Également: Composition des délégations rencontrées (annexe).
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Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
Cote d'archives | CH-BAR#E6100C#2003/394#44* | |
Titre du dossier | Bretton Woods 1992. International 1 (1992–1992) | |
Référence archives | 972.19 |
Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
Cote d'archives | CH-BAR#E7115A#2000/385#1053* | |
Titre du dossier | Jan.-Mai (1992–1992) | |
Référence archives | 861.5 • Composant complémentaire: GUS |
Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
Cote d'archives | CH-BAR#E2010A#2001/161#6607* | |
Titre du dossier | Beitritt der Schweiz zum IWF, Band 5 (1992–1992) | |
Référence archives | C.41.103.2(12) |
Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
Cote d'archives | CH-BAR#E7115A#2000/385#1042* | |
Titre du dossier | Sondermission (1992–1992) | |
Référence archives | 821 • Composant complémentaire: GUS |
dodis.ch/60950L’Administration fédérale des finances au Chef du DFF, le Conseiller fédéral Stich1
Mission en Asie centrale2
Notre délégation s’est rendue du 21 au 25 avril 1992 successivement en Ouzbékistan (Tachkent), au Kazakhstan (Alma-Ata) et enfin en Kirghizie (Bishkek).
L’objectif principal de la mission était d’établir les premiers contacts avec les républiques d’Asie centrale nouvellement indépendantes en vue de la constitution éventuelle d’un groupe de vote commun au sein des Institutions de Bretton Woods.3 Le message que nous avons cherché à délivrer contenait deux éléments principaux:
– la Suisse est également sur le point d’adhérer aux Institutions de Bretton Woods, seule une consultation populaire nous en sépare encore;4
– si l’issue de celle-ci est favorable, la Suisse va chercher à constituer un groupe de vote au sein du FMI et de la Banque mondiale, auquel cas elle serait d’accord de les accueillir dans son groupe de vote.
Notre deuxième objectif était de signaler que la Suisse serait heureuse d’accueillir les républiques d’Asie centrale dans le groupe de vote qu’elle préside à la BERD, si ces dernières désiraient y adhérer. Nous avons insisté sur le fait que la Turquie, un pays qui leur est proche culturellement, est membre de notre groupe de vote à la BERD.5
Enfin notre dernier objectif était de mieux faire connaissance de la situation économique, financière et monétaire particulière de ces nouvelles républiques. Dans la perspective de la création imminente d’un fonds de stabilisation du rouble d’un montant de 6 milliards de dollars, nous avons abordé quelques questions liées au maintien de ces républiques dans la zone rouble, ainsi que de l’absence de mécanismes de concertation entre les républiques périphériques de la CEI et la Banque centrale de Russie dans l’élaboration de la politique monétaire.6
D’une manière générale nous avons atteint nos objectifs. Nous avons été reçu par des personnalités de haut rang en charge du dossier des Institutions de Bretton Woods et ceci malgré les délais très courts dans l’organisation de cette mission.7 Nos entretiens ont été francs et cordiaux. Nous avons obtenu l’assurance que l’éventualité de leur participation dans un groupe de vote présidé par la Suisse aussi bien aux Institutions de Bretton Woods qu’à la BERD allait être étudiée avec le plus grand soin et qu’aucune décision ne serait prise avant le 17 mai. Enfin la délégation est très reconnaissante du travail effectué par l’Ambassade de Suisse à Moscou.
Dans la phase préliminaire à l’adhésion des républiques d’Asie centrale aux Institutions de Bretton Woods, la Belgique a déployé de grands efforts puisqu’elle les a parrainé. Mais il faut tout de suite ajouter que la Belgique a profité de la présence dans son groupe de vote de la Turquie. La Turquie est en effet un centre nerveux important dans la région, elle jouit dans ces républiques proches par la langue, la religion et la culture, d’un attrait indéniable.
La présence belge n’est pour autant pas encore décisive. Pour preuve le président kazakh8 et son gouvernement ont en effet décidé que le ministre des finances9 ne se rendrait pas à Washington pour la session de printemps des Institutions de Bretton Woods et ceci malgré l’invitation belge. Cette attitude est à notre avis très significative, elle démontre que le Kazakhstan se ménage une alternative. Dans les autres républiques nous avons décelé un sentiment identique même s’il était moins explicite.
D’une manière générale les trois républiques visitées ont exprimé un sentiment d’égarement dans les institutions internationales. Elles cherchent des partenaires qui pourraient les guider. Elles ont exprimé le besoin de se donner un peu de temps de réflexion avant de prendre une décision définitive quant à leur incorporation dans un groupe de vote déterminé au sein du FMI et de la Banque mondiale. Dans cette perspective notre souhait de ne pas précipiter leur décision leur convient parfaitement.
Enfin tous nos interlocuteurs d’Asie centrale ont insisté sur la neutralité suisse en tant qu’exemple pertinent pour leur république, car elles cherchent à se positionner entre l’Europe et l’Asie, entre l’Islam et la Chrétienté. La Suisse jouit en outre d’une image de marque très positive, ce qui est sans aucun doute un atout.
Ainsi la proposition suisse a suscité un très vif intérêt et nos interlocuteurs nous ont assuré que l’alternative suisse sera prise en compte sérieusement dans leur processus de décision.
Notre proposition de les accueillir dans notre groupe de vote a ravi tous nos interlocuteurs. La Banque «Attali»10 est perçue très positivement dans cette région. L’adhésion est considérée comme le symbole de leur rapprochement et appartenance au monde européen développé.
Dans cette optique la Suisse jouit d’un atout indéniable: la présence turque dans son groupe. À ce titre le Kazakhstan et l’Ouzbékistan, présents à Budapest, ont été approchés par la Turquie. Une délégation kirghize s’est rendue dernièrement en Turquie. De toute évidence notre proposition tombe à un moment très opportun puisque ces républiques sont en train de prendre une décision.11
Afin de nous rendre compte, de visu, de l’état et de l’évolution de la situation économique, nous avons abordé quelques questions d’ordre général.
Dans la perspective de la création d’un fonds de stabilisation du rouble, il nous est apparu fondamental de traiter du maintien ou du retrait des républiques d’Asie centrale de la zone rouble. Tous nos interlocuteurs ont insisté sur le caractère extrêmement déséquilibré et insatisfaisant des relations entre les républiques périphériques de la CEI, en particulier celles d’Asie centrale, et la Banque centrale de Russie. Cette dernière établit la politique monétaire sans aucune concertation. Les républiques excentrées ne peuvent obtenir la quantité de rouble espérée. Les relations sont donc tendues.
À l’exception du Kazakhstan qui semble être le plus attaché à son maintien dans la zone rouble, nos interlocuteurs ont admis que des projets d’émission de monnaie nationale étaient à l’étude. Dans un avenir proche ils ne pensent pas opter pour une telle solution, mais ils n’excluent pas d’y recourir si la situation reste ce qu’elle est. Toutes les républiques se trouvent en position d’attente. En outre politiquement et symboliquement la création d’une monnaie nationale leur semble être un attribut indispensable pour affirmer leur indépendance et leur souveraineté.
Plus succinctement nous avons évoqué le problème du partage de la dette de l’ancienne Union soviétique.12 Leurs réactions ont été somme toute assez semblables. Tous ont souligné qu’ils avaient été négligés par l’ancien système de planification centralisée. Les Ouzbekhs ont été à ce sujet particulièrement explicites puisqu’il faut rappeler qu’ils ont refusé de signer la résolution quant au partage solidaire de la dette soviétique. Pour autant, ils ont affirmé qu’ils étaient prêts à faire face à leurs responsabilités, mais ils exigent d’obtenir de la Vneshekonombank et des autorités moscovites le décompte exact et désagrégé des créances à rembourser et des avoirs versés par l’Ouzbékistan à l’Union soviétique.
Enfin et dans l’optique de la visite prochaine d’une délégation de l’OFAEE (mi-mai)13 nous avons abordé les perspectives d’établissement de relations économiques et commerciales plus substantielles. Les républiques ont montré un intérêt sincère pour la signature avec la Suisse d’accords commerciaux et de promotion et de protection réciproques des investissements.
En ce qui concerne la constitution d’un groupe de vote commun dans les Institutions de Bretton Woods et à la BERD, il s’agit de maintenir un contact étroit avec les trois républiques d’Asie centrale qui sont sans aucun doute des candidats potentiels sérieux.
La délégation suisse est arrivée à la conclusion qu’il faudrait étudier l’éventualité d’engager des discussions avec les Turcs puisqu’ils sont à notre avis l’élément catalyseur dans la prise de décision de l’ensemble des républiques musulmanes de la CEI.14
L’établissement prochain de relations diplomatiques formelles (présentation des lettres de créances suisses)15 et la mission de l’OFAEE devraient permettre jusqu’à la mi-mai de garder à l’esprit de nos interlocuteurs le sérieux de l’alternative suisse.
Dans le domaine commercial et des investissements ils nous a été demandé par exemple de prendre l’initiative de la conclusion d’accords de promotion et de protection réciproques des investissements. La mission de l’OFAEE devrait jouer un rôle important dans cette perspective.16
- 1
- CH-BAR#E6100C#2003/394#44* (972.19). Cette notice au Chef du DFF, le Conseiller fédéral Otto Stich, est rédigée par Raphael Ferrillo de la Division Monnaie, économie, trésorerie de l’Administration fédérale des finances (AFF) du DFF. Elle est transmise le 28 avril 1992 par le Chef de la Division Monnaie, économie, trésorerie, le Vice-directeur de l’AFF, Daniel Kaeser, aux membres du groupe de coordination Institutions de Bretton Woods, aux Ambassades de Suisse à Ankara, Moscou et Washington, ainsi qu’au Directeur exécutif de la Suisse auprès de la BERD, l’Ambassadeur Jacques Reverdin. La notice est envoyé en copie à Ulrich Gygi, Directeur de l’AFF. Des rapports similaires sont rédigés par le Service économique et financier du DFAE, cf. dodis.ch/61146, et par l’Office fédéral des affaires économiques extérieures (OFAEE), cf. le dossier CH-BAR#E7001C#2000/124#944* (250-15).↩
- 2
- La Mission, dirigée par le Vice-directeur Kaeser, est composée du Ministre Jean-Daniel Gerber de l’OFAEE, de Thomas Kolly du Service économique et financier du DFAE et du collaborateur de l'AFF Raphael Ferrillo.↩
- 3
- Pour un aperçu de la stratégie suisse afin d’obtenir la direction d’un groupe de vote et un 24ème siège au sein du Conseil d’administration du FMI, cf. le rapport du Délégué du Conseil fédéral aux accords commerciaux, l’Ambassadeur Nicolas Imboden, au Directeur de l’OFAEE, le Secrétaire d'État Franz Blankart, du 20 mars 1992 dodis.ch/61243.↩
- 4
- Il s’agit de la votation populaire du 17 mai 1992, cf. le télex hebdomadaire 21/92 du 18 mai 1992, dodis.ch/61259. Deux objets de vote concernent l’adhésion aux Institutions de Bretton Woods: l’arrêté fédéral et la loi fédérale. Tous deux sont acceptés, avec respectivement 55.8 et 56.4% des voix, cf. FF, 1992, V, pp. 451–459.↩
- 5
- Cf. à ce propos la notice du Délégué du Conseil fédéral aux accords commerciaux, l’Ambassadeur Silvio Arioli, du 15 avril 1992 dodis.ch/61247.↩
- 6
- La question de la création d’un fonds de stabilisation du rouble est discutée dans le cadre du Groupe des 10, cf. le PVCF No 683 du 15 avril 1992, dodis.ch/60816. La question de la coordination entre la Russie et les républiques CEI est également discutée lors du Forum de Davos par le Président de la Confédération René Felber, cf. DDS 1992, doc. 5, dodis.ch/60457.↩
- 7
- Pour la liste des personnes rencontrées, cf. le facsimilé dodis.ch/60950, annexe.↩
- 10
- Jacques Attali est le premier président de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), qu’il contribue à fonder. Sur la création de la BERD et la nomination de Jacques Attali en 1990, cf. dodis.ch/54933.↩
- 11
- Sur la réunion à Budapest et sur l’importance jouée par la Turquie, cf. la notice de l’Ambassadeur Arioli, du 21 avril 1992 dodis.ch/62420.↩
- 12
- Cf. DDS 1992, doc. 13, dodis.ch/58206.↩
- 13
- Sur la mission dirigée par le Ministre Rudolf Ramsauer, Vice-directeur de l’OFAEE, cf. le rapport du 26 mai 1992, dodis.ch/61198.↩
- 14
- Une première rencontre formelle entre une délégation turque et suisse a lieu à Istanbul le 16 juin 1992 entre le Conseiller fédéral Stich, Chef du DFF, et la Ministre de l'économie Tansu Çiller, cf. dodis.ch/61063.↩
- 15
- L’Ambassadeur de Suisse à Moscou, Jean-Pierre Ritter, est nommé Ambassadeur de Suisse dans les pays CEI, cf. le télex No 153 du 6 juin 1992 sur son voyage au Kazakhstan et au Kirghizistan, dodis.ch/60853. Au mois de juillet, il effectue un deuxième voyage au Turkménistan, en Ouzbékistan et en Azerbaïdjan, cf. le télex No 188 du 20 juillet 1992, dodis.ch/61106.↩
- 16
- La première mission de l’OFAEE se rend en Russie, en Ukraine, en Ouzbékistan et au Kazakhstan du 8 au 19 mai 1992. Pour le rapport du Vice-directeur de l’OFAEE Ramsauer, cf. dodis.ch/61198. Une deuxième mission se rend en Ouzbékistan, au Kazakhstan, au Tadjikistan, au Kirghizistan et au Turkménistan du 24 août au 4 septembre 1992, cf. dodis.ch/61254.↩
Liens avec d'autres documents
http://dodis.ch/61146 | voir aussi | http://dodis.ch/60950 |
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Adhésion aux Institutions de Bretton Woods (1989–1992)
Ouzbékistan (Général) Kazakhstan (Général) Kirghizistan (Général) Établissement des relations diplomatiques avec les pays CEI (1992)