Classement thématique série 1848–1945:
II. LES RELATIONS BILATERALES ET LA VIE DES ETATS
II.12. France
II.12.1. La question des zones franches de Haute-Savoie et du Pays de Gex
Également: Réponse à la note du Président du Conseil français du 21 mars, demandant la mise en vigueur de la convention sur les zones. Exposé de la pratique constitutionnelle suisse en matière de traités internationaux. Annexe de 26.3.1923
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 8, doc. 266
volume linkBern 1988
more… |▼▶Repository
Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2#1000/44#1671* | |
Old classification | CH-BAR E 2(-)1000/44 289 | |
Dossier title | Abkommen mit Frankreich vom 7.8.1921 zur Regelung der Handelsbeziehungen und des freundschaftlichen Grenzverkehrs zwischen den ehemaligen Freizonen Hochsavoyens sowie Gex und den angrenzenden Schweizer Kantonen (1922–1924) | |
File reference archive | B.137.2 |
dodis.ch/44908
Mon télégramme 622 vous aura annoncé que j’ai remis, à midi, au Directeur politique du Quai d’Orsay, la note dont le projet était annexé à votre lettre d’avant-hier3 concernant les zones franches; conformément à vos instructions j’ai ajouté verbalement que, dans cette réponse, le Conseil fédéral n’était pas sorti du cadre qui lui était tracé par la lettre que M. Poincaré m’a adressée le 21 de ce mois4, en sorte qu’aucune allusion n’est faite à une reprise éventuelle des négociations, mais que mon Gouvernement ne se refusera pas à prendre en considération les ouvertures que pourrait lui faire à ce sujet le Quai d’Orsay. M. Peretti était préparé à recevoir ma visite; il avait sur sa table les dernières communications reçues de M. Allizé, entr’autres un long rapport relatant son dernier entretien avec vous et un télégramme parlant de l’émotion considérable provoquée à Berne par la prétention française de voir le Conseil fédéral «confirmer dans le plus bref délai possible son accord avec le Gouvernement français pour la mise en vigueur de la Convention du 7 août 1921». Du reste, dès le 22 mars au matin, j’avais laissé entrevoir à l’un de mes interlocuteurs habituels du Ministère le «pétard» qu’allait causer dans les milieux gouvernementaux suisses la théorie d’après laquelle notre consultation populaire, basée sur la Constitution, pourrait ne pas être respectée par le Gouvernement.
Comme je connais fort bien M. Peretti depuis longtemps, cela a facilité un entretien qui aurait été très désagréable entre des agents moins liés. Après que j’eus fini mon commentaire verbal et que M. Peretti eût pris connaissance de notre réplique, il me dit textuellement: «mais nous ne vous demandions pas de ne pas appliquer votre referendum; notre note n’était point une mise en demeure de passer outre à votre vote populaire; c’était une interprétation juridique de l’état actuel de la question et je reconnais d’ailleurs que tous les arguments n’en sont pas triomphants (sic); ce que nous ne parvenons pas à comprendre, ici, c’est votre attitude négative; vous vous bornez à annoncer que vous n’êtes point en mesure de procéder à la ratification de la convention et vous ne proposez rien – si ce n’est d’attendre; c’est justement cette absence de propositions suisses qui nous indisposa; nous désirons vous amener à négocier».
J’ai fait remarquer à M. Peretti que si, il y a exactement huit jours, j’avais verbalement suggéré que, dans l’intérêt même des deux pays, il valait mieux gagner du temps, la situation créée par la rapide réponse française semblait donner raison à notre manière de voir; j’ai répété que si le Conseil fédéral avait estimé opportun d’attendre, c’était avant tout pour laisser se calmer les esprits; or, aujourd’hui, nous nous trouvons en face du contraire, ce qui prouve à quel point Berne avait vu juste; le peuple suisse n’aime pas être brusqué; lorsqu’il s’agit de ses droits, il est comme un cheval ardent et se cabre...
M. Peretti me dit alors: «voyons, il nous faut sortir de là, je me rends compte qu’il serait peut-être utile de louvoyer; mais vis-à-vis de l’opinion publique française et de notre parlement, qui a adopté la loi interne que vous connaissez, nous ne pouvons pas rester dans une expectative indéterminée; n’y aurait-il pas moyen de reprendre la conversation, quitte à la faire durer?»
M. Doumergue, Président du Sénat, rencontré hier, m’avait déjà tenu ce propos, qui est significatif.
J’ai immédiatement répondu au Directeur politique que, en lui remettant ma note un quart d’heure auparavant, j’avais indiqué que mon Gouvernement ne se refuserait pas d’examiner des ouvertures éventuelles du Cabinet de Paris.
A cela, mon interlocuteur a répliqué que la Suisse ayant rejeté la Convention, c’est à elle à dire ce qu’elle pense, à manifester ce qu’elle désire, à «faire quelque chose d’actif et à ne pas rester dans le passif». La France était prête à ratifier et à laisser entrer en vigueur cette Convention; elle n’a rien à ajouter; la Suisse vient déclarer à Paris qu’elle n’est point en mesure de ratifier alors quid? Il faut pourtant qu’elle ajoute l’expression de son intention de mettre quelque chose à la place de la Convention décédée. Et lorsque la conversation, qui est désirée ici, reprendra, pas de délégations autour du tapis vert, mais tout d’abord des échanges de vues ou de correspondances entre l’agent d’un des deux Gouvernements et l’autre Cabinet. Dès maintenant, a ajouté M. Peretti: «je dois vous dire que nous ne voulons plus recommencer la mésaventure référendaire et que nous devons trouver une formule permettant de conclure un arrangement d’une durée moindre de 15 ans: nous avons la volonté de sortir du statu quo, mais pas de mauvaise volonté – ainsi que ce fut dit à une réunion des journalistes suisses».
Je crois avoir analysé aussi fidèlement que possible cette conversation, qui reste parfaitement courtoise; mon impression finale est que l’on ne s’attendait pas du tout, ici, au «tollé» général que soulèverait en Suisse la théorie due aux talents juridiques de M. Fromageot5 et que M. le Président du Conseil semble avoir hâtivement fait sienne; déjà plusieurs importants journaux français ont prêché la modération au Quai d’Orsay, tout en nous demandant de sortir de notre expectative; vous aurez lu ces articles puisqu’il s’agit de gazettes auxquelles votre Département est abonné directement.
Ainsi que je vous l’ai télégraphié, il m’a paru qu’il serait préférable d’attendre la réception de la réponse à notre note de ce jour, afin de publier en même temps toutes les correspondances échangées; aurez-vous estimé opportun de retenir cette suggestion? [...]
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Free zones of Haute-Savoie and Pays de Gex