants entrés dans notre pays avec des visas délivrés, en général, pour transiter ou pour faire de courts séjours de visite, villégiature, santé, etc., nous ne le savons pas exactement; la Police fédérale des étrangers prépare une enquête qui ne peut manquer d’être longue, compliquée et coûteuse. Nous savons en tout cas qu’un grand nombre d’entre eux se trouvent encore en Suisse, parce qu’ils n’ont pas obtenu l’autorisation de se rendre dans un autre Etat et que, pour des raisons d’humanité, ceux qui ont été découverts ne peuvent pas, en général, être simplement renvoyés en Allemagne. Ces émigrants viennent s’ajouter au nombre trop élevé de ceux qui se trouvent déjà en Suisse et nous aurons les plus grandes difficultés à nous en défaire. Nous avons pu constater déjà que certains d’entre eux sont sans moyens d’existence et qu’ils ont dû être secourus par les organisations qui s’occupent des réfugiés.
Les faits exposés ci-dessus dénotent chez certains fonctionnaires de nos consulats à Trieste, Venise et Milan une telle incurie (on peut se demander s’ils ont jamais lu attentivement les instructions de notre Département) et un tel dédain des intérêts de notre pays ou alors une telle incapacité, qu’à notre avis des mesures s’imposent. En agissant comme ils l’ont fait, ils ont non seulement causé un grand surcroît de travail aux polices fédérale et cantonales des étrangers, occasionné des frais supplémentaires à ces administrations et aux organisations qui s’occupent de l’aide aux réfugiés, mais surtout ils ont contribué à aggraver les difficultés dans lesquelles notre pays se trouve, du fait de la présence d’un trop grand nombre d’émigrants juifs sur son territoire. Nous n’avons aucune garantie que les mêmes erreurs ne se reproduiront pas à l’avenir; nous vous renvoyons à cet égard à la lettre6 que nous avons adressée, le 16 de ce mois, à notre consulat général à Milan au sujet du cas Leo Drechsler et dont nous vous avons transmis une copie. Nous vous serions reconnaissants de vouloir bien procéder à une enquête sur les faits que nous vous signalons et de prendre les sanctions qui s’imposent contre les fonctionnaires ou employés fautifs7.
- 1
- Lettre: E 2001 (D) 2/115.↩
- 2
- Cf. No 249.↩
- 3
- Non reproduite.↩
- 4
- Ce chiffre est souligné, avec en marge (écriture non identifiée): !↩
- 5
- En marge des trois dernières lignes (écriture non identifiée): !↩
- 6
- En marge (même graphisme que les points d’exclamation ci-dessus): concernant Perucchi! Cette lettre du 16 novembre ne figure pas au dossier. Une lettre du Consul général de Suisse à Milan, C. de Bavier, à Rothmund, datée du 9 janvier 1939, permet de dire que Perucchi ainsi qu’un nommé Porta étaient les deux fonctionnaires du bureau des passeports de Milan, qui avaient délivré, inconsidérément selon Rothmund, des visas à des Juifs autrichiens. Dans cette lettre, Bavier s’exprimait comme suit à leur sujet: J’ai exprimé aux deux employés coupables mon vif mécontentement de leur conduite et de leur négligence répétée. Je ne puis prendre de sanctions contre M. Perucchi puisqu’il quitte notre service ces jours-ci. Quant à M. Porta, il a fait une demande d’avancement qui vient de lui être refusée. D’autre part, comme vous aurez pu le constater par mon rapport au Département politique du 5 décembre, dont vous avez eu une copie, j’ai décidé de déplacer M. Porta et de le remettre aux affaires militaires, ce qui constitue un pas en arrière, celles-ci étant d’habitude traitées par les fonctionnaires qui débutent - or l’intéressé est au service de la Confédération depuis plus de 15 ans.↩
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