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Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 27, Dok. 148
volume linkZürich/Locarno/Genève 2022
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E4110B#1987/73#171* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 4110(B)1987/73 36 | |
Dossiertitel | Copenhague 1978, documentation (1978–1978) | |
Aktenzeichen Archiv | J.548 |
Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E2003A#1990/3#249* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 2003(A)1990/3 127 | |
Dossiertitel | Conférence europ. des Ministres de la justice (1976–1978) | |
Aktenzeichen Archiv | o.121.331.3 |
Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E4110B#1999/327#13* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 4110(B)1999/327 3 | |
Dossiertitel | Conférence des Ministres européens de la justice: 12e Conférence, Luxembourg, 1980; 11e Conférence, Copenhague, 1978. Divers 1965-1980 (1965–1980) | |
Aktenzeichen Archiv | J.345 |
dodis.ch/48722Notice pour le Directeur de la Division de la justice du Département de justice et police, J. Voyame1
11ème Conférence des Ministres Européens de la Justice. Problèmes posés par les prisonniers de nationalité étrangère. Rapport de base. Complément au rapport de B.2
Il est établi que la criminalité des étrangers n'est pas supérieure à celle des indigènes, malgré les difficultés d'assimilation culturelle et d'intégration sociale dont souffrent les étrangers, leur déracinement de leur milieu naturel et de leur constellation familiale. Il est entendu que ces phénomènes sont sensibles chez les travailleurs migrants en priorité, et qu'ils jouent un très faible rôle chez les étrangers en transit ou en séjour (touristes, etc.), ou encore, a fortiori, chez ceux qui pénètrent en Suisse pour y délinquer. Ces phénomènes sont en revanche insignifiants pour ceux qui, quoique de nationalité étrangère, sont parfaitement et de longue date assimilés à la population nationale (par ex., nés, éduqués, formés professionnellement en Suisse), dont la marginalisation sociale éventuelle, criminogène en elle-même, ne peut s'expliquer que par des réactions de rejet des milieux suisses.
Il existe à cette réalité criminelle des causes parfaitement objectives: les résidents étrangers sont plus étroitement surveillés que les Suisses (police des étrangers, autorités consulaires et diplomatiques); restrictions de la liberté de l'emploi3 et de résidence; exclusion partielle ou totale de certains emplois ou fonctions (professions libérales réglementées, fonctionnariat, etc.); conscience enfin chez le résident étranger qu'un comportement irréprochable est la condition absolue du renouvellement de son permis de travail et de séjour, sous peine d'expulsion administrative.
En l'état actuel de la science, il est impossible d'apprécier quantitativement avec une grande précision la criminalité des étrangers en Suisse. Nous ne possédons de statistiques criminelles qu'au stade de la condamnation pénale, et encore, partielles. Or, le délinquant étranger qui se sait découvert ou en passe de l'être fuit la Suisse, rendant difficile (procédure pénale in abstentia) ou impossible (cantons qui ne connaissent pas cette procédure) le jugement pénal. En outre, dans les cantons qui connaissent l'opportunité des poursuites, les autorités pénales renoncent volontiers à ouvrir l'action pénale contre les étrangers, laissant aux autorités de police le soin de les expulser administrativement, dans l'intérêt de ces derniers autant que dans celui de notre société à laquelle ils ont fait la preuve de leur incapacité d'adhérer.
En conséquence, nous en sommes réduits à une grossière appréciation globale du phénomène, dont on peut tirer une conclusion: face à la justice pénale, l'étranger, égal en droit au Suisse, est différemment traité que l'indigène, sans qu'on puisse en déduire un quelconque préjudice objectif pour quiconque.
Si, en détention pénale, le délinquant étranger jouit des mêmes droits que l'indigène, et cela conformément à la Résolution (73) 5 du Conseil de l'Europe (Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus)4, la réalité montre qu'il ne peut pas toujours exercer ses droits comme le Suisse, malgré les déclarations et prises de position des autorités helvétiques chargées de l'exécution des peines privatives de liberté, qui apprécient différemment le risque de fuite présenté par un étranger, et doivent en toute équité tenir compte du manque d'encadrement social et familial dont l'étranger souffre en terre d'accueil, des difficultés que lui cause une langue pour lui étrangère, et des problèmes d'accès à des mass media faits pour lui.
Ces disparités de traitement au niveau de l'exercice des droits du détenu ont entraîné des réactions favorables aux étrangers, dans différents milieux. À titre d'exemple, mentionnons une intervention au Grand conseil zurichois (janvier 1978) demandant l'égalité de traitement entre détenus suisses et étrangers, y compris pour les congés pénitentiaires. Relevons encore que si des facilités offertes aux étrangers en détention, dans le domaine du culte, du régime alimentaire, d'interprétation et de traduction, etc., ne posent pas de problèmes aux autorités compétentes, d'ailleurs rompues à la pratique de plusieurs langues et à la considération de disparités de mœurs et de mentalités, elles sont parfois mal comprises et acceptées des détenus indigènes qui voient en elles des privilèges.
En conclusion, si le statut juridique du détenu étranger ne diffère pas de celui du suisse, l'expérience et des contingences matérielles font que l'étranger est soumis à un traitement relativement spécial dans l'établissement pénitentiaire. Loin d'être un mal, cette réalité est une des conséquences du respect du principe établi de la personnalisation de l'exécution des sanctions pénales privatives de liberté.
Les réalités pèsent de tout leur poids sur le traitement des détenus étrangers dont le statut juridique, nous le rappelons, est égal à celui des autres détenus, même s'ils ne peuvent exercer leurs droits de façon aussi absolue. En l'état actuel des choses, il existe peu de chance de modifier la situation de ce genre de détenus. En revanche, de grands espoirs se fondent sur le renforcement de l'entraide judicaire en matière pénale entre les États membres du Conseil de l'Europe. La Convention européenne sur la valeur internationale des jugements répressifs5, qui devrait être au plus tôt ratifiée par un grand nombre d'États, permettra en effet deux opérations inverses propres à éviter la présence de détenus étrangers dans les établissements pénitentiaires européens: l'exécution de condamnations à des peines privatives de liberté prononcées à l'étranger, et l'exécution à l'étranger de peines privatives de liberté prononcées dans un État dont le condamné n'est pas ressortissant. Du côté suisse, l'entrée en vigueur très proche de la LEIMP6, pendante devant les Chambres fédérales, autorisera la ratification de ladite Convention.
Concrètement, la délégation suisse à la 11e Conférence des Ministres Européens7 de la justice pourrait adopter les conclusions suivantes:
- 1. Exprimer le vœu que le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe autorise le Comité Directeur pour les Problèmes Criminels à réunir un Comité d'experts où tous les États membres seraient représentés, chargé d'étudier dans une optique comparative le statut et le traitement des détenus étrangers en Europe. Les conclusions de ces travaux, qui devraient commencer au plus tôt, seraient alors l'objet d'une large diffusion destinée à permettre l'harmonisation des droits européens sur ce point.
- 2. Exprimer le vœu que dans ses travaux en cours et à court terme, le Comité Directeur pour les Problèmes Criminels, institué par le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe, songe à reviser la Résolution (73) 5, Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus, et d'y introduire une nouvelle règle, spécifique aux détenus étrangers, et propre à éviter que l'absence de toute disparité de traitement entre détenus (règle No 5) exclue de prendre raisonnablement en considération les handicaps dont souffrent les détenus étrangers dans les établissements pénitentiaires, au cours de leur processus de rééducation et de resocialisation.
- 3. Exprimer le vœu que le plus grand nombre d'États membres du Conseil de l'Europe fassent en sorte d'être à même de ratifier dès que possible la Convention européenne sur la valeur internationale des jugements répressifs.
- 1
- Notice: CH-BAR#E4110B#1987/73#171* (J.548). Rédigée et signée par P.-H. Bolle.↩
- 2
- Notice de A. Baechtold à K. Furgler du 8 juin 1978, dodis.ch/52648.↩
- 3
- Cf. DDS, vol. 27, doc. 113, dodis.ch/49423.↩
- 4
- Cf. doss. CH-BAR#E2003A#1988/15#242* (o.121.333.0). Cf. aussi la lettre de Y. Moret à G. Kahn-Ackermann du 12 mars 1978, dodis.ch/52659.↩
- 5
- Cf. doss. CH-BAR#E2003A#1988/15#249* (o.121.333.6).↩
- 6
- Loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, RO, 1982, pp. 846–877. Cf. DDS, vol. 27, doc. 6, dodis.ch/39389.↩
- 7
- Cf. le PVCF No 791 du 12 juin 1978, dodis.ch/52649; le discours de K. Furgler du 21 juin 1978, dodis.ch/49998 et la lettre de R. Hartmann à A. Hegner du 28 juin 1978, dodis.ch/50008.↩