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Documents Diplomatiques Suisses, vol. 20, doc. 143
volume linkZürich/Locarno/Genève 2004
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Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
▼ ▶ Cote d'archives | CH-BAR#E2004B#1974/53#53* | |
Ancienne cote | CH-BAR E 2004(B)1974/53 11 | |
Titre du dossier | Australien (1945–1963) | |
Référence archives | a.161.1 • Composant complémentaire: Australien |
Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
▼ ▶ Cote d'archives | CH-BAR#E2001E#1970/217#1296* | |
Ancienne cote | CH-BAR E 2001(E)1970/217 86 | |
Titre du dossier | Australien (1946–1957) | |
Référence archives | B.22.20.1 • Composant complémentaire: Australien |
dodis.ch/11714 RELATIONS AVEC L’AUSTRALIE
Historique
Depuis un siècle, la Suisse entretient en Australie deux représentations consulaires, à Sydney et à Melbourne.
La Confédération australienne n’a ouvert un Consulat général à Genève qu’en 1951.
Par arrêté fédéral du 5 octobre 19453, le Conseil fédéral fut autorisé à créer une Légation dans ce pays. Dans le message sollicitant cette autorisation, nous relevions en substance que l’Australie était sortie du dernier conflit avec un prestige politique et militaire considérablement accru, qu’elle avait mis sur pied un vaste programme d’immigration et qu’elle allait connaître une évolution économique entraînant des besoins croissants. Nous estimions que la présence d’un représentant diplomatique de la Confédération s’imposait, pour suivre cette évolution sur place, développer nos relations avec cette île-continent et trouver des débouchés nouveaux à notre exportation.
L’ouverture de ce poste dut être toutefois différée, le Gouvernement australien, tout en se félicitant de notre initiative, ayant exprimé le désir que la question restât quelque temps en suspens à cause de l’impossibilité dans laquelle il se trouvait, faute de cadres suffisants et pour des raisons budgétaires, d’accréditer un Ministre à Berne4.
Par la suite, notre représentant diplomatique à Londres5 eut de fréquents pourparlers avec le Haut-Commissaire d’Australie6 en cette ville pour parvenir à un arrangement. Le 16 juin 19477, le Haut-Commissaire fit savoir à M. le Ministre Ruegger que son Gouvernement serait heureux d’accueillir une mission diplomatique suisse à condition
a) que le Gouvernement suisse n’insisterait pas pour obtenir la pleine réciprocité;
b) qu’il serait prêt à accepter un représentant diplomatique australien accrédité dans un autre pays;
c) qu’il comprendrait qu’aucune garantie ne pourrait être donnée quant aux locaux dont la Légation de Suisse aurait besoin à Canberra, les difficultés d’installation dans la capitale australienne, ville ne comptant que quelque 15’000 habitants (actuellement 30’000), étant particulièrement grandes.
Du point de vue suisse, l’absence d’une complète réciprocité ne représentait pas un obstacle et nous acceptâmes les conditions posées. A noter à ce propos que la doctrine anglo-saxonne est sur ce point beaucoup plus formaliste, ce qui explique la réticence dont les autorités australiennes avaient peine à se départir à l’égard de notre projet.
Contrairement à l’avis du Vorort de l’Union suisse du commerce et de l’industrie, une association du commerce d’importation (organisation de faîte) ayant son siège à Bâle émit l’opinion en 19488 qu’il était prématuré, sinon inutile d’établir une Légation en Australie, avant tout parce que Londres restait le lieu où étaient prises toutes les décisions importantes concernant les relations de ce pays avec l’étranger.
De passage à Berne en août 19489, M. Evatt, Ministre des Affaires étrangères, voyait dans la pénurie de logements régnant à Canberra un empêchement de nouer à l’époque des relations diplomatiques entre la Suisse et l’Australie et pensait que le programme de construction en cours permettrait sous peu de redresser la situation.
Après que la question eut sommeillé pendant cinq ans, un nouveau sondage à fin 1953 révéla que la situation n’avait guère changé.
Examinons comment se présente la situation douze ans après que l’autorisation de créer une Légation à Canberra a été accordée, quels sont les éléments qui, de nos jours, militent pour ou contre son ouverture.
A. Arguments pour:
1. Le trafic des marchandises entre la Suisse et l’Australie, qui repose sur l’accord de commerce du 30 décembre 193810, a évolué comme il suit (en millions de francs):
1938 1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 Importations 9,8 19,7 32,3 42,8 22,8 24,6 28,1 20,9 23,9 Exportations 17,3 37,8 35,0 75,0 39,7 72,5 102,0 104,9 87,0
De ce tableau, il ressort que l’exportation de nos produits vers l’Australie connaît depuis quelques années un essor réjouissant et que la balance est nettement en notre faveur. L’Australie nous fournit presque essentiellement de la laine brute, tandis que nous exportons principalement des produits textiles, des machines et appareils, des montres, des produits pharmaceutiques et chimiques. Si l’on note parfois un certain fléchissement de nos exportations, cela est dû à des restrictions d’importation, à-coups inévitables pour un pays dont la balance des paiements est constamment déficitaire.
L’Australie, dont l’économie nationale est caractérisée par la prédominance de l’agriculture et de l’élevage, est riche en ressources minières. Pays producteur de charbon et d’acier, son industrie va au-devant d’un essor certain au cours de ces prochaines décennies. C’est un marché qui présente un intérêt grandissant, où doivent se poursuivre nos efforts de pénétration économique.
2. La colonie suisse comptait, à la fin de 1956, environ 3500 personnes, doubles nationaux compris. Elle augmente constamment, en moyenne d’une centaine d’unités par an.
3. Le contingent de touristes que nous envoie l’Australie a triplé de 1949 à 1956. Ce mouvement ascendant peut être favorisé en donnant une nouvelle impulsion à la mise en œuvre de nos moyens publicitaires.
4. L’Australie avec sa population de race blanche est un pays neuf, un pays d’avenir. Sa structure politique (trois grands partis), sa législation sociale avancée lui assurent la stabilité et la mettent à l’abri de la subversion.
5. L’Australie, membre du Commonwealth britannique, joue un rôle en vue dans la politique internationale. Sa contribution industrielle, sa participation active sur les divers théâtres d’opérations militaires pendant le dernier conflit lui valent d’être considérée à juste titre comme un Etat puissant et influent. Ce pays est membre fondateur des Nations Unies, membre aussi des pactes de sécurité collective dans le Pacifique «ANZUS» et «SEATO». Il a pris, en outre, une part importante au plan de Colombo pour le développement économique du Sud et du Sud-est de l’Asie. Le rôle de premier plan tenu par l’Australie dans l’évolution économique et dans la défense de la sphère du Sud-est asiatique ne cesse de s’affirmer.
Relevons encore que la part dominante prise par les USA dans la guerre du Pacifique a accentué la tendance des Australiens à se rapprocher de Washington, dans une mesure si considérable que les liens traditionnels avec Londres sont presque égalés par ceux noués avec le nouveau monde. Aujourd’hui, l’Australie constitue un des points de conjonction les plus importants entre les deux principales Puissances anglo-saxonnes.
La revue des faits saillants de la politique extérieure de l’Australie montre que Canberra est devenu incontestablement un poste d’observation politique qu’on ne saurait négliger à la longue.
B. Arguments contre:
1. Le Gouvernement australien nous a fait savoir qu’aujourd’hui encore, il n’est pas en mesure d’user de réciprocité par manque de personnel formé et – ce qui constitue un retrait de la déclaration faite en 194711 – qu’il doit renoncer, parce qu’étant contraire à sa pratique, d’accréditer un Ministre déjà en poste dans un autre pays.
2. La difficulté, voire l’impossibilité de trouver à se loger dans la capitale australienne nous obligera apparemment à acheter un terrain et à construire un immeuble abritant la résidence du chef de poste et la chancellerie. Cette circonstance entraînera une mise de fonds importante, le coût de la construction en Australie paraissant être assez élevé d’après les renseignements disponibles.
En confrontant tous les éléments, positifs et négatifs, en appréciant l’importance que chacun d’eux revêt, nous inclinons à penser que les avantages l’emportent sur les inconvénients et que nous aurions intérêt à ouvrir une Légation à Canberra12. Au nombre des Etats qui entretiennent une mission diplomatique en Australie, huit, dont l’Autriche, la Belgique, le Danemark, la Finlande et la Suède, n’ont pas cru devoir considérer l’absence de réciprocité comme un obstacle.
- 1
- Cette notice a été rédigée par M. Grossenbacher et signée par W. Bossi.↩
- 2
- E 2004(B)1974/53/11. Paraphe: GO.↩
- 3
- Cf. l’Arrêté fédéral concernant la création de légations du 5 octobre 1945, RO, 1946, vol. 62, pp. 153–154, (dodis.ch/2041).↩
- 4
- Cf. la note du Foreign Office au Conseiller de Légation à Londres, A. Escher, du 14 novembre 1945, E 2200.40(-)-/62/1.↩
- 5
- P. Ruegger.↩
- 7
- Cf. la lettre du Haut-Commissaire d’Australie, J. A. Beasley, au Ministre de Suisse à Londres, P. Ruegger, du 16 juin 1947, non reproduite.↩
- 8
- Cf. la lettre de la Vereinigung des Schweizerischen Import- und Grosshandels à M. Petitpierre, du 9 janvier 1948, non reproduite.↩
- 9
- L’entretien entre le Ministre des Affaires étrangères d’Australie, H. V. Evatt, et M. Petitpierre a eu lieu le 11 août 1948, cf. la notice de P. Micheli au Service des Affaires administratives du 12 août 1948, non reproduite.↩
- 10
- Cf. l’Accord commercial entre la Suisse et la Confédération australienne, RO, 1939, vol. 55, pp. 236–248.↩
- 11
- Cf. note 6.↩
- 12
- Le Conseil fédéral a informé les autorités australiennes le 24 mars 1961 de son désir d’établir des relations diplomatiques avec l’Australie et a nommé F. Gygax Ambassadeur en Australie. Le Gouvernement australien a donné son agrément à la nomination de M. Gygax et a réitéré ses regrets d’être dans l’impossibilité d’ouvrir une mission diplomatique en Suisse, cf. PVCF No 906 du 19 mai 1961, E 1004.1(-)-/1/649.↩