Robert Schumann äussert seine Besorgnis über die Entwicklung der französisch-deutschen Beziehungen besonders in Bezug auf das Saarland-Problem und die Europäische Verteidigungsgemeinschaft. Er ruft auch die Haltung des Westens gegenüber der UdSSR in Erinnerung.
Imprimé dans
Documents Diplomatiques Suisses, vol. 19, doc. 2
volume linkZürich/Locarno/Genève 2003
Plus… |▼▶Emplacement
Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
▼ ▶ Cote d'archives | CH-BAR#E2800#1967/59#1150* | |
Ancienne cote | CH-BAR E 2800(-)1967/59 92 | |
Titre du dossier | De Salis Pierre (1946–1960) | |
Référence archives | 44.106 |
dodis.ch/8611
Vos services m’ayant chargé d’intervenir en vue d’éviter l’ouverture de nouveaux casinos à St. Gingolph et à Annemasse, j’ai été reçu avant-hier samedi par M. Robert Schuman, Ministre des Affaires étrangères, qui m’a prié de le rappeler à votre bon souvenir. Il s’est félicité de votre récent voyage à Paris pour l’OECE2, en soulignant tout l’intérêt que cette organisation avait à voir les ministres des Affaires étrangères eux-mêmes se rendre aux séances et, notamment, aussi ceux des pays comme la Suisse, qui se trouvent dans une situation un peu spéciale. M. Schuman a ajouté que pour lui, l’OECE restait l’organisation internationale, ou plutôt européenne, la plus intéressante et que, jusqu’à maintenant, elle avait donné les résultats les plus satisfaisants.
M. Schuman m’a retenu pendant une bonne demi-heure et ne m’a pas caché l’appréhension qu’il éprouvait pour l’avenir des relations francoallemandes. Il me disait qu’étant rentré pour quelques jours à Metz à Pâques, il avait relu les mémoires de M. Stresemann et qu’il avait été frappé de la similitude de la situation entre maintenant et la phase avant la signature de l’accord de Locarno3. Il s’est montré très déçu de l’attitude des autorités allemandes et il a convenu que rien n’avait changé depuis les deux dernières guerres et que l’on se demandait ce qui devrait arriver pour amener les Allemands à de meilleurs sentiments et à une attitude plus européenne. Avec beaucoup de bienveillance, M. Schuman a attribué cette situation au fait que les partis politiques allemands n’étaient pas d’accord entre eux, à des rivalités personnelles et à des intrigues fort déplaisantes.
Il s’est montré également déçu du fait qu’il n’avait pas été possible de parapher l’accord sur la communauté de défense4, en précisant que, comme dans toutes les organisations internationales, on renvoyait la décision sur les questions importantes jusqu’au dernier moment. Cela permettait le démarrage des problèmes, mais avait l’inconvénient de concentrer sur la fin de la négociation toutes les questions graves à trancher. M. Schuman espérait cependant pouvoir signer l’accord d’ici la fin du mois, mais se faisait de grands soucis quant à la réaction du parlement français et aussi de l’opinion publique qui, à ses dires, se montrait de plus en plus récalcitrante en ce qui concerne le problème franco-allemand.
Pour ce qui est du problème de la Sarre5, mon interlocuteur a relevé que le 20 mars, il s’était entretenu avec le Chancelier Adenauer et le Président du Conseil de la Sarre pendant une heure et demie sur les questions communes et qu’il pensait que l’on était arrivé plus ou moins à un accord sur la voie à suivre pour régler ce litige. La sortie violente de M. Adenauer au parlement6 l’a pris complètement par surprise et depuis lors, les conversations n’ont pas été reprises entre les deux gouvernements. M. Schuman estime que du moment que la France s’était déclarée d’accord de tout temps à avoir des conversations sur le problème, il appartenait maintenant au Gouvernement allemand de prendre l’initiative pour de nouvelles délibérations, mais a-t-il ajouté, du moment que pour l’Allemagne il semblait que la seule solution était le retour intégral de la Sarre à ce pays, il n’y avait effectivement plus de place pour une négociation ou une discussion. En tous les cas, ce problème n’a pas avancé d’un pas depuis le discours de M. Adenauer.
En ce qui concerne enfin l’attitude vis-à-vis de la Russie, M. Schuman maintient son point de vue qu’il conviendrait de faire un grand effort de la part des Occidentaux pour donner une réponse à l’URSS qui permette de continuer l’entretien7. Il semble que les quatre Puissances occidentales étaient d’accord sur la seconde réponse, mais qu’en dernière heure, le Gouvernement américain avait formulé de nouvelles conditions, moins conciliantes. Les discussions se prolongent à Londres; les Américains seraient en voie de se rallier à la thèse des deux autres alliés, mais on ne pense pas que la réponse pourrait être prête avant une dizaine de jours.
M. Robert Schuman n’a pas caché qu’il voyait l’avenir avec une certaine anxiété et qu’il fallait tenir compte, dans une mesure toujours plus grande, de l’opinion publique française qui n’était plus aussi docile et qui voyait avec une certaine animosité, mélangée de peur, le rétablissement de l’Allemagne.
- 1
- Lettre: E 2800(-)1967/59/92.↩
- 2
- M. Petitpierre s’est rendu à Paris du 27 au 29 mars 1952 pour la réunion du Conseil des Ministres de l’OECE, cf. E 2210.2(-)1973/121/4.Sur l’OECE, cf. DDS, vol. 18, table méthodique: La Suisse et l’Organisation européenne de coopération économique.↩
- 3
- R. Schuman fait allusion au Traité de garantie mutuelle, dit Pacte rhénan, entre l’Allemagne, la Belgique, la France, la Grande-Bretagne et l’Italie, signé le 16 octobre 1925 à l’issue de la Conférence de Locarno (5–16 octobre 1925). Sur la Conférence de Locarno, cf. E 2001(C) -/1/65.↩
- 4
- Le traité instituant la Communauté européenne de défense (CED) est signé à Paris le 27 mai 1952 par la Belgique, la France, la RFA, l’Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas. En France, l’Assemblée nationale rejette le projet de loi de ratification le 30 août 1954. Sur cette question, cf. DDS, vol. 19, doc. 41; le rapport politique No 5 de P. A. von Salis à M. Petitpierre du 10 mars 1953, E 2300(-)-/9001/107 (dodis.ch/8454). Cf. aussi E 2001(E)1969/ 121/252.↩
- 5
- Sur la question de la Sarre, cf. E 2001(E)1969/121/250.Cf. également la lettre politique No 26 de P. A. von Salis à M. Petitpierre du 16 avril 1953, E 2300(-)-/9001/107 (dodis.ch/8967).↩
- 6
- Le Chancelier Adenauer a déclaré au parlement qu’un Etat allemand unifié ne sera pas nécessairement lié par l’ensemble des obligations contractées envers l’Occident, cf. le rapport politique No 24 de P. A. von Salis à M. Petitpierre du 29 avril 1952, E 2300(-)-/9001/350.↩
- 7
- Il est question ici de la réponse à la note de Staline du 11 mars 1952 sur le statut de l’Allemagne, cf. DDS, vol. 18, doc. 138, dodis.ch/7700, ainsi que le rapport politique No 14 de C. Gorgé à M. Petitpierre du 17 avril 1952, E 2300(-)-/9001/286 (dodis.ch/7719).↩
Tags
République fédérale d'Allemagne (Politique) Russie (Politique) États-Unis d'Amérique (USA) (Politique)