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Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 26, doc. 139
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001E-01#1987/78#1064* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(E)-01/1987/78 272 | |
Dossier title | Dai-Ichi Kangyo Bank Ltd., Filiale in der Schweiz (1971–1975) | |
File reference archive | C.41.731.1 |
Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001E-01#1987/78#3792* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(E)-01/1987/78 658 | |
Dossier title | Reziprozitätsbestimmungen für Banken (1968–1975) | |
File reference archive | C.41.731.0.(1) • Additional component: Japan |
dodis.ch/39653 Notice pour le Chef du Département politique, P. Graber1 BANQUE JAPONAISE EN SUISSE (DAI-ICHI-KANGYO BANK) – CRÉDIT SUISSE AU JAPON
I. Bien que l’affaire précitée vous soit connue, notamment par nos notes des 4 mars2 et 14 novembre 19743, ci-jointes à toutes fins utiles avec une autre du 8 février 19744 au Secrétaire général, nous vous en rappelons succinctement l’essentiel et le développement.
1. Il appartient à la Commission fédérale des banques de se prononcer sur les demandes de création de banques sollicitées par des étrangers. La Loi5 prévoit que l’autorisation ne peut être accordée que si l’État de domicile du requérant accorde la réciprocité.
2. Une banque japonaise, la Dai-Ichi-Kangyo Bank, a demandé en 1973 à pouvoir créer une filiale en Suisse6. À la même époque, le Crédit suisse a exprimé le désir d’ouvrir une filiale au Japon. M. Lang, Directeur général du Crédit suisse, s’en est entretenu avec M. Thalmann au début de l’année dernière7. À l’issue de cet entretien, le Service économique et financier a été chargé de poursuivre sa recherche en vue d’une solution devant permettre à la Dai-Ichi-Kangyo Bank de s’établir en Suisse puisque c’est de cette décision que devrait découler la possibilité pour le Crédit suisse de s’installer au Japon.
3. Malgré nos efforts, la Commission fédérale des banques, considérant que le Japon ne garantit pas pleinement la réciprocité au sens de notre législation, n’a pas accordé l’autorisation sollicitée par la banque japonaise8. Elle est arrivée à la conclusion que le problème relève de la politique économique extérieure de la Confédération et qu’il échappe comme tel à la loi sur les banques, simple loi de police. Elle a donc suggéré de le régler par la conclusion d’un accord bilatéral.
II. C’est donc dans ce sens que nous avons recherché une solution avec la Direction du droit international public. En accord avec la Commission fédérale des banques, nous avons préparé une proposition9 demandant au Conseil fédéral d’approuver un projet d’accord de réciprocité bancaire avec le Japon. Comme cet arrangement est dicté par nos intérêts économiques généraux au Japon10, nous l’avons fondé sur l’article 102, chiffre 8, de la Constitution11 qui concerne les mesures que le Conseil fédéral est autorisé à prendre dans l’intérêt des relations extérieures de la Suisse. Selon cette construction, le Conseil fédéral autoriserait la conclusion de l’accord qui prendrait la forme d’un échange de lettres et déciderait, à l’intention de la Commission fédérale des banques, qu’en ce qui concerne la demande d’autorisation de s’établir en Suisse présentée par la Dai-Ichi-Kangyo Bank, la réciprocité est garantie par le Japon, ce dernier s’engageant, par échange de lettres, d’autoriser le Crédit suisse à s’établir au Japon.
Cet avant-projet de proposition a été soumis à la Division du commerce qui l’appuya12 et à l’Administrationfédérale des finances. Cette dernière qui, lors de consultations préliminaires s’était montrée assez positive, s’est distanciée de notre proposition13. Pour elle, c’est délibérément et contrairement à la proposition14 du Conseil fédéral que le Parlement en 1970 a confié à la Commission fédérale des banques le soin de juger si la réciprocité bancaire est garantie par les États étrangers15. Dès lors le Conseil fédéral ne pourrait déroger à la loi que si un accord spécifique soumis à la ratification parlementaire était conclu avec le Japon. L’Administrationdes finances a ajouté qu’elle se rallierait à notre solution si la Division de justice la partageait.
Mais la Division de justice s’est ralliée à l’avis de l’Administrationdes finances: l’accord prévu devrait être soumis à la ratification des Chambres16.
III. Nous sommes ainsi dans une impasse, à propos d’une affaire simple à laquelle le Japon attache une grande importance. Les autorités de ce pays ont maintes fois rappelé, tant à Berne qu’à Tokyo, l’intérêt qu’elles attachent à l’établissement de la Dai-Ichi-Kangyo Bank en Suisse.
L’attitude suisse surprend – avec quelque raison – les Japonais. Leur bon vouloir dans cette affaire est évident. Ils nous l’ont fréquemment démontré. Nos exigences juridiques sont mal comprises – n’avons-nous pas déjà autorisé dans des circonstances très analogues deux banques japonaises17 à s’établir en Suisse? Nous risquons de blesser des susceptibilités. On s’étonne à Tokyo de la difficulté d’aboutir, alors que la garantie d’autoriser le Crédit suisse à ouvrir une filiale à Tokyo a été accordée formellement depuis longtemps18. Cette situation préoccupe les milieux suisses au Japon. Ils craignent d’avoir à subir les conséquences du mécontentement du Gouvernement japonais très bien disposé à leur égard. En Suisse, le Crédit suisse réagit avec vigueur à cause de la discrimination dont il est victime par rapport à la Société de Banque Suisse et à l’Union de Banques Suisses qui ont pu s’établir au Japon à la suite de l’arrangement approuvé par le Conseil fédéral le 21 décembre 197019. En fait, il y a une part d’arbitraire évident étant donné que les circonstances sont les mêmes20.
IV. L’Administrationfédérale des finances et la Division de justice ont rendu un avis juridique. Il ne tient pas compte des aspects politiques, économiques et diplomatiques du problème qui sont prépondérants en l’occurrence. Il est donc de notre devoir de vous informer de cette impasse qui dépasse, en raison de ses implications, le niveau des instances administratives qui ont statué. Comme d’autre part ce cas d’espèce illustre à l’envi les difficultés que ne cessent de nous causer une loi mal conçue, nous nous devons de le porter à votre connaissance et à celle du Conseil fédéral.
V. À ce stade de la procédure, on peut imaginer les hypothèses suivantes:
1. Le Conseil fédéral retient comme prioritaires les données politiques, économiques et diplomatiques du problème. Il accepte notre proposition selon l’avant-projet ci-joint du 2 septembre 197421.
2. Le Conseil fédéral soumet le projet d’accord aux Chambres comme le demandent l’Administrationdes finances et la Division de justice. Cette procédure est lourde et inappropriée pour un accord de portée très limitée. Elle donnerait au surplus à l’affaire une publicité dont ni les Japonais ni le Crédit suisse ne voudraient. En tout cas, il faudrait s’assurer préalablement de leur accord.
3. Le Conseil fédéral renvoie l’affaire à la Commission fédérale des banques pour qu’elle reconsidère sa décision. Cette solution n’est guère imaginable en droit.
4. Les intéressés font un recours de droit administratif au Tribunal fédéral contre la décision négative de la Commission. Il est peu vraisemblable que la Dai-Ichi-Kangyo Bank utilise ce moyen de droit très aléatoire. Au plan juridique, il ne semble guère possible que le Crédit suisse, quoique directement concerné, puisse lui-même recourir. Nous déconseillons cette solution qui, entre autres, donne une image peu flatteuse de notre pays au Japon qui ne comprend pas que nous n’arrivions pas à résoudre, après tant de mois, sur le plan administratif d’abord, gouvernemental ensuite, un problème spécifique d’une importance intrinsèque très modeste et que l’Administration japonaise veut résoudre de son côté de façon pragmatique, ne retenant que l’intérêt réciproque de deux États entretenant d’étroites et confiantes relations.
5. Révision de la loi. L’inconvénient majeur de cette solution est les nouveaux et longs délais qu’elle implique sans que l’on soit assuré du succès de l’opération. Par une révision de la loi, nous chercherions à résoudre la question des autorisations à accorder pour des motifs de nature politique, économique et diplomatique. En 1970, les Chambres, s’opposant à la proposition du Conseil fédéral, ont donné à la Commission fédérale des banques le soin d’autoriser l’ouverture de banques étrangères. Elles ont voulu, par cette décision, éviter que ces questions ne prennent une tournure politique. Une expérience de quelque cinq années a pourtant démontré que ce genre d’affaires ne peut pas toujours être traité au plan administratif. Dans notre note ci-annexée du 8 février 197422 au Secrétaire général (page 3, chapitre IV), nous avons rappelé des cas d’interventions diplomatiques (Ministre français Schumann23, Vice-président24 du Conseil roumain). Si la Commission fédérale des banques doit rester l’organisme compétent pour accorder aux étrangers l’autorisation d’ouvrir des banques en Suisse, il est aussi indispensable que le Conseil fédéral puisse conclure des accords de réciprocité bancaire non soumis à la ratification parlementaire, lorsque les intérêts politiques, diplomatiques et économiques l’exigent. Le rôle du Conseil fédéral dans ce domaine devrait d’ailleurs aussi être parfois négatif. Le cas suivant l’illustre: la Banque nationale de la République de Chine (Taïwan) recherche les moyens de s’établir en Suisse25. Ce cas a pu pour l’instant être différé, la réglementation formosane imposant certaines restrictions en matière de réciprocité. Mais cette banque (qui est en fait la banque centrale) est en mesure de faire modifier la loi sur ce point. Le cas échéant la réciprocité serait donnée et la Commission fédérale des banques ne pourrait pas écarter la requête. Il est inutile de s’étendre sur les conséquences d’une telle décision sur nos relations avec la Chine populaire26! La loi sur les banques devrait ainsi donner au Conseil fédéral la compétence soit de conclure des accords de réciprocité bancaire (cas japonais) soit de refuser à une banque le droit de s’établir en Suisse (cas Taïwan).
VI. Au terme de cet inventaire des esquisses d’hypothèses possibles, il apparaît qu’aucune n’est véritablement satisfaisante si l’on veut régler à la fois le cas d’espèce de la Dai-Ichi et le principe de la réciprocité. Or, c’est bien à quoi nous devons tendre.
C’est à cette fin que nous avons imaginé la solution panachée qui combine les hypothèses 1 et 5 ci-dessus. Elle consiste à vous demander de régler le cas de la Dai-Ichi, selon l’hypothèse I, soit en faisant vôtres les considéra tions de notre avant-projet du 2 septembre ci-joint27. Nous le faisons compte tenu de l’importance de cette affaire pour le climat de nos relations avec le Japon.
Toutefois, comme cette solution n’est pas pleinement satisfaisante du point de vue juridique, il faudrait faire en sorte que de tels cas ne puissent plus se reproduire à l’avenir. À cet effet, il faudrait réviser la notion de la réciprocité dans la loi sur les banques. Cette révision ne pose pas de problèmes in surmontables puisque le Chef28 du Département des finances a récemment donné des instructions pour une étude préliminaire de la révision de cette loi29 pour d’autres motifs. Il suffirait donc d’en élargir un peu la portée et de procéder rapidement.
Cette révision de la conception de la réciprocité devrait permettre de ne plus l’interpréter uniquement sous l’angle juridique. Nous l’avons vu, elle prend souvent un aspect hautement politique. Notre département ne saurait donc s’en désintéresser puisqu’elle comporte presque toujours des implications de politique extérieure. Nous nous devons en conséquence de participer activement à la solution de ce problème.
Remarquons pour terminer que l’Administrationfédérale des finances et la Commission fédérale des banques partagent l’opinion que la réciprocité n’est pas réglée de façon satisfaisante dans la loi actuelle et que son manque de souplesse peut conduire à des situations non seulement contraires à nos intérêts mais intolérables. Une solution pourrait être donnée par le modèle de la loi fédérale modifiant la loi sur la navigation aérienne du 17 décembre 197130 (Art. 34) qui prévoit une clause politique épargnant le domaine réservé du Conseil fédéral en matière diplomatique. Il y aurait là peut-être l’amorce31 d’une solution qui permettrait de tenir compte à la fois de l’indispensable division des pouvoirs et des impératifs diplomatiques.
- 1
- Notice (copie): CH-BAR#E2001E-01#1987/78#3792* (C.41.731.0(1)). Rédigée par L. Rochat et J. Zwahlen. Signée par J. Zwahlen.↩
- 2
- Notice de J. Zwahlen à P. Graber du 4 mars 1974, CH-BAR#E2001E-01#1988/16#4172* (C.41.731.1).↩
- 3
- Notice de J. Zwahlen à P. Graber du 14 novembre 1974, CH-BAR#E2001E-01#1987/78#3792* (C.41.731.0.(1)).↩
- 4
- Notice de J. Zwahlen à E. Thalmann du 8 février 1974, dodis.ch/39728.↩
- 5
- Loi fédérale modifiant la loi sur les banques et les caisses d’épargne du 11 mars 1971, RO, 1971, pp. 808–824.↩
- 6
- Requête de L. Vieli au nom de la Dai-Ichi Kangyo Bank, Ltd. à la Commission fédérale des banques du 25 mai 1973, CH-BAR#E6521B#1985/225#718* (B.01).↩
- 7
- Cf. note 2.↩
- 8
- Cf. la lettre de A. Matter au Service économique et financier du Département politique du 3 janvier 1974, dodis.ch/39730.↩
- 9
- Projet de proposition du Département politique du 27 septembre 1974, doss. comme note 1.↩
- 10
- Pour les relations économiques avec le Japon, cf. DDS, vol. 26, doc. 128, dodis.ch/39647, point 1.↩
- 11
- Annotation manuscrite dans la marge: Trop massif (à éviter).↩
- 13
- Cf. la lettre de B. Müller à J. Zwahlen du 10 janvier 1975, CH-BAR#E2001E-01#1987/78#1027* (C.41.731.0.(1)).↩
- 14
- Message du Conseil fédéral à l’Assemblée fédérale concernant la révision de la loi sur les banques du 13 mai 1970, FF, 1970, I, pp. 1157–1218.↩
- 15
- Pour les discussions au Conseil des États les 29 septembre et 18 décembre 1970, cf. Bull. of. CE, pp. 296–312 et 465–467. Pour les débats au Conseil national les 10 et 15 décembre 1970 et le 1er mars 1971, cf. Bull. of. CN, 1970, pp. 741–755 et 761–781 et 1971, pp. 84–86.↩
- 16
- Cf. la lettre de J. Voyame à E. Diez du 3 février 1975, dodis.ch/39736.↩
- 17
- La Bank of Tokyo, Ltd. et la Fuji-Bank, Ltd. Cf. DDS, vol. 25, doc. 117, dodis.ch/35515, et doc. 137, dodis.ch/35508, point 3d. Annotation manuscrite dans la marge: Entretemps, la loi a changé!↩
- 18
- Cf. la lettre de G. E. Bucher à P. A. Nussbaumer du 11 janvier 1972, doss. comme note 2: L’autorisation d’ouvrir cette représentation a été accordée le 23 décembre 1971 par le Ministère des Finances.↩
- 19
- PVCF No 2226 du 21 décembre 1970, dodis.ch/35516. Cf. DDS, vol. 25, doc. 136, dodis.ch/35552, point 3d.↩
- 20
- Annotation manuscrite dans la marge: pas vraiment.↩
- 21
- Il s’agit très vraisemblablement du projet de proposition du Département politique du 27 septembre 1974, doss. comme note 1.↩
- 22
- Cf. note 4.↩
- 23
- Cf. la lettre de R. Keller à A. Matter du 11 octobre 1973, CH-BAR#E2001E-01#1988/16#3382* (C.41.731.0.(1)).↩
- 25
- Cf. doss. CH-BAR#E2001E-01#1987/78#1075* (C.41.731.1).↩
- 26
- Cf. DDS, vol. 26, doc. 41, dodis.ch/37698; doc. 137, dodis.ch/37700; doc. 153, dodis.ch/37707; doc. 157, dodis.ch/37693 et doc. 178, dodis.ch/37717.↩
- 27
- Cf. note 21. Pour la suite de cette affaire, cf. la lettre de P. Graber à K. Furgler et E. Brugger du 27 mai 1975, dodis.ch/39741 et le télégramme No 162 de J. Zwahlen à l’Ambassade de Suisse à Tokyo du 29 octobre 1975, dodis.ch/39744.↩
- 28
- G.- A. Chevallaz.↩
- 29
- Cf. doss. CH-BAR#E6520B#2007/62#108* (411.13).↩
- 30
- Loi fédérale modifiant la loi sur la navigation aérienne du 17 décembre 1971, RO, 1973, pp. 1738–1750.↩
- 31
- Annotation manuscrite dans la marge: mais pas aller si loin.↩
Relations to other documents
http://dodis.ch/39728 | is quoted in | http://dodis.ch/39653 |
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