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Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 24, Dok. 69
volume linkZürich/Locarno/Genève 2012
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E2807#1974/12#410* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 2807(-)1974/12 36 | |
Dossiertitel | Schweizer Delegation beim Europarat. Sitzungen (1968–1969) | |
Aktenzeichen Archiv | 071-06 |
dodis.ch/32480 Notice pour le Chef du Département politique, W. Spühler1 Conseil de l’Europe; Séance avec la délégation suisse à l’Assemblée consultative2; 13 mars, 14 h 30
Vu le temps limité dont vous disposez, nous avons pensé que vous pourriez ouvrir la séance en faisant un tour d’horizon pour exposer notre conception du rôle de l’Assemblée et du Conseil en général et mentionner les principaux problèmes du moment. Cet exposé, qui serait suivi d’une discussion, précédera trois exposés sur l’intégration européenne3 (M. Iselin), la politique et la coopération scientifique4 (M. Vallotton) et la réforme éventuelle des structures du Conseil5 (M. Gagnebin). En cas de besoin, ces trois derniers sujets pourraient être traités en votre absence.
Nous avons préparé, à votre attention, le canevas suivant d’un exposé général:
1) Conformément au statut du Conseil, les représentants à l’Assemblée siègent à titre personnel. Cette indépendance est bénéfique, car elle permet de lancer librement des idées nouvelles et de susciter des actions gouvernementales (exemple: lutte contre la pollution des eaux6, collaboration technologique7). La Suisse a des intérêts identiques à défendre dans les deux grands organes du Conseil. Des échanges du vues entre le Conseil fédéral et nos parlementaires sont donc souhaitables, même s’ils n’ont pas pour but d’aboutir à une identité de vues.
Nous attachons une grande importance à l’Assemblée et au rôle de notre délégation. Les activités de l’Assemblée intéressent le grand public, qui ne sait pas grand chose de ce qui se fait au niveau gouvernemental; dans l’opinion, le Conseil, c’est surtout l’Assemblée. C’est d’ailleurs ce côté parlementaire qui fait l’originalité principale de l’Organisation. N’oublions pas que le Conseil est la plus ancienne organisation européenne8 et qu’il est issu d’un mouvement populaire. Le fait qu’il n’a jamais eu un caractère technocratique prédominant lui vaut de garder la faveur du public.
Les contacts personnels que les délégués peuvent avoir avec leurs collègues de l’AELE et aussi de la CEE nous sont très utiles. C’est une occasion unique de faire connaître notre position au sein des autres parlements.
2) Sur le plan gouvernemental, la collaboration suisse avec le Conseil demeure intense et se déroule harmonieusement. L’affaire de Carona 9 a pourtant quelque peu troublé nos relations avec le secrétaire général. Ce projet a dû être abandonné, ce dont M. Smithers a conçu de l’amertume. Ce moment difficile s’achève et le climat se rassérène. Nous inviterons le secrétaire général prochaine ment à Berne10 pour mettre un point final à l’affaire et constater que celle-ci ne met pas en cause notre volonté de coopération avec le Conseil. Il paraît aussi que le soin avec lequel nous suivons les travaux des experts, l’attention que nous portons aux questions budgétaires et la lutte que nous menons contre les dépenses exagérées et les doubles emplois sont parfois interprétés comme les indices d’un esprit négatif. Rien n’est plus faux.
Il reste néanmoins que le secrétariat passe par une phase de transition. M. Smithers est un homme susceptible qui nourrit de grandes ambitions. Dans certains domaines, il mène une politique personnelle, parfois contre la volonté des Etats membres. Il n’est pas toujours bien entouré. Quelques-uns de ses collaborateurs agissent à son insu et donnent l’impression de vouloir jouer l’Assemblée contre les ministres et vice versa. Le départ de M. Modinos va priver le secrétariat d’un homme de grande valeur qui était un élément pondérateur. Aucun des deux successeurs proposés (le Turc Akbil et l’Italien Sforza) n’ont vraiment l’envergure nécessaire. Le risque existe que le Conseil entre dans une période de faiblesse, surtout si le Conseil ne fait pas appel à une personnalité de premier plan pour succéder l’an prochain à M. Smithers11.
3) Le rôle du Conseil est double
a) il est d’abord un instrument permanent de coopération européenne dans les domaines juridique et technique, à même de trouver des solutions embrassant les Six et les Sept, ce qui facilite à long terme le rapprochement des deux groupes en évitant que chacun d’eux évolue isolément. La coopération européenne à Strasbourg est donc le prélude à l’intégration. Le programme de travail constitue le cadre de cette coopération, qui incombe au premier chef aux comités d’experts12 et exige des administrations nationales un effort d’adaptation constant, une gymnastique intellectuelle fort utile. Dans ce domaine, l’Assemblée est le catalyseur des idées, elle donne des impulsions. Son rôle doit aussi être de faciliter l’adoption des conventions conclues par les gouvernements en préparant le terrain dans les parlements nationaux. Nous souhaitons cependant que l’Assemblée ne multiplie pas trop ses initiatives. Les gouvernements ne peuvent matériellement donner suite à toutes, et cette abondance engendre la lassitude. Il faudrait aussi éviter de voter des recommandations qui équivalent à empiéter sur les activités d’une autre organisation. Par exemple, la recommandation no 50013 invitait les gouvernements membres du Conseil à convoquer une conférence des pays industrialisés pour définir une politique commune à la conférence UNCTAD de Delhi14. Or, l’OCDE15 est en permanence, depuis des années, cet organe de coordination.
b) Le Conseil est aussi une organisation politique et cela sur le plan du Comité des ministres comme sur celui de l’Assemblée.
Selon le statut, cette activité devrait s’exercer dans le cadre européen. En fait, on constate que l’Assemblée déborde fréquemment ce cadre. Cela vient du fait que le secrétariat a tendance, lorsque la construction européenne marque le pas, de chercher un dérivatif en dehors du cercle des Etats membres. Exemple: les relations Est – Ouest16 depuis deux ans.
4) En résumé, si l’on veut fixer des priorités, nous pensons que le Conseil devrait poursuivre, dans l’ordre, les objectifs suivants:
a) La coopération entre les membres, par un effort sans relâche en vue de faciliter la fin de la division économique de l’Europe occidentale. Les conventions jouent à cet égard un rôle capital. Nous allons probablement pouvoir en signer prochainement plusieurs. La signature éventuelle de la Convention des droits de l’homme17 retient toute notre attention. Il serait bon que la délégation parlementaire veille à préparer le terrain aux Chambres fédérales.
b) Maintien de la cohésion interne. La situation en Grèce18 a jeté un trouble profond dans le Conseil. Les initiatives des scandinaves sont excessives (appui au parti de M. André Papandreou) et peuvent avoir de graves conséquences. En raison de sa neutralité, la Suisse doit agir avec modération et chercher des solutions constructives. Cette attitude n’exclut pas la fermeté, car nous ne pouvons fermer les yeux sur une violation du statut (cf. votre intervention à Paris en décembre19). Ce genre de pression ferme, mais sans brutalité, aura sûrement plus d’effet que des démarches qui pousseraient la Grèce aux extrémités.
c) Relations avec le reste du monde. Il serait faux que le Conseil vive en vase clos sans tenir compte de l’évolution du monde qui l’entoure et qui a beaucoup changé depuis sa fondation. Mais il importe d’éviter une dispersion excessive qui aboutit d’ailleurs à des résultats parfois contradictoires. Le comité des ministres n’a pas l’intention de donner suite à des recommandations de l’Assemblée qui concernent des problèmes étrangers à l’Europe. Il est regrettable que le greffe paraisse entretenir sur ce point les illusions de l’Assemblée.
Le problème des relations avec l’Europe orientale est très important. La Suisse neutre est intéressée à ce que la détente progresse et à ce que le Conseil ne soit pas confondu, comme il l’est encore parfois en Europe orientale, avec une filiale de l’OTAN. La détente est cependant un objectif à long terme qui ne doit pas nous détourner de l’objectif principal: l’union plus étroite entre les membres du Conseil. Dans tous les cas, le rôle du Conseil ne peut être que modeste car la détente en Europe est étroitement liée au règlement du problème allemand20 par les superpuissances. Par la force des choses, le champ d’action du Conseil est donc limité au domaine technique. Sur ce plan, le Conseil a sans doute une carte à jouer, bien que le Secrétaire général ne paraisse pas toujours juger la situation de l’Est avec réalisme et objectivité. Il est convaincu que l’Europe orientale éprouve un vif intérêt pour une collaboration multilatérale avec l’ouest et qu’elle cherche un forum approprié, et craint d’être pris de vitesse par d’autres organisations (CEE-ONU, UNESCO). L’exactitude de cette thèse n’est pas vérifiée. La méfiance envers le Conseil demeure grande en URSS (exemple récent: l’URSS s’est opposée à New York à ce que le Conseil soit invité comme observateur à la conférence des Nations Unies sur les droits de l’homme à Téhéran21). Les autres pays d’Europe orientale ne disposent pas encore d’une liberté de mouvement suffisante. En ce qui concerne l’Assemblée, le fait qu’il n’y a pas de communistes dans les délégations nationales, les invitations faites à des parlementaires américains aussi réactionnaires que M. W. Hayes22, l’existence de la commission des nations non représentées jouent un rôle négatif.
Quoi qu’il en soit, à l’Est comme à l’Ouest, la plupart des pays ont une poli tique étrangère active et cherchent à améliorer leurs relations sur une base bilatérale de façon à en tirer un avantage politique (échanges commerciaux etc.). La détente est d’abord une affaire intergouvernementale où le plan bilatéral a la priorité, le multilatéral devant se contenter des résidus. On pourrait dire que le domaine laissé aux organisations internationales représente ici le plus petit commun dénominateur des membres. Pour la Suisse, qui n’a pas une politique étrangère aussi active avec les pays de l’Est, les activités multilatérales re vêtent pourtant un plus grand intérêt. L’attitude que nous avons jusqu’à présent défendue au Comité des ministres (contacts techniques, l’initiative devant être prise par les pays de l’Est) correspond au mandat donné à M. Smithers et demeure valable.
- 1
- Notice: E2807#1974/12#410* (071-06). Rédigée par F. Pictet et signée par E. Thalmann.↩
- 2
- Cf. le procès-verbal de cette séance du 30 avril 1968, dodis.ch/32481.↩
- 3
- Exposé de J. Iselin Europäische Integration: Vorschläge für ein handelspolitisches Arrangement du 30 avril 1968, dodis.ch/30866. Cf. aussi doc. 145, dodis.ch/33236.↩
- 4
- Exposé de E. Valloton du 30 avril 1968, dodis.ch/33681.↩
- 5
- D. Gagnebin n’a pas pris part à la séance du 30 avril. Cf. le procès-verbal de cette séance, dodis.ch/32481, p. 1.↩
- 6
- Cf. doss. E2003A#1980/85#190* (o.121.320.11).↩
- 7
- Sur la collaboration technologique en Europe, cf. DDS, vol. 24, doc. 178, dodis.ch/33038. Sur le Conseil de l’Europe, cf. doss. E2003A#1980/85#993* (o.320.021.2).↩
- 8
- Cf. DDS, vol. 17, doc. 115, dodis.ch/4429; DDS, vol. 18, doc. 1, dodis.ch/5020; DDS, vol. 21, doc. 76, dodis.ch/15520, et DDS, vol. 22, doc. 120, dodis.ch/30487.↩
- 9
- Sur la « FondazioneCelestina, Rencontres Européennes d’Arbea», cf. la notice de H.-P. Tschudi aux membres du Conseil fédéral du 17 octobre 1967, dodis.ch/33685; le lettre de P. Smithers à W. Spühler du 8 février 1968, dodis.ch/33686 et la notice de E. Thalmann à W. Spühler du 9 février 1967, dodis.ch/33687. L’affaire a été discutée par le Conseil fédéral, cf. le PVCF délibératif de la 61ème séance du 29 septembre 1967, p. 1 et le PVCF délibératif de la 67ème séance du 24 octobre 1967, E1003#1994/26#8*, p. 2.↩
- 10
- Sur le déjeuner offert en l’honneur de P. Smithers le 18 novembre, cf. la notice de E. Thalmann du 18 novembre 1968, E2807#1974/12#405* (071-01).↩
- 11
- L. Tončić-Sorinj a succédé à P. Smithers. Cf. aussi la lettre de P. Smithers à W. Spühler du 10 septembre 1969, dodis.ch/33294.↩
- 12
- Pour un aperçu des organes et comités du Conseil de l’Europe dans lesquels la Suisse est représentée, cf. la notice de la Division des organisations internationales du Département politique du 20 septembre 1968, dodis.ch/32482. Sur la question de la scolarisation des enfants des travailleurs immigrés, cf. DDS, vol. 24, doc. 166, dodis.ch/32356.↩
- 13
- Recommandation 500 relative aux relations entre l’Europe et les pays en voie de développement dans le cadre de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED – UNCTAD) du Conseil de l’Europe du 27 septembre 1967, E2003A#1980/85#115* (o.121.21).↩
- 14
- Sur la deuxième conférence de la CNUCED à New Delhi du 1er février au 29 mars 1968, cf. la notice de P. R. Jolles du 12 février 1968, dodis.ch/33682; la notice de P. R. Jolles du 2 avril 1968, dodis.ch/33683 et le PVCF No 1343 du 28 août 1968, E1004.1#1000/9#737*. Sur la CNUCED en général, cf. le PVCF No 1319 du 11 août 1967, dodis.ch/32987; la déclaration d’ouverture de P. R. Jolles et la déclaration suisse sur l’intégration régionale entre pays en voie de développement à la cinquième session du Conseil de la CNUCED d’août 1967, dodis.ch/32988 et dodis.ch/32989.↩
- 15
- Sur les relations de l’OCDE avec les pays en voie de développement, cf. le PVCF No 250 du 12 février 1969, dodis.ch/33693. Sur le CAD, cf. DDS, vol. 24, doc. 125, dodis.ch/32843. Sur l’OCDE en général, cf. DDS, vol. 24, doc. 71, dodis.ch/33017 et doc. 128, dodis.ch/33024.↩
- 16
- Cf. le Protokoll der Schweizer Delegation beim Europarat Sitzung du 8 mars 1967, dodis.ch/33633.↩
- 17
- Sur la Convention européenne des droits de l’homme, cf. DDS, vol. 23, doc. 141, dodis.ch/31820; le discours de W. Spühler à la manifestation publique pour le suffrage féminin du 1er février 1968, dodis.ch/34084; le PVCF No 420 du 20 mars 1968, dodis.ch/33645; l’exposé de H. Langenbacher à la séance des déléguées de l’Association suisse pour le suffrage féminin les 15 et 16 juin 1968 à Lucerne, dodis.ch/34085 et le PVCF No 1964 du 9 décembre 1968, dodis.ch/33644.↩
- 18
- Cf. DDS, vol. 24, doc. 36, dodis.ch/32733 et doc. 186, dodis.ch/33247.↩
- 19
- Déclaration de W. Spühler à Paris du 11 décembre 1967, dodis.ch/32751.↩
- 20
- Cf. DDS, vol. 24, doc. 5, dodis.ch/32461.↩
- 21
- Cf. DDS, vol. 24, doc. 80, dodis.ch/33245.↩
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