Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 24, doc. 55
volume linkZürich/Locarno/Genève 2012
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E7113-02#1988/128#98* | |
Old classification | CH-BAR E 7113-02(-)1988/128 16 | |
Dossier title | Besuch Jolles bei der EWG in Brüssel (1967–1967) | |
File reference archive | 61 |
Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2200.161#1982/60#276* | |
Old classification | CH-BAR E 2200.161(-)1982/60 23 | |
Dossier title | EWG, Erweiterung EWG, Beitritt der Schweiz (1965–1968) | |
File reference archive | 531.12.18 |
dodis.ch/33252 Visite de M. le Directeur Jolles à Bruxelles2 (8–10 novembre 1967)
I. Impressions générales
1. Les entretiens se sont déroulés dans un excellent climat et dans un esprit constructif. La manière dont les entretiens ont été organisés, les deux déjeuners offerts respectivement par le Président de la Commission3 et par M. Martino, chargé des relations extérieures, ont montré que la Commission s’est donnée une peine particulière pour recevoir M. Jolles et pour lui permettre de faire un tour d’horizon très complet des problèmes qui nous intéressent. En outre, M. Jolles a pu s’entretenir avec le Secrétaire général des Conseils (M. Calmes) ainsi qu’avec les six Représentants permanents.
2. L’objectif de la visite n’était pas d’ouvrir, ni même de préparer sous une forme quelconque des négociations avec la Communauté4. Il s’agissait d’une visite de courtoisie, de bon voisinage. Les rapports établis pendant les négociations Kennedy entre la Suisse et la Commission constituaient une excellente base à cet égard. D’autre part, M. Jolles occupe sa nouvelle position5 depuis un peu plus d’un an, tandis qu’une nouvelle Commission unique, dirigée par un nouveau Président6, siège à Bruxelles depuis l’été 1967. Un contact direct était non seulement souhaitable, mais nécessaire, cela d’autant plus que du côté suisse une grande discrétion avait été marquée quant aux contacts directs avec la Commission sauf ceux, très bénéfiques, qui eurent lieu à l’occasion du Kennedy Round. Par la façon dont M. Jolles a été accueilli et la manière ouverte et compréhensive dont les membres de la Commission ont exprimé leurs vues quant à notre position et nos préoccupations, on a manifestement voulu souligner ici qu’on était sensible au geste7 des Autorités fédérales à l’égard de la Communauté.
3. Lors de tous les entretiens, M. Jolles a pu s’entendre confirmer que la position suisse était connue, et que notre attitude était considérée comme sage et raisonnable. Il n’a eu nul besoin de l’expliquer, ni quant au principe, ni quant à la procédure. En ce qui concerne la solution à long terme, il est frappant de constater combien souvent nos interlocuteurs ont employé le mot «flexibilité»... Sans attacher du tout à ce propos une importance décisive quant à la participation de la Suisse à un éventuel marché commun européen, il vaut la peine de noter tout de même que cette approche du problème contraste avec certaines doctrines émises à une époque plus dogmatique et qui ont encore cours d’ailleurs à certains niveaux moins élevés de la hiérarchie communautaire ainsi que dans certains milieux des Européens fédéralistes en général.
4. Il est évident, à la suite de ces entretiens, que la préoccupation majeure aussi bien du côté de la Commission que du côté des R[eprésentants]P[ermanents est le problème de la candidature britannique8. Je crois que l’on peut également inférer de nos conversations que tous – à l’exception des interlocuteurs français – veulent l’ouverture de négociations avec le Royaume-Uni débouchant sur une adhésion à la Communauté. Il y a naturellement des nuances plus ou moins prononcées dans l’expression des opinions. On constate aussi une acceptation du fait que la candidature britannique soulève des problèmes réels. Tous, sans exception, sont désireux d’éviter une crise sérieuse dans la Communauté à ce sujet. Aucun pronostic n’a été fait quant à l’avenir, mais le sentiment semble bien être qu’après une certaine période d’examen à Six, il faudra en arriver à une décision sur l’ouverture des négociations avec le Royaume-Uni ou non. Certains interlocuteurs, même très favorables à l’adhésion britannique, ne paraissaient pas écarter, à titre personnel, certaines solutions transitoires de compromis.
5. L’avis général était qu’en tout état de cause, la solution d’ensemble du problème européen prendrait du temps, beaucoup de temps. M. Jolles a relevé à cet égard qu’en attendant, des problèmes subsistaient ou se présenteraient entre la Suisse et la Communauté.
a) Malgré la réussite du Kennedy Round, il restait des problèmes non réglés dans le domaine agricole, comme dans le domaine industriel (textiles)9.
b) L’entrée en vigueur de la politique agricole commune10 et de l’union douanière, en 1968, créerait de nouveaux problèmes. Ainsi, toute la question des restitutions en agriculture.
Par ailleurs, les questions très «quotidiennes» que nous traitons régulière ment avec nos voisins dans le cadre de commissions mixtes bilatérales11 devien dront, en partie tout au moins, des affaires communautaires. Il était impossible d’imaginer qu’une période de carence s’instaure alors dans nos relations avec nos voisins et M. Jolles en a donné les raisons par plusieurs exemples pratiques. La solution appartient à la fois à la Communauté en tant que telle et aux Etats membres. La Suisse serait prête à étudier les suggestions qui pourraient nous être faites et qui ne devraient pas tarder, vu les délais qui se rapprochent.
c) Il existe de nombreux domaines – non tarifaires – où la Suisse est non seulement intéressée, mais prête à apporter une contribution. Mention a été faite notamment des assurances, des brevets, des transports, de la politique industrielle, de la recherche, du droit des sociétés, etc. Un ou deux Commissaires ont manifesté leur intérêt à prendre directement contact avec les milieux officiels et privés en Suisse. M. Jolles les y a encouragés.
Nos interlocuteurs ont pris note des observations de M. Jolles et de nos préoccupations. Aucune promesse n’a été faite du côté de la Communauté. Elle n’était d’ailleurs pas demandée. Mais cette prise de conscience était utile: les problèmes sont sur la table. Il sera, de ce fait, plus facile, en temps opportun, soit de les soumettre à la Commission, soit de poursuivre les démarches déjà entreprises.
6. Avec certains interlocuteurs, des échanges de vues ont eu lieu sur des problèmes d’intérêt mutuel. M. Jolles a pu, par exemple, échanger des idées avec ses interlocuteurs sur le problème des pays sous-développés. Par ailleurs, nous avons pu constater une concordance de vues sur les dangers de la vague protectionniste aux USA et sur la nécessité d’une solidarité européenne à cet égard.
7. Plusieurs interlocuteurs ont rendu attentif au fait qu’il n’était pas possible d’établir une comparaison entre la situation de négociation de la Commission – et partant de la Communauté dans le Kennedy Round – et la situation en dehors du Kennedy Round. En d’autres termes, il ne fallait pas se faire d’illusions sur la possibilité de conduire des négociations en matière de politique tarifaire et commerciale dans le prolongement et sur la lancée, si je puis dire, du K[ennedy]R[ound]. Pour les négociations de Genève, il y avait un accord politique au sein du Conseil et un mandat donné à la Commission, mais ces décisions ne portaient que sur ces seules négociations.
8. Il est frappant de constater que plusieurs interlocuteurs – dont le Président Rey – ont marqué leur intérêt dans le développement de l’AELE12 et le fait qu’il s’agissait d’une construction valable et utile. Quelques-uns d’entre eux ont même laissé entendre qu’ils estimaient nécessaire que les résultats de l’AELE ne soient pas mis en cause à l’avenir, lors de l’élargissement éventuel du Marché commun.
9. En résumé, je considère le bilan de la visite comme très positif. Sur le plan pratique, la Communauté a pu entendre directement de la bouche du plus haut fonctionnaire suisse responsable, l’inventaire de nos préoccupations et de nos problèmes dans nos relations avec la Communauté. Mais c’est avant tout sur le plan psychologique et des «human relations» que j’estime cette visite un succès. La manière dont M. Jolles a présenté les divers aspects de ces problèmes, manière à la fois ferme et précise dans le fond, mais souple dans la forme, a été appréciée par nos interlocuteurs. Je l’ai senti très nettement lors des entretiens et les quelques premiers échos que j’ai de sa visite me le confirment.
[...] 13
- 1
- Notice: E7113-02#1988/128#98* (61).↩
- 2
- Cf. aussi le Bericht über den Besuch bei der Kommission der Europäischen Gemeinschaften in Brüssel 8.–10. November 1967 de P. R. Jolles, dodis.ch/33838 et la lettre de P. H. Wurth du 16 novembre 1967, dodis.ch/33839.↩
- 4
- Sur les diverses options de la Suisse, cf. DDS, vol. 24, doc. 145, dodis.ch/33236.↩
- 5
- Comme Directeur de la Division du commerce du Département de l’économie publique.↩
- 7
- Cf. DDS, vol. 24, doc. 33, dodis.ch/33238.↩
- 8
- Cf. DDS, vol. 24, doc. 33, dodis.ch/33238, note 3.↩
- 9
- Sur le Kennedy-Round, cf. DDS, vol. 24, doc. 15, dodis.ch/33250 et sur les problèmes en suspens, cf. DDS, vol. 24, doc. 93, dodis.ch/33021.↩
- 10
- Cf. DDS, vol. 24, doc. 27, dodis.ch/33941.↩
- 11
- Cf. le PVCF No 601 du 7 avril 1967, dodis.ch/33486 et la lettre de W. Sigg à P. R. Jolles du 28 novembre 1969, dodis.ch/33489.↩
- 12
- Cf. DDS, vol. 24, doc. 117, dodis.ch/33014.↩
- 13
- Pour la Liste des entretiens avec des impressions sommaires du soussigné, cf. dodis.ch/33252.↩