Language: French
4.7.1924 (Friday)
CONSEIL FÉDÉRAL Procès-verbal de la séance du 4.7.1924
Secret minutes of the Federal Council (PVCF-S)
Examen des termes à introduire dans le compromis d’arbitrage. Dernières instructions au négociateur suisse, Logoz.

Classement thématique série 1848–1945:
II. LES RELATIONS BILATERALES ET LA VIE DES ETATS
II.12. France
II.12.1. La question des zones franches de Haute-Savoie et du Pays de Gex
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Printed in

Antoine Fleury, Gabriel Imboden (ed.)

Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 8, doc. 344

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Bern 1988

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dodis.ch/44986
CONSEIL FÉDÉRAL
Procès-verbal de la séance du 4 juillet 19241

Affaire des zones

Le chef du Département politique rend compte des résultats de la conférence à laquelle, conformément à la décision du Conseil fédéral du 27 juin, il a convoqué le président du Conseil d’Etat genevois, les négociateurs de la convention des zones de 1921, le président de la chambre de commerce de Genève et enfin M. Paul Pictet, naguère président de la Ligue pour le maintien des petites zones, conférence à laquelle M. le conseiller fédéral Schulthess et M. Logoz assistaient aussi. La conférence s’est réunie à Berne le 2 juillet. Le Conseil fédéral a en mains des compléments et amendements aux instructions pour M. Logoz, rédigés par celui-ci à la suite de la conférence.

M. Motta a donné connaissance à la conférence de l’état des négociations de Paris et l’a consultée sur la suite à leur donner.

Les délégués genevois, tout en confirmant leur préférence pour l’arbitrage limité à la question de droit, ont cependant déclaré qu’à défaut de cette solution, ils pouvaient se rallier à celle de l’arbitrage intégral.

M. le Dr Laur s’est également déclaré d’accord en principe avec l’arbitrage intégral, mais il a demandé que le compromis réglât par des dispositions restrictives la question des contingents de marchandises à importer en franchise ou à droits réduits d’un pays dans l’autre.

En ce qui concerne l’instance d’arbitrage, tous les participants à la conférence ont été d’avis qu’il y avait lieu d’insister pour que la Cour de Justice internationale de La Haye fût désignée, sans toutefois en faire une condition sine qua non.

Sur la question II, on a particulièrement signalé le danger de l’éventualité où les juges institueraient des clauses de réciprocité pour l’importation de marchandises en franchise ou à droits réduits. Pour y parer, on a reconnu nécessaire l’adjonction, à la question II, d’une phrase complémentaire dans le sens suivant:

«Il est entendu que, si la sentence devait prévoir l’importation de marchandises, en Suisse ou en France, en franchise ou à droits réduits, les contingents de ces marchandises, que la sentence indiquerait, devraient être préalablement fixés par le commun accord des H. P. C.»

M. Logoz ajoute en note: Il est possible que les pourparlers conduisent à constater que le mot «marchandises», dans le texte ci-dessus, devrait être remplacé par l’expression «produits manufacturés».

Sur ce point, M. Motta propose de faire savoir à M. Logoz, à titre d’instructions, que le Conseil fédéral accepte la proposition ci-dessus, de préférence selon la variante 1, mais qu’au besoin il pourra consentir au maintien de la formule primitive.

M. le conseiller fédéral Schulthess fait observer que si M. Laur, à la conférence du 2 juillet, s’est finalement rallié à l’idée de l’arbitrage intégral, ce n’est que comme pis aller, en faisant toutes réserves quant aux modalités de l’arbitrage, et en insistant sur les dangers et les inconvénients de cette solution. Le chef du Département de l’Economie publique relève encore une fois ces dangers et ces inconvénients, soit que le cordon douanier reste définitivement fixé à la frontière politique, soit que le Tribunal arbitral prononce le maintien des petites zones, avec clause de réciprocité, ce qui permettrait à des manufactures établies en zone de ruiner les industries suisses auxquelles elles feraient concurrence.

M. Fromageot a déclaré que le compromis ne se rapportait qu’aux petites zones. Le cas échéant, nous devrons donc faire des concessions pour obtenir ce qui nous revient de droit, et nous devrons en faire encore sur la question de l’importation des marchandises. Quelque peu réjouissante que soit la situation, il faudra pourtant en passer par là. En tout cas, M. Schulthess insiste fortement pour que le compromis contienne une formule protectrice en ce qui concerne la fixation des contingents. Cette Formule doit comprendre les produits agricoles aussi bien que les produits manufacturés, car sinon les petites zones pourraient faire passer en Suisse non seulement leurs propres produits agricoles, mais ceux qu’elles recevraient de France.

M. Schulthess propose de formuler sur ce point les instructions comme suit:

«Der Unterhändler des Bundesrates ist angewiesen, auf alle Fälle eine Formulierung des Schiedsvertrages zu verlangen, die es ausschliesst, dass durch den Schiedspruch die Schweiz ohne ihr Einverständnis verpflichtet werden kann, bestimmte oder unbestimmte Warenmengen französischer Provenienz einführen zu lassen. Diese Bestimmung muss sich sowohl für landwirtschaftliche wie auch Industrieprodukte beziehen.»

M. Motta se déclare d’accord avec M. Schulthess en ce sens que M. Logoz soit invité à exiger l’introduction dans le compromis d’une formule protectrice selon l’une ou l’autre des variantes envisagées; en cas de refus, il fera toutes réserves utiles sur l’attitude que prendra le Conseil fédéral.

Le Conseil fédéral approuve cette manière de voir.

La 2e question soulevée par M. Logoz est la suivante:

«Il serait utile que le Conseil fédéral expliquât nettement, dans ses instructions, le sens qu’il donne au mot «documents» qui figure à la fin de la question II. La Suisse doit se réserver la possibilité de produire non seulement des documents actuellement existants, mais tous projets de règlement du régime de fait dont elle croirait devoir faire état devant les arbitres (voir, dans ce sens, les conclusions, ch. 4, lett. b, de mon rapport du 25 juin).»

M. Motta estime que l’interprétation donnée par M. Logoz au mot «documents va de soi et qu’elle est naturellement conforme à l’avis du Conseil fédéral.

Il en est pris acte au procès-verbal.

La 3e question posée par M. Logoz est la suivante:

«Pour le cas où la France, en définitive, n’accepterait pas la Cour permanente de Justice internationale comme instance arbitrale, il serait utile que j’eusse des précisions sur les vues du Conseil fédéral au sujet de la composition du Tribunal arbitral.»

M. Motta estime que M. Logoz doit insister jusqu’au bout pour le choix de la Cour permanente de La Haye et ne céder que devant un refus irréductible et définitif. Encore, dans ce cas, devrait-il s’efforcer d’obtenir que les juges du Tribunal arbitral spécial soient choisis parmi les membres de la Cour de La Haye. Quant aux personnalités à désigner, il n’y a pas lieu de donner pour le moment d’instructions à M. Logoz.

Le Conseil fédéral approuve la manière de voir de M. Motta.

4e question.

«Le Conseil fédéral pourra-t-il, s’il y a lieu, dire, peu après mon prochain retour de Paris, s’il accepte dans son ensemble le projet complet de compromis arbitral que je pourrais avoir à lui soumettre?

Il semble en effet que, du côté français, on envisage la signature de ce compromis, dès que possible, par M. Herriot d’une part et, d’autre part, par M. le Ministre Dunant. Il pourrait se faire, si les prochaines conversations conduisent à un accord sur les points principaux, que cette question de la signature se posât vers la fin du mois courant.»

M. Motta expose que cette question est prématurée. Toutefois il est probable que la prochaine conférence entre MM. Logoz et Fromageot avancera assez la solution de l’affaire pour qu’on puisse envisager une décision pour la fin du mois courant.2 Il convient d’attendre les résultats de cette prochaine conférence pour donner à M. Logoz les éclaircissements demandés.

Le Conseil fédéral approuve.

1
E 1005 2/2.
2
Défait, la prochaine rencontre entre Logoz. et Fromageot n’aura lieu que le 7 octobre. Pourun rapport sur les conversations du mardi 7 octobre et des projets suisse et français de compromis d’arbitrage, cf. E 2/1680.