Classement thématique série 1848–1945:
10. PRESSE ET CINÉMA
Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 14, Dok. 1
volume linkBern 1997
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E2001D#1000/1553#6465* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 2001(D)1000/1553 328 | |
Dossiertitel | Kontrolle u. Massnahmen gegen die Presse u. andere Veröffentlichungen zum Schaden der schweiz. Neutralität im Krieg. Deutschland (1940–1945) | |
Aktenzeichen Archiv | B.51.13.70 • Zusatzkomponente: Deutschland |
dodis.ch/47187
La «question» de M. H. Oprecht3 n’est peut-être pas aussi innocente qu’il ne pourrait le paraître à première vue. On peut, en effet, se demander si M. Oprecht ne sert pas, consciemment ou inconsciemment, d’outil à la presse de gauche qui s’est livrée tout récemment à une levée de boucliers contre les correspondants de journaux suisses à Berlin. Si ces craintes devaient être fondées, quel usage sera-t-il fait de la réponse à la «question Oprecht»?
1. Correspondants suisses à Berlin, Le règne des Caratsch, Meyer etc. comme représentants des journaux suisses en Allemagne a eu, sur nos relations avec le Reich, les effets désastreux que nous connaissons4. Les rédactions ont fini par se rendre compte de la situation et, cédant à toutes sortes de pressions exercées sur elles, elles ont désigné de nouveaux correspondants qui s’acquittent de leur tâche avec tact et consciencieusement. La nouvelle équipe est bien vue des autorités allemandes qui, il y a quelques semaines, lui ont offert un dîner officiel. Ces faits sont connus de la presse socialiste suisse qui a saisi le prétexte d’une visite de certains correspondants de journaux suisses à Berlin aux camps de prisonniers anglais et français (la «BerlinerIllustrierte Zeitung» a publié de nombreuses photographies à ce sujet) pour se livrer à une campagne désagréable contre ces journalistes. Il est à noter (ce détail a son importance ainsi que nous le verrons plus bas) que la presse socialiste suisse a fait une place spéciale dans cette attaque à M. Heer, tandis que pour des raisons que l’on s’explique difficilement, elle a ignoré M. Schwarz de la «NeueZürcher Zeitung».
2. Attachés de presse. Le seul poste de ce genre qui ait été créé est celui de Londres5. L’expérience n’est pas encourageante. A Rome, nous avons un «agent de presse» en la personne de M. Hodel de la «NeueZürcher Zeitung» qui nous rend des services très appréciables6. Son activité consiste à rédiger des rapports de presse, des rapports sur ce qui se dit dans les milieux des journalistes et dans les conférences de presse; l’agent officieux a réussi à placer, jusqu’à l’entrée en guerre de l’Italie, dans la presse de la Péninsule, toute une série d’articles tirés de notre «Bulletin pour l’information de la presse étrangère»7 qui ont été de la plus grande utilité.
Interrogé sur la question de savoir s’il estimait que la création d’un poste d’attaché de presse à Berlinserait indiquée, M. le Ministre Frölicher répondit négativement8. A la fin de l’année dernière cependant, il nous exposa que celui de ses collaborateurs chargé des questions de presse n’étant pas admis aux conférences de presse organisées par les Ministères, il y aurait avantage à ce qu’un journaliste suisse soit chargé d’informer la Légation de ce qui se dit à ces conférences. M. Frölicher proposa de désigner M. Heer, à titre d’essai, et nous avons obtenu du Département des finances le crédit nécessaire pour verser à M. Heer une indemnité mensuelle de 200 fr.9. Revenant à l’attaque de la presse socialiste, nous nous demandons si celle-ci n’est pas au courant de ce fait également et si elle ne vise pas à faire remplacer M. Heer par une autre personne, probablement un journaliste, auquel il serait donné le titre d’attaché de presse et qui devrait influencer à sa manière, les correspondants suisses en Allemagne.
3. Situation à la Légation de Suisse à Berlin. Les questions de presse sont traitées par le conseiller de la Légation. Le soussigné, à l’occasion d’un récent entretien qu’il a eu avec M. Frölicher, a exposé à ce dernier les raisons pour lesquelles, à son avis, M. Kappeler n’était peut-être pas la personne la mieux qualifiée pour s’occuper de ce genre de questions (Kappeler a déjà beaucoup à faire en sa qualité de conseiller et son temps est limité, il n’est peut-être pas assez souple et pas suffisamment mondain. M. Soldati ferait certainement mieux.) Le Ministre Frölicher partage en partie la manière de voir du soussigné, mais tient, ce que nous comprenons - à ménager les susceptibilités de son principal collaborateur. Il avait promis d’examiner cette question à son retour à Berlin.
En ce qui concerne les démarches entreprises à Berlin touchant la presse, il y a lieu de relever ce qui suit: L’attitude d’une grande partie de nos journaux jusqu’au mois de juin 1940, était certainement de nature à contrecarrer tous les efforts de M. Frölicher en vue de mettre un terme à la «guerre de presse». Notre Légation était placée devant une tâche ardue; se serait-elle laissée décourager? Il fut un temps, en tout cas, où elle n’entreprenait pas volontiers des démarches de ce genre et répondait aux instructions que nous lui transmettions à cet effet, en attirant notre attention sur l’impossibilité dans laquelle elle se trouvait d’intervenir en raison de l’attitude répréhensible de nos journaux. A la suite de l’amélioration qui s’est manifestée au cours des derniers six mois, la Légation s’est montrée moins timide. Il ne faut pas oublier, d’autre part, qu’il existe à Berlin diverses instances compétentes en matière de presse: le Ministère des Affaires étrangères, le Chef de presse du Ministre, le Service de presse du Ministère et les diverses sections du Ministère de la Propagande qui aime à «faire cavalier seul». La Légation est surtout en rapport avec les bureaux du Ministère des Affaires étrangères. M. Frölicher a saisi diverses occasions pour parler de la presse à M. le Ministre von Weizsäcker. Il a entrepris ces derniers temps plusieurs démarches auprès du Chef de presse. M. le Ministre Köcher, au cours de son récent passage à Berlin, s’est occupé de cette affaire également. Nous avons l’impression que tous ces efforts conjugués, ajoutés à nos propres efforts auprès de l’attaché de presse allemand à Berne, ont eu un certain résultat. Les attaques de la presse allemande contre la Suisse ont, depuis une dizaine de jours, diminué d’intensité.
Les dernières campagnes ont été provoquées par deux articles de M. Oeri dans les «Basler Nachrichten». Dans le premier, paru il y a un mois ou deux, il prenait la défense des juifs à l’occasion de la promulgation par le Gouvernement de Vichy de la nouvelle législation antisémite10. Dans le second, il critiquait assez vertement le discours de Hitler aux ouvriers11: M. Oeri accusait Hitler de ne pas connaître l’évolution de la situation des ouvriers en Grande-Bretagne et soulevait le problème des responsabilités de la guerre. «Churchill», écrivait-il plus ou moins, «a toujours déclaré qu’il ne voulait pas la guerre. La responsabilité pour le présent conflit doit être cherchée dans le national-socialisme.» Des campagnes de presse sont souvent déclenchées en Allemagne au sujet d’un mot paraissant dans un journal suisse: Par exemple, l’Allemagne n’admet pas qu’on parle de «terrorisation» des populations civiles.
4. Le prochain Bulletin confidentiel de la Commission Consultative de presse, dont le service est fait à toutes nos principales rédactions, contiendra des indications utiles sur cette matière12.
5. Eu égard à ce qui précède, nous nous demandons s’il ne serait pas indiqué de faire en sorte que M. Oprecht retire sa «question».
6. Le cas échéant, on pourrait répondre à peu près ce qui suit (en tenant compte du fait que la presse socialiste pourrait éventuellement en faire usage à sa façon:
«La Légation de Suisse à Berlin, les Consulats généraux et Consulats de Suisse en Allemagne suivent très attentivement la presse allemande et présentent régulièrement des rapports à ce sujet à la Division des Affaires étrangères. La Légation intervient auprès du Gouvernement allemand chaque fois que les circonstances l’imposent. Elle le fait, si nécessaire et dans les cas urgents, de sa propre initiative et complète sa démarche sur la base des instructions qu’elle reçoit du Département politique. Le résultat des efforts de la Légation ne passe pas inaperçu et les périodes de calme qui se manifestent de temps en temps dans les attaques de la presse allemande contre la Suisse en fournissent la preuve. Depuis une dizaine de jours, par exemple, ces campagnes de presse ont diminué considérablement d’intensité. Elles sont souvent provoquées par des articles, peut-être imprudents, paraissant dans nos propres journaux. Ce fut le cas tout particulièrement dans les deux dernières polémiques de la presse allemande à l’égard de la Suisse. Les questions de presse sont traitées à la Légation par le premier collaborateur du chef de poste. Ce dernier estime pouvoir se dispenser des services d’un attaché de presse spécialisé.»
- 1
- Cette notice est rédigée par C. Rezzonico, Chef du Service de la presse et de la propagande du DPF, puis lue par P.A. Feldscher, Chef-suppléant de la DAE du DPF.↩
- 2
- (Copie): E 2001 (D) 3/328.↩
- 3
- Datée du 10 janvier 1941, la «question» du Conseiller national H. Oprecht est ainsi formulée: Die deutsche Presse hat in der letzten Zeit wiederum heftige Angriffe auf die Schweiz gerichtet. Ist die schweizerische Gesandschaft in Berlin deswegen vorstellig geworden? Wäre es nicht richtig, einen Presseattaché bei der Gesandschaft in Berlin zu ernennen? Le procès-verbal de la séance des 20 et 21 janvier de la Commission des pleins-pouvoirs du Conseil national n’indique pas de réponse du Chef du DPF. (E 7800/1/158).↩
- 4
- Cf. DDS, vol. 13, doc. 327, dodis.ch/47084, doc. 329, dodis.ch/47086, doc. 338, dodis.ch/47095. Cf. aussi le rapport de Frölicher du 17 juillet 1941 sur l’activité de la Légation de Suisse à Berlin en 1940, en particulier p. 8, E 2400Berlin/10.↩
- 5
- Sur la nomination d’E. Kessler, cf. DDS, vol. 13, doc. 180, dodis.ch/46937, n. 10.↩
- 6
- Cf. notamment E 2001 (D) 3/16 et E 2200 Rom 24/9 -10.↩
- 7
- Dès octobre 1939, le DPFédite un Bulletin de propagande politique qui est intitulé dès 1940 Bulletin pour l’information de la presse étrangère. Cf. E 2001 (D) 2/30 et E 4450/6106.↩
- 8
- Cf. la lettre de Frölicher du 29 juin 1939, E 2001 (D) 3/26.↩
- 9
- Cf. la lettre du Directeur de l’Administration fédérale des Finances, J. Oetiker, à la DAE (à la suite d’une lettre de F. Kappeler du 11 octobre 1940 et de H. Frölicher du 21 novembre 1940, E 2001 (D) 3/26).↩
- 10
- L’article en question ayant été publié dans le numéro 292 du 24 octobre 1940 des Basler Nachrichten, Frölicher écrit le 26 octobre à la DAE du DPF: In einer Zeit, wo die Schweizerische Regierung und alle guten Schweizer ihre Hauptaufmerksamkeit darauf richten sollten, alles zu tun, um die Unabhängigkeit unseres Landes durch eine kritische Periode zu retten, scheint es mir höchst unangebracht, dass der Leiter eines der angesehensten Blätter sich zum Anwalt der Juden gegenüber dem deutschen Antisemitismus macht und dadurch bei der massgebenden Kreisen in Deutschland Verärgerung hervorruft. (E 4450/113). La DAE transmet cette lettre à la DPR, le 29 octobre 1940, en précisant: L’exposé de M. Oeri n’avait pas échappé à notre attention et n’avait pas manqué de nous frapper. On peut se demander si le moment est bien choisi pour prendre d’une façon aussi ouverte parti pour les Israélites persécutés. (E 4450/113).Oeri répond par une lettre du 4 novembre 1940: [...] Sachlich habe ich zum Inhalt der beiden Schreiben zu bemerken, dass ich meinen Artikel vom 24. Oktober nicht geschrieben habe obschon, sondern weil ich wie alle guten Schweizer meine Hauptaufmerksamkeit darauf richte, die Unabhängigkeit unseres Landes durch eine kritische Periode hindurchzuretten. Zur Wahrung unserer Unabhängigkeit gehört es meines Erachtens, dass unser Volk von der Nachahmung der antisemitischen Exzesse unserer Nachbarländer abgehalten wird. Angesichts der bei uns schon sehr regen antisemitischen Hetzerei nach ausländischem Vorbild scheint mir das direkt nötig. Selbstverständlich muss es in anständigen Formen geschehen. Diese glaube ich durchaus gewahrt zu haben. Auch weiss ich, dass man nicht permanent über solche Dinge schreiben, sondern unnötige Verstimmungen vermeiden soll. Aber die Einführung der antisemitischen Gesetzgebung in Frankreich war meines Erachtens ein wichtiger Anlass, der nicht mit Schweigen übergangen werden durfte. Der Moment war also nicht «mal choisi». Schliesslich dürfen die innerschweizerischen Ansprüche an die eigene Presse doch nicht ganz vor den Befürchtungen einer «Verärgerung» im Ausland zurücktreten. Die «Basler Nachrichten» bestreben sich unter den gegenwärtigen Zeitumständen mehr denn je, ihren Lesern ein objektives Bild von den Leistungen ausländischer Staaten zu geben, gleichviel welches Regierungssystem dort herrscht.[...] Mit diesem Bestreben folgen sie übrigens wiederholten Winken aus dem Bundeshaus. Aber das Korrelat der Information über solche Dinge, die das Ausland gerne besprochen sieht, ist, dass unserm Publikum dann auch das unterbreitet wird, was man draussen lieber ignoriert sehen würde. Sonst entsteht eine ganz einseitige Beeinflussung der schweizerischen Leserschaft. Einer solchen wäre vielleicht gänzliches Beschweigen sowohl des Genehmen wie des Ungenehmen als das kleinere Übel noch vorzuziehen. Wir dürfen nicht gar zu «gleichgeschaltet» ausse- hen. Stellen wir uns überhaupt stumm, so bedeutet dies freilich eine traurige Kapitulation vor der unser Land überflutenden ausländischen Propaganda. Dieser würde dann gar kein Damm in Gestalt der Schweizerpresse mehr gegenüber stehen. (E 4450/113).↩
- 11
- Cf. la lettre du 20 décembre 1940 de Frölicher à la DAE: In Nr. 601 vom 20. dieses Monats polemisiert die « Berliner Börsen-Zeitung» in dem beigefügten Artikel «Ihr Ausgangspunkt» gegen einen Leitartikel des Chefredaktors der «Basler Nachrichten», der sich mit der Rede Hitlers vor den Berliner Rüstungsarbeitern befasst. Auch ich habe an dem Artikel von Herrn Dr. Oeri Anstoss genommen. Ohne Rücksicht auf die Interessen unseres Landes wird immer wieder Kritik geübt und das Negative hervorgesucht, statt dass man sich bemüht, in einem solchen Fall auch das Positive und Verbindende in den Kreis der Betrachtungen zu ziehen, das in diesem Fall in den sozialen Bemühungen Hitlers liegt. (E 2001 (D) 2/129).↩
- 12
- Rezzonico a ajouté à la main à la fin de ce paragraphe: (activité de la Légation). Cf. dans la collection des Bulletins confidentiels de la Commission mixte presse-politique de l’Association de la Presse suisse et de la Société suisse des Editeurs de Journaux, notamment le No 19, daté du 16 janvier 1941. Parmi les questions politiques relatives à la presse, sont abordées les activités des diplomates suisses ainsi que la décision du Conseil fédéral de créer un Bureau de liaison pour les questions de presse.↩
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