Überlegungen zu Petitpierres Weigerung, an der Eröffnung des Europäischen Kulturzentrums teilzunehmen.
Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 18, Dok. 60
volume linkZürich/Locarno/Genève 2001
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E2800#1990/106#93* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 2800(-)1990/106 18 | |
Dossiertitel | Correspondance avec différents professeurs : Henri Rieben, Denis de Rougemont, H.R. Stirlin, Henri Stranner (1944–1960) | |
Aktenzeichen Archiv | 321.43 |
dodis.ch/8542 Le Chef du Département politique, M. Petitpierre, au Directeur du Centre européen de la culture, D. de Rougemont1
Mon cher Denis,
Tu m’as demandé de t’envoyer un message à l’occasion de l’inauguration du Centre européen de la culture2. Après examen, je suis arrivé à la conclusion que je ne pouvais pas donner suite à ta demande. J’ai tenu à connaître encore l’opinion d’un de mes collègues3, avec lequel j’ai eu un entretien cet aprèsmidi et qui est aussi d’avis que je dois m’abstenir. Les raisons de cette décision sont les suivantes:
Tu es mon beau-frère. A la radio ou encore dans tes Lettres aux députés européens, qui ont été publiées cet été par le Journal de Genève, tu as pris position très nettement, soit contre l’URSS ou encore le Maréchal Staline personnellement, soit contre l’attitude du Gouvernement britannique à l’égard du Conseil de l’Europe. Il semble que, dans l’esprit de ceux qui t’écoutent ou te lisent, – peut-être plus à l’étranger qu’en Suisse, – on admette, sachant que nous sommes beaux-frères, que rien de ce que tu dis ou écris ne l’est sans mon approbation. On m’a même fait la remarque qu’étant donnés nos liens de parenté, il aurait fallu ne pas te montrer aussi violent et excessif dans tes Lettres aux députés européens.
La Suisse, tu le sais, ne peut songer à adhérer au Conseil de l’Europe, et cela d’autant moins aujourd’hui que celui-ci s’occupe aussi, contre ses intentions primitives, de problèmes militaires4. Le Centre européen de la culture est patronné par le Conseil de l’Europe et par les hommes qui sont à la tête de ce dernier. Actuellement, du côté suisse la tendance se manifeste plutôt de pratiquer une politique de neutralité très stricte. Je me trouve donc dans la nécessité de chercher à éviter toute équivoque et à prévenir le reproche de faire deux politiques contradictoires, l’une officielle et l’autre qui serait inspirée de mes opinions et vues personnelles. Or, comme tu le sais, je suis convaincu que nous devons continuer à suivre la ligne que nous nous sommes tracée depuis la fin de la guerre et que la neutralité doit rester le principe fondamental de notre politique extérieure5. Je me rends parfaitement compte que cette attitude créera pour nous des difficultés probablement grandissantes et qu’elle se heurtera à une incompréhension de plus en plus marquée, non seulement des Etats-Unis mais encore d’autres puissances occidentales.
Le service que je pourrais rendre au Centre européen de la culture en envoyant un message représenterait peu de chose en regard des inconvénients que l’envoi de ce message pourrait avoir non seulement pour moi, mais pour le Conseil fédéral et par conséquent pour notre pays.
C’est avec regret que je te donne cette réponse négative, étant donnés les efforts que tu accomplis depuis quelques années et le dévouement dont tu fais preuve pour la défense de l’idée et des intérêts européens. J’espère néanmoins que tu comprendras les motifs de cette réponse et que tu ne m’en voudras pas.
M. Philippe Zutter assistera à la manifestation de samedi, mais sans y représenter le Conseil fédéral.
- 1
- Lettre (Copie): E 2800(-)1990/106/18.↩
- 2
- Le Centre est inauguré le 7 octobre 1950. Sur sa création, cf. la notice de J. Stroehlin à M. Petitpierre du 14 décembre 1949, E 2001(E)1967/113/892 (dodis.ch/8647) et la notice de J. Stroehlin du 28 juin 1950, E 2001(E)1967/113/863 (dodis.ch/8649).↩
- 3
- Le Conseiller fédéral mentionné n’a pas pu être identifié.↩
- 4
- Cf. table méthodique du présent volume: La Suisse et le Conseil de l’Europe et No 98, note 4, dans le présent volume.↩
- 5
- Cf. la conférence des ministres de 1951, qui est principalement dédiée au thème de la neutralité suisse, E 2800(-)1967/61/65.Cf. DDS, vol. 18, doc. 113.↩