Mitteilung an die diplomatischen und konsularischen Vertreter betreffend den Überfall und die Besetzung der Gesandtschaft Rumäniens in Bern (15.-16.2.1955).
Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 19, Dok. 146
volume linkZürich/Locarno/Genève 2003
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E2200.15-01#1969/182#139* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 2200.15-01(-)1969/182 6 | |
Dossiertitel | Affaire du 15.2.1955 (1955–1962) | |
Aktenzeichen Archiv | E.41.3 |
Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E2001E#1970/217#646* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 2001(E)1970/217 42 | |
Dossiertitel | Berichte von Pierre Cordey (1954–1956) | |
Aktenzeichen Archiv | A.22.14.3.6 |
dodis.ch/9545 APRÈS LE COUP-DE-MAIN SUR LA LÉGATION DE ROUMANIE À BERNE3
Le «drame de la Légation de Roumanie» a suscité tant d’émotion, de rumeurs et de fausses nouvelles aussi, qu’il paraît indiqué de faire le point à son sujet, et de le faire sans passion.
Essayons tout d’abord de rétablir les faits, en n’avançant que ceux dont on peut, aujourd’hui, être certain.
Le mardi 15 février, peu après deux heures du matin, les habitants du quartier de Villette, à Berne, furent réveillés par une fusillade. Elle s’était déroulée dans le parc où se trouve la Légation de Roumanie. Les premiers détachements de police, aussitôt alertés par les appels des voisins, s’arrêtèrent aux grilles de ce parc: le respect des privilèges diplomatiques leur interdisait en effet strictement de pénétrer sur la propriété qu’occupe la mission roumaine. L’ordre intimé par un inconnu de ne pas approcher du bâtiment de la résidence, l’arrestation d’un individu lourdement armé, qui tentait de s’enfuir, puis, plus tard, les déclarations du Chargé d’Affaires de Roumanie4 permirent d’établir qu’un coup-de-main avait été tenté, et réussi, sur les locaux de la mission diplomatique. Les agresseurs, se donnant pour des «résistants roumains», devaient avoir pénétré sans coup férir la veille déjà, vers 22 heures, dans le bâtiment de la chancellerie, qu’ils avaient fouillé. Ils l’avaient abandonné pour s’emparer ensuite de la résidence, maintenant prisonniers certains collaborateurs de la mission et leurs familles. Le Chargé d’Affaires, en revanche, avait pu rapidement s’échapper.
A l’approche de l’aube, les forces de police ayant reçu de ce diplomate l’autorisation de pénétrer dans le parc et appris au surplus qu’un blessé devait s’y trouver, établirent un cordon à quelque 15 mètres du bâtiment tenu par les agresseurs et fouillèrent la propriété. On trouva gisant le chauffeur5 de la Légation, grièvement blessé de plusieurs coups de feu. Le malheureux, aussitôt transporté à l’hôpital, devait y décéder quelques heures plus tard. Entre-temps, les inconnus – qui avaient fait savoir qu’ils se défendraient dans la résidence jusqu’à la mort – relâchèrent successivement les personnes par eux détenues. Ce n’est qu’au début de la matinée qu’on eut enfin la certitude qu’ils ne gardaient plus d’otage.
On supposait que quatre hommes, bien armés, occupaient le bâtiment, situé dans un quartier animé, à proximité de routes de grande communication, de voies de chemin de fer, d’un asile et de nombreuses maisons d’habitation. Une attaque en force, dans ces conditions difficiles, rendait indispensables certaines précautions, telles que l’évacuation de tout le quartier. L’assaut du bâtiment transformé en forteresse n’aurait pu, d’autre part, se faire sans risquer la vie des policiers; il aurait probablement entraîné la perte dudit bâtiment, sans permettre de prendre vivants ceux qui s’y étaient retranchés. Aussi, tout en préparant cet assaut avec le concours de spécialistes de l’armée, la police bernoise entra-t-elle en contact avec les assiégés, afin d’obtenir leur reddition, qu’elle estimait probable.
L’événement finit par confirmer cette vue des choses. Le mercredi 16 février, peu après 16 heures, soit après un blocus de 38 heures environ, les occupants, qui n’étaient en réalité que trois, se rendirent à merci. Tôt après, le bâtiment était restitué au Chargé d’Affaires.
Quatre des agresseurs sont de la sorte détenus. Au moment où nous rédigeons ces lignes, le ou les complices prétendus de la bande, qui seraient parvenus à s’enfuir avant l’arrivée des premiers policiers sur les lieux, n’ont pu être rejoints. L’enquête, confiée d’abord à la police municipale bernoise, a passé à la police fédérale. Les seules indications données jusqu’ici quant à ses résultats portent sur la nationalité des auteurs du coup-de-main, des Roumains, venus selon toute apparence de l’étranger.
Appréciant d’emblée la gravité de l’incident, le Conseil fédéral s’était réuni en séance extraordinaire le matin même de l’agression, à 7 heures 30, et avait conféré avec les autorités de police bernoises. Il devait tenir par la suite deux nouvelles séances semblables6. C’est dire qu’il intervint avec la plus grande célérité et suivit les événements de très près. Il fut saisi un peu plus tard d’une note du Gouvernement roumain7, extrêmement vive de ton, contenant de manifestes erreurs de fait et avançant des accusations aussi hâtives qu’injustifiées au sujet du retard qu’auraient mis les autorités suisses à secourir le chauffeur blessé et à agir contre les «bandits fascistes». Dans l’après-midi du mardi, le chef du Département politique eut un long entretien avec M. Stoffel, Chargé d’Affaires de Roumanie, qui s’exprima dans le sens de la note du Gouvernement roumain8. Le chef du Département politique, à cette occasion, s’éleva énergiquement contre les allégations contraires à la réalité et contre les reproches injustifiés formulés par le Gouvernement roumain à l’égard des autorités suisses.
Le même soir, une note du Conseil fédéral9, contenant sa réponse à l’intervention du Gouvernement roumain, était remise à Bucarest: elle affirmait que toutes les mesures requises avaient été prises. Voici au surplus quelques passages de cette note suisse du 15 février: «Le Conseil fédéral a appris avec regret l’agression dont la Légation de la République populaire de Roumanie a été l’objet cette nuit de la part d’inconnus qui paraissent être de nationalité roumaine. Il déplore la mort du chauffeur de la Légation. Toutes les mesures ont été et, s’il y a lieu, seront encore prises en vue de l’arrestation des agresseurs et de la restitution de l’immeuble au Chargé d’Affaires de Roumanie.» Un peu plus loin, le Conseil fédéral ajoutait: «Le Gouvernement roumain paraît mal informé. Les autorités de police ont en effet agi avec un maximum de rapidité et des soins ont été apportés au chauffeur aussitôt qu’il fut possible de pénétrer dans l’enceinte de la Légation sans risquer d’autres vies. Le personnel de la Légation, les femmes et les enfants, retenus pendant plusieurs heures par les agresseurs, ont été libérés. Il appartient aux autorités suisses de police seules de décider les méthodes à employer pour amener l’arrestation des coupables.»
Le mercredi, une nouvelle note roumaine10, tout aussi vive, comportant les mêmes erreurs et les mêmes accusations, fut adressée à Berne. Comme la première, elle demandait l’extradition des agresseurs. Le Conseil fédéral répondit à cette seconde note le 18 février11. Il repoussait avec la plus grande fermeté les accusations de Bucarest et refusait l’extradition12, constatant qu’il n’existait aucun traité d’extradition entre la Roumanie et la Confédération et qu’au surplus la loi suisse s’opposait expressément à la livraison à l’étranger des auteurs d’un délit commis sur le territoire suisse13. «Le Conseil fédéral», ajoutait la note, «ne pourra donc donner suite à la demande du Gouvernement roumain. En effet, l’immeuble occupé par la Légation de Roumanie à Berne fait partie du territoire suisse. Les immunités et privilèges diplomatiques commandent seulement le respect de l’inviolabilité de la Légation, ce qui signifie que des agents ne peuvent y pénétrer sans l’autorisation expresse du chef de la mission. En revanche, le Gouvernement suisse donne au Gouvernement roumain l’assurance qu’il remplira comme il l’a fait jusqu’à présent les obligations qui lui incombent selon les dispositions du droit suisse et les règles du droit des gens et, en particulier, que les agresseurs seront poursuivis.» La note suisse se terminait comme suit: «Le Conseil fédéral exprime le vœu que, dans cette affaire pénible pour chacun des deux pays, le Gouvernement roumain fasse dorénavant preuve de plus d’objectivité et renonce à recourir à des procédés qui ne pourraient que rendre plus difficile le règlement de cette affaire.»
Cette seconde réponse suisse n’avait pas quitté Berne qu’une troisième note roumaine14 y parvenait. Elle portait sur des points de détail. Elle fut suivie le 28 février d’une quatrième15, avançant de nouveaux griefs, tout aussi peu fondés que les précédents, reprenant la demande d’extradition et avançant une série de requêtes difficilement conciliables avec cette demande, ce qui pourrait donner à penser qu’en fait le Gouvernement roumain y a renoncé.
L’enquête, secrète, se révèle difficile. Les détenus, qui avaient monté leur coup avec le plus grand soin, usant du bluff avec raffinement, ne se soucient pas de la faciliter. Un épais mystère plane encore sur l’affaire. Le prétexte avancé d’emblée par les auteurs du coup-de-main, obtenir la libération à Bucarest de détenus politiques16, apparaît peu vraisemblable. Leur mobile réel n’est pas connu. Tout au plus, la fouille qu’ils firent de la chancellerie, puis de la résidence, comme les papiers volés saisis sur le fuyard et aussitôt restitués au Chargé d’Affaires, permettent-ils de supposer qu’ils cherchaient à mettre la main sur des documents ou bien à en détruire. Le nombre véritable des participants à cette entreprise désespérée n’est pas connu non plus.
L’affaire de Berne avait fait grand bruit. Des journalistes accoururent de partout dans la ville fédérale. Le mystère qui couvrait cette dramatique aventure, son caractère sensationnel, son aspect politique devaient donner lieu à une prodigieuse multiplication de bobards. Le malheur a voulu que certains de ces bobards trouvent place dans la presse suisse. Bien plus, de Zurich une agence de presse17 improvisée se chargea, dès les premiers jours, de répandre de fausses nouvelles qui trouvèrent malheureusement accueil dans un certain nombre de journaux suisses, dont quelques-uns importants et considérés. La police a réussi, très rapidement, à mettre un terme à l’activité de cette officine de fausses nouvelles. Il s’agissait d’une agence de publicité étrangère, dirigée par un citoyen suisse18, qui se mêla soudain de répandre des informations. Celles touchant l’affaire de Berne lui étaient fournies par un réfugié tchécoslovaque19, lequel finit par avouer qu’il les imaginait de toutes pièces au fur et à mesure des événements, et même en devançant ces événements. Le réfugié en question a été arrêté, car il semble bien s’être rendu coupable du délit de service de renseignements politiques prévu par la loi suisse20. Il demeure regrettable qu’une partie de la presse suisse ait accordé son crédit à des dépêches inventées de toutes pièces, au risque d’envenimer une affaire déjà détestable en soi. La liberté de la presse étant totale en Suisse, les autorités fédérales ne portent cependant aucune responsabilité de ce fait.
On l’a vu: il est, de bonne foi, également impossible d’affirmer qu’elles en porteraient une à la suite de l’affaire elle-même ou de la manière dont elle fut traitée. Mais cet acte de banditisme politique, auquel les tribunaux suisses mettront un jour le point final21, est apparu comme un signe des temps. Il n’est plus un pays, si pacifique, si soucieux de sa neutralité soit-il, qui ne puisse, sans qu’il y ait le moins du monde de sa faute, se trouver impliqué dans une affaire où le recours à la violence risque d’entraîner des complications internationales.
- 1
- Rapport (Copie): E 2001(E)1970/217/42. P. Cordey est correspondant parlementaire à Berne de la Tribune de Genève et mandaté par le service Information et presse du Département politique pour rédiger des articles sur des événements en Suisse.↩
- 2
- Ce rapport est envoyé le 7 mars par le Département politique aux représentations diplomatiques et consulaires de la Suisse.↩
- 4
- E. Stoffel.↩
- 6
- Les séances extraordinaires du Conseil fédéral ont eu lieu le 15 février 1955 à 7h30 et 16h et le 16 février 1955 à 8h30, E 1003(-)1970/344/ R 3106.↩
- 7
- Cf. la note No 657 du Ministère des Affaires étrangères de la République populaire de Roumanie à la Légation de Suisse à Bucarest du 15 février 1955, E 2200.15(-)1969/182/6.↩
- 8
- Cf. la notice d’entretien de M. Petitpierre avec E. Stoffel du 15 février 1955, E 2800(-) 1990/106/13.↩
- 9
- Cf. la note de la Légation de Suisse à Bucarest au Ministère des Affaires étrangères de la République populaire de Roumanie du 15 février 1955, E 2200.15(-)1969/182/6.↩
- 10
- Cf. la note No 666 du Ministère des Affaires étrangères de la République populaire de Roumanie à la Légation de Suisse à Bucarest du 16 février 1955, ibid.↩
- 11
- Cf. la note du Département politique à la Légation de la République populaire de Roumanie à Berne du 18 février 1955, ibid.↩
- 12
- Cf. le communiqué du DFJP du 17 février 1955, E 4001(D)1973/125/44 (dodis.ch/9612).↩
- 13
- Cf. le rapport de R. Bindschedler du 28 février 1955, E 2800(-)1967/60/8 (dodis.ch/9617).↩
- 14
- Cf. la note No 678 du Ministère des Affaires étrangères de la République populaire de Roumanie à la Légation de Suisse à Bucarest du 18 février 1955, E 2200.15(-)1969/182/6.↩
- 15
- Cf. la note No 832 du Ministère des Affaires étrangères de la République populaire de Roumanie à la Légation de Suisse à Bucarest du 28 février 1955, ibid.↩
- 16
- Une lettre, que les assaillants de la Légation de Roumanie à Berne ont adressée à la police de Berne, demande la libération du Général A. Aldea, de l’Evêque I. Suciu, de A. J. Mirescanu, I. Lazar et B. Brateanu, E 2800(-)1967/60/8.↩
- 17
- Globe-Press.↩
- 18
- H. von Graffenried.↩
- 19
- J. C. Sibrava.↩
- 20
- Sur la question de Globe-Press cf. E 4001(D)1973/125/44.↩
- 21
- Les quatre agresseurs, O. Beldeanu, J. Chirila, St. Codrescu et D. Ochiu ont été traduits en justice en juin 1956 et condamnés à des peines de prison et à l’expulsion, E 2200.15(-) 1969/182/6 et E 4320(B)1990/133/175-189.↩
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