Classement thématique série 1848–1945:
7. ATTITUDE DE LA SUISSE À L’ÉGARD DES JUIFS
7.2. ATTITUDE DE LA SUISSE FACE AUX PERSÉCUTIONS ANTISÉMITES
7.2.3. FRANCE
Également: Réunion interne à l’Office fédéral de guerre pour l’assistance, en présence de représentants de la Croix-Rouge, de Rothmund et de de Haller, sur le sort des enfants juifs hospitalisés dans les foyers de la Croix-Rouge suisse en France et les enfants juifs de nationalité française actuellement en Suisse. Annexe de 4.9.1942
Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 14, Dok. 231
volume linkBern 1997
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
Signatur | CH-BAR#E2001D#1968/74#358* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 2001(D)1968/74 | |
Dossiertitel | Enfants de juifs de la France non-occupée et de la France occupée déportés (1942–1945) | |
Aktenzeichen Archiv | B.55.47.05 |
dodis.ch/47417
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ENTRETIEN AVEC M. LE MINISTRE W. STUCKI, BERNE, LE 2 SEPTEMBRE 1942
1. Enfants d’émigrés juifs déportés de France:
M. Stucki a longuement débattu ce problème avec M. Rothmund, puis avec le Conseiller fédéral von Steiger, qui partagent entièrement son avis. Il serait à la fois inopportun et dangereux que la Croix-Rouge suisse, Secours aux Enfants, prenne l’initiative de recueillir ces enfants. S’agissant d’une mesure du Gouvernement français pris dans les conditions que nul n’ignore, une pareille initiative serait interprétée comme une manifestation de réprobation avec toutes les conséquences qu’une telle attitude comporte. Sans doute le Cartel3 aurait-il joui d’une plus grande liberté d’action. A cette occasion, M. Stucki me confie qu’il n’était guère partisan de l’absorption du Cartel par la Croix-Rouge suisse.
Je demande à M. Stucki si je peux faire état de son avis à la Séance du Comité exécutif du 4 septembre4, convoquée pour traiter ce problème. Il me répond par la négative. Il ne peut pas s’exposer, en sa qualité de représentant de la Suisse à Vichy, au risque que ses conseils et opinions soient colportés et discutés au sein des différents groupes et associations qui sont représentés au Comité exécutif. Par contre, M. Stucki ne voit pas d’inconvénient à ce que je fasse état de ce qui précède au cours de la réunion qui doit précéder la séance du Comité à laquelle participeront le Col. Remund, M. Rothmund, le Dr Saxer, M. Olgiati et moi-même, à condition qu’il soit précisé que M. Stucki ne désire pas que son avis soit invoqué en dehors de cette réunion.
Il est entendu que je renseignerai M. Stucki sur le résultat auquel aura [sic] abouti les délibérations du Comité. Je signale à M. Stucki que, selon les derniers rapports reçus par M. Remund, les enfants qui avaient été enlevés par la police au home de La Hille5, ont été réintégrés à la suite d’une visite [que M. Dubois, représentant de la Croix-Rouge suisse à Toulouse, a faite au Ministre compétent, accompagné de M. Decroux, chargé d’affaires de Suisse6
. J’ajoute que, personnellement, j’avais préconisé que, si les mesures étaient étendues aux enfants hospitalisés dans nos foyers, on n’élève pas de protestation. M. Stucki partage mon avis. Il croit néanmoins que le fait que M. Decroux, qui est très prudent, ait cru devoir accompagner M. Dubois est rassurant.
Ultérieurement, j’ai fait part à M. Stucki d’une observation de M. Saxer, à savoir qu’il n’est guère admissible que les enfants hospitalisés dans des foyers de la Croix-Rouge suisse en France soient enlevés par la police sans avertissement. Si la nouvelle que l’on a procédé ainsi se répandait en Suisse dans des familles qui hospitalisent des enfants français, M. Saxer craindrait que cela n’engendre des conséquences assez graves. M. Stucki se rallie à cette opinion. J’ai l’impression qu’il s’en occupera à Vichy.
- 1
- Sur la création en janvier 1942 du poste de Délégué du Conseil fédéral aux Œuvres d’Entraide internationale, cf. ci-dessus No 153, note 13.↩
- 2
- (Copie): E 2001 (D) 1968/74/15.↩
- 3
- Sur l’origine et le statut du Secours aux enfants, cf. notamment la circulaire du chef de la Division des Affaires étrangères du DPF, P. Bonna, aux Légations de Suisse, du 8 avril 1942, dont voici un extrait: L’origine du Cartel suisse de secours aux enfants victimes de la guerredoit être recherchée dans la guerre civile espagnole de 1936 à 1939. C’est à cette époque que fut constituée, par quelques citoyens suisses, une organisation désignée sous le nom d’«Ayuda Suiza» (Schweizerische Spanienhilfe), qui avait pour objet de secourir les enfants espagnols victimes du conflit.[...] La fondation du Cartel lui-même, tel qu’il a existé jusqu’au 31 décembre 1941, ne remonte qu’au 15 janvier 1940. C’est à cette date que, sous la présidence du Dr F. Wartenweiler, les comités d’une vingtaine d’associations suisses constituèrent ce groupement, sur l’initiative des personnes qui avaient fondé l’«Ayuda Suiza». Des sections furent créées dans de nombreux cantons et un secrétariat central fut établi à Berne, sous la direction de M. R. Olgiati. Il fut entendu, en outre, que le Cartel serait politiquement et religieusement neutre. Du 15 janvier 1940 au 31 décembre 1941, le Cartel exerça sa bienfaisante activité de façon indépendante. Cependant, en raison de la misère toujours croissante de l’enfance en Europe et des vœux de certains milieux, désireux de faire de la Suisse une vraie terre d’asile pour le plus grand nombre possible d’enfants, le Cartel sollicita et obtint son affiliation à la Croix-Rouge suisse, affiliation qui fut réalisée par un accord du 17 décembre 1941, entrant en vigueur le 1er janvier 1942. Selon cet accord, l’œuvre du Cartel, en Suisse comme à l’étranger, est dorénavant poursuivie sous le nom de « Croix-Rougesuisse, Secours aux enfants (Cartelsuisse de secours aux enfants victimes de la guerre)». La direction centrale de cette organisation a passé, dès le début de l’année courante, à un comité exécutif présidé par le médecin-chef de la Croix-Rouge suisse et composé, en outre, de quatre membres du Cartel, de quatre membres de la Croix-Rouge et de deux représentants des autorités fédérales. L’un de ces derniers est le délégué du Conseil fédéral aux œuvres d’entr’aide internationale (E 2001 (D) 2/187). Sur l’action de la Suisse en faveur des enfants victimes de la guerre, cf. le discours de M. Pilet-Golaz prononcé le 11 juin 1942 devant le Conseil national, en réponse à la motion Reinhard du 17 mars, qui invitait le Conseil fédéral à entreprendre les démarches nécessaires auprès des Etats belligérants afin de mettre sur pied une vaste œuvre de secours en faveur des enfants d’Europe menacés par la guerre, les épidémies et la famine, quel que soit le pays auquel ils appartiennent.» (E 1301 1/350 et E 2001 (D) 2/187).↩
- 4
- Le PV de la séance du 4 septembre du Comité exécutif du Secours aux Enfants se trouve in E 2001 (D) 2/188.↩
- 5
- A ce sujet, cf. la notice de E. de Haller du 28 août: Le Col. Remund, médecin-chef de la Croix-Rouge suisse et président du Comité exécutif de la Croix-Rouge suisse, Secours aux Enfants, me communique que, selon un rapport téléphonique du correspondant du Comité à Annemasse, 45 enfants juifs des deux sexes, âgés de 16 à 17 ans, hospitalisés depuis environ deux ans au château de La Hille[Départ, de l’Ariège]ont été emmenés sans explication et pour une destination inconnue par la police française. Cinq ou six enfants juifs hospitalisés à Pringy ont subi le même sort. Je recommande au Col. Remund de faire tout son possible pour que les agents, sur place, du Secours aux Enfants s’abstiennent de protester (E 2001 (D) 1968/74/15). Cf. aussi la notice rédigée par H. Rothmund, du 1er septembre (E 4800 (A) 1967/111/195).↩
- 6
- Cf. le rapport strictement confidentiel de M. Dubois, daté de Toulouse, 1er septembre, et intitulé: Rapport sur les démarches faites à Vichy en faveur de nos enfants et personnel israélites les 26, 27 et 28 août 1942. Le 4 septembre, une copie du rapport a été transmise par R. Olgiati, du Secours aux enfants, à H. Rothmund, qui à son tour l’a communiquée au Conseiller fédéral von Steiger(E 4001 (C) 1/259).↩
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