Également: Pilet-Golaz transmet au nouveau Ministre de Suisse à Rome les échos favorables venus d’Italie à la suite de sa désignation. Ciano paraît décidé à demander le rappel de Tamaro, mais le Duce semble moins pressé. Annexe de 19.2.1943 (CH-BAR#E2300#1000/716#919*).
Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 14, Dok. 266
volume linkBern 1997
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
Signatur | CH-BAR#E1004.1#1000/9#13823* | |
Dossiertitel | Beschlussprotokoll(-e) 13.11.-17.11.1942 (1942–1942) |
dodis.ch/47452
CONSEIL FÉDÉRAL
Procès-verbal de la séance du 17 novembre 19421
1913. Désignation d’un Ministre à Rome
Procès-verbal de la séance du 17 novembre 19421
M. le Chef du Département politique communique qu’un financier suisse2 qui se trouvait à Rome fin octobre a été appelé par le Ministre des Affaires étrangères, Comte Ciano, qui lui a exprimé le pressant désir de voir de nouveau occuper le poste de Ministre de Suisse à Rome. L’incident Ruegger3, a-t-il dit, était de nature personnelle. C’était presque «une affaire de famille». Il a été provoqué par Mme Ruegger, qui n’a pu oublier qu’elle avait cessé d’être italienne4. Sans doute, le Gouvernement italien a-t-il agi d’une manière un peu brusque. M. Ciano comprend que le Conseil fédéral en ait été froissé et qu’il ait manifesté son sentiment en laissant vacant jusqu’à ce jour le poste de Ministre à Rome. Mais il estime que cette situation a assez duré et qu’en la prolongeant on semblerait vouloir transporter sur le plan politique un incident personnel. M. Ciano a ajouté qu’il se rendait compte que dans l’intérêt des bons rapports entre les deux pays, il ne faudrait pas laisser plus longtemps à son poste l’actuel Ministre à Berne5. M. Ciano a prié son interlocuteur de transmettre ces communications au Chef du Département politique. Par une autre personnalité suisse qui fut à Rome à la même époque6, celui-ci a eu confirmation indirecte de ce qui précède et connaissance du représentant nouveau auquel songeait le Comte Ciano.
Il fait observer qu’au point de vue de la politique générale, l’intérêt de maintenir de bonnes relations avec l’Italie est évident. M. Ciano a témoigné, dans la conversation rapportée ci-dessus, de sentiments amicaux pour la Suisse et, pour entretenir de bonnes relations avec le Gouvernement italien, un chargé d’affaires n’aura jamais l’autorité d’un ministre. En conclusion, il apparaît que le moment est venu de désigner un nouveau Ministre pour le poste de Rome, maintenant surtout que nos négociations économiques ont abouti7.
Le Conseil approuve sans opposition cette manière de voir.
M. le Chef du Département politique estime que la désignation du titulaire du poste de Rome doit avoir un caractère temporaire. Plus d’un régime ne survivra pas à la guerre, et les ministres accrédités auprès des gouvernements des Etats où se produiront de tels mouvements ne pourront rester en place. Des changements de postes s’imposeront donc, et il ne faudrait pas que, le moment venu, le ministre que nous enverrons à Rome puisse prétendre échapper à un déplacement devenu nécessaire.
Le Conseil approuve également cette manière de voir.
M. le Chef du Département politique voudrait qu’avant de discuter la question de personne, le Conseil décide s’il veut envoyer à Rome une personne prise dans la carrière ou hors de celle-ci. En ce qui concerne les candidats n’appartenant pas à la carrière, on a parlé de cinq: MM. Roger Dollfus, Conseiller national, Bixio Bossi, député au Conseil des Etats et Angiolo Martignoni, Conseiller d’Etat, tous trois du Tessin, puis les Conseillers nationaux HenryVallotton et Adrien Lachenal. Si l’on veut faire un choix dans la carrière, le meilleur candidat, recommandé aussi par notre Ministre en France, M. Stucki, serait M. Conrad Jenny, Ministre de Suisse en Argentine. Sa nomination au poste de Rome ferait une place à M. Ruegger, qui trouverait un champ d’activité intéressant dans cet Etat et qui est prêt à s’y rendre.
Sur la proposition du Chef du Département de Justice et Police, le Conseil décide de traiter la question de personne avant celle de savoir s’il y a lieu de faire un choix dans la carrière ou en dehors de celle-ci.
M. le Chef du Département politique pense que sans nécessité absolue ou circonstances exceptionnelles, il est préférable de ne pas faire appel pour l’Italie à un Tessinois, afin d’éviter qu’à Rome on ait l’impression qu’il s’agit, dans une certaine mesure, d’une mission tessinoise représentant la partie «italienne» de la Suisse. Quant aux deux autres candidats, ce sont de fortes personnalités et il faudrait s’assurer qu’ils fassent à Rome la politique du Conseil fédéral et non une politique à eux. Il faut considérer aussi que notre Ministre doit avoir des contacts également avec le St-Siège, puisque nous ne sommes pas représentés auprès de ce dernier. Ces contacts peuvent être particulièrement précieux au moment où la guerre prendra fin. En ce qui concerne M. Lachenal, on peut se demander si son activité politique à Genève et ses nombreuses relations françaises en ont fait une «persona grata» dans un pays totalitaire. Au reste, son nom n’a été prononcé que dans les derniers temps, et son acceptation ne serait pas certaine. Quant à M. Vallotton, le Chef du Département politique ne le propose pas, parce qu’il ne veut pas encourir le reproche d’avoir voulu l’éloigner. D’autre part, si son nom est proposé, il ne le combattra pas, ne voulant rien faire qui puisse laisser supposer qu’il veut fermer la voie à laquelle vont les préférences du député vaudois.
M. le Chef du Département de Justice et Police rappelle que, lors d’un précédent échange de vues, il avait été décidé de faire un sondage à Rome pour savoir si M. Vallotton serait persona grata. A-t-on reçu une réponse?
M. le Chef du Département politique: Il y a une réponse. Elle est peu favorable, mais elle vient de M. Tamaro.
M. le Président8 précise en ce sens qu’il ne s’agit pas d’un avis personnel de M. Tamaro. Celui-ci s’est rendu à Rome pour prendre des renseignements et il rapporte que l’agrément se heurterait à des difficultés, en raison du divorce et du remariage de M. Vallotton, et de son activité d’avocat d’affaires.
M. le Chef du Département des Finances et des Douanes rappelle que lors d’une précédente discussion, où avait été évoqué le nom de M. Peter Vieli, Directeur général du Crédit suisse, à Zurich, il avait lui-même écarté cette candidature, dans l’idée que M. Vieli ne voudrait pas quitter ses fonctions actuelles. Récemment, il a recueilli à Zurich une autre opinion, à savoir que M. Vieli accepterait le poste de Rome s’il était appelé. Il demande que ce nom soit pris en considération.
M. le Chef du Département de l'Economie publique communique que, de divers côtés, on voudrait confier le poste de Rome à un homme en mesure, par ses connaissances et par son passé, de défendre nos intérêts économiques. Or M. Vieli remplit parfaitement ces conditions, car sa formation diplomatique est doublée de l’activité qu’il a exercée tant en sa qualité de Directeur général du Crédit suisse que jadis comme fonctionnaire du Département de l’Economie publique9. En outre, il parle couramment l’italien, qualité essentielle et que ne possède aucun des autres candidats cités, en dehors des Tessinois.
M. le Chef du Département politique a fait abstraction jusqu’ici du nom de M. Vieli, en raison des premières indications fournies par le Chef du Département des Finances, mais il peut se rallier à cette candidature. Il a eu l’occasion d’apprécier M. Vieli et celui-ci serait certainement persona gratissima à Rome.
En conséquence, le Conseil invite le Chef du Département politique:
1° à demander à M. Vieli s’il accepterait le poste de Ministre à Rome et, en cas de réponse affirmative, à faire une proposition portant demande d’agrément à Rome10;
2° à faire, en cas de refus de M. Vieli, une proposition d’agrément pour M. Jenny, Ministre de Suisse à Buenos-Ayres.
- 2
- Il s’agil de Peter Vieli qui, selon le Diario de G. Ciano, a été reçu par ce dernier à la date du 31 octobre 1942.↩
- 3
- Cf. Nos 155 et 172.↩
- 6
- Peut-être un des membres de la délégation commerciale composée de J. Hotz, H. Hornberger et R. Kohli. Cf. No 265 et annexes.↩
- 7
- Cf. No 265.↩
- 8
- Ph. Etter.↩
- 9
- Entré au DPF en 1918, dès 1924 P. Vieli avait été en poste comme Secrétaire de Légation à la Légation de Suisse à Rome. Nommé Conseiller de Légation, il avait été attribué de 1931 à 1937 (année où il avait quitté l’administration fédérale) comme Attaché à la Division du Commerce du DEP. En 1935 il avait dirigé la délégation helvétique chargée de négocier l’accord de clearing avec l’Italie. Cf. DDS, vol. 11, rubrique II. 15.1: Italie, relations commerciales et financières et accord de clearing.↩
- 10
-
Cf. PVCF No 2123 du 18 décembre 1942 (E 1004.1 1/428):Conformément à la décision du Conseil fédéral du 17 novembre 1942, le Département politique s’est mis en rapport avec M. Pierre Vieli, Directeur général du Crédit suisse, pour lui demander s’il accepterait d’être, à titre temporaire, Ministre de Suisse à Rome. M. Vieli a bien voulu y consentir. Sur quoi, l’agrément fut sollicité. Il vient d’être donné.
↩
En conséquence, il est
décidé:
1. M. Pierre Vieli est nommé Ministre de Suisse à Rome.
2. Sa mission a un caractère temporaire.
3. Le traitement et les allocations diverses à verser à M. Pierre Vieli seront fixés d’un commun accord par le Département politique et le Département des Finances.
(Lors de sa séance du 12 mai 1943, le Conseil fédéral fixe les appointements annuels du Ministre Vieli à la somme globale de 100000 fr. Cf. PVCF No 893 daté du même jour, E 1004.1 1/433.)
Cf. aussi la lettre du Conseiller fédéral E. von Steiger, du 18 décembre 1942, au Conseiller national H. Vallotton, également candidat au poste de Ministre à Rome (E 4001 (C) 1/278):
Je viens de sortir de la séance du Conseil fédéral qui a appelé Monsieur Vieli au poste du [sic] Ministre de Suisse à Rome.
Lors de la session il m’était impossible de vous en parler. L’affaire n’était pas mûre, pas même claire.
D’une façon surprenante, au moins pour moi, les milieux de l’économie suisse avaient fait comprendre qu’ils verraient volontiers ou même qu’ils désireraient beaucoup d’avoir un des leurs au poste de Rome.
Au moment de notre dernière conversation le tout était encore tellement vague que je ne me sentais pas autorisé de vous en parler. J’ai beaucoup regretté parce que j’aurais aimé le faire.
Dans les circonstances actuelles, je crois qu’un déplacement pour se rendre à Rome n’est pas très enviable.
Que j’aurais bien aimé voir représentés par vous les intérêts suisses en Italie, vous le savez.
Cf. aussi l’annexe au présent document.
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Italien (Andere)
Ruegger-Affäre (1942)