Language: French
19.12.1921 (Monday)
CONSEIL FÉDÉRAL Procès-verbal de la séance du 19.12.1921
Secret minutes of the Federal Council (PVCF-S)
Inquiétudes à l’étranger à la suite de la décision du Conseil fédéral d’autoriser la reine Zita à se rendre en Suisse pour assister à l’opération d’une appendicite de son second fils. Conditions de ce séjour et mesures de sécurité.
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Printed in

Antoine Fleury, Gabriel Imboden (ed.)

Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 8, doc. 144

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Bern 1988

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dodis.ch/44786
CONSEIL FÉDÉRAL
Procès-verbal de la séance du 19 décembre 19211

Séjour de l’ex-reine Zita en Suisse

Pour faire suite à sa communication verbale de la séance précédente2, M. le Conseiller fédéral Motta annonce qu’il a reçu vendredi dernier la visite de l’Ambassadeur de France, du Ministre d’Italie et du Chargé d’affaires de Grande-Bretagne, lesquels lui ont communiqué que la conférence des Ambassadeurs3 avait pris note de ce que le Conseil fédéral était disposé à permettre l’entrée en Suisse de l’ex-reine Zita, cela dans le but spécial indiqué, étant entendu que le séjour en Suisse serait court et que l’ex-souveraine repartirait dès que le succès de l’opération subie par son enfant serait assuré. Les trois diplomates ont cependant attiré l’attention de M. Motta sur les appréhensions manifestées par le gouvernement hongrois au sujet de l’intention prêtée à la reine de profiter de son séjour en Suisse pour passer en Hongrie.

M. Motta a exposé aux trois chefs de mission4 que le Conseil fédéral, en se déclarant disposé à permettre l’entrée de la reine Zita sur territoire suisse, s’était uniquement inspiré de raisons d’humanité, qu’il considérait comme inadmissible que la reine abusât de sa présence en Suisse pour tenter une nouvelle aventure en Hongrie et qu’il prendrait des mesures de police pour parer à ce danger, mais qu’au surplus il ne pouvait assumer aucune responsabilité ni prendre aucun engagement envers les gouvernements de l’Entente, pour le cas où la reine réussirait à déjouer la surveillance qui serait exercée. Si les gouvernements de l’Entente désiraient parer d’emblée au danger d’une nouvelle entreprise de restauration, c’est à eux qu’il appartiendrait d’y pourvoir en s’opposant à ce que la reine Zita vînt en Suisse, décision dont le Conseil fédéral leur laisserait la responsabilité.

M. le Conseiller fédéral Hâberlin estime qu’il y a lieu de s’en tenir à la décision antérieure. Il donne des indications sur les mesures de précaution prévues et ajoute qu’il a stipulé la condition que si la reine vient en Suisse, son retour par la même voie soit assuré.

M. le Vice-président Haab insiste pour que le séjour de la reine en Suisse soit limité au temps strictement nécessaire.

M. le Président Schulthess fait observer que les craintes manifestées par le gouvernement hongrois constituent un fait nouveau qui, s’il avait été connu lors de la décision du Conseil fédéral, eût été de nature à lui faire refuser l’autorisation. La reine, avant d’aller à Zurich assister à l’opération que subira son enfant, doit séjourner à Wartegg, qui est tout près de la frontière, et d’où il lui serait très facile de s’échapper. Au cas où elle abuserait de nouveau de son séjour en Suisse pour gagner la Hongrie, le Conseil fédéral se verrait taxer de naïveté. En conséquence, M. le Président propose de révoquer la permission d’entrer en Suisse, donné à l’exreine Zita.

M. le Conseiller fédéral Motta pense qu’il est possible que la communication faite par lui aux chefs de mission de l’Entente détermine celle-ci à interdire le passage de la reine, et qu’il y a lieu de surseoir à la décision, pour attendre les événements.

Il n’est pas pris de décision quant à présent.5

1
E 1005 2/1.
2
Dans cette communication, à la séance du 15 décembre, G. Motta exposait les inquiétudes du gouvernement hongrois au sujet du nouveau séjour en Suisse de la reine Zita et les opinions à ce sujet des représentants britannique, français et autrichien.
3
Le 3 décembre 1921, l’Ambassade de France à Berne avait fait part au Chef du Département politique fédéral de la demande de la reine Zita adressée à la Conférence des Ambassadeurs à Paris, de l'autoriser à quitter Madère pour venir chercher ses enfants en Suisse et pour assister à l'opération d’une appendicite de son second fils à Zurich. Le 4 décembre, une demande en ce sens était adressée directement au Conseil fédéral de la part de la reine Zita (E 1004 1/281).
4
Pour les minutes de ces entretiens, cf. E 2001 (B) 3/49.
5
G. Motta reçoit le 26 décembre à 16 h la visite des Représentants de la France (Allizé), de l’Angleterre (Russel) et de l’Italie (Garbasso) qui lui déclarent que la Conférence des Ambassadeurs a autorisé l’ex-impératrice Zita à se rendre en Suisse pour assister à l’opération de son enfant. La Conférence a mis cependant la condition que le séjour en Suisse ne dépassera pas quinze jours. Elle espère aussi que les mesures que la Suisse prendra seront aussi effectives que possible en conformité des circonstances.Motta a répondu:Le Gouvernement suisse a donné à l’ex-impératrice l’autorisation d’assister en Suisse à l’opération de son enfant. Il a obéi à des raisons d’humanité. Il ne peut prendre des engagements ni des responsabilités vis-à-vis des Etats tiers; sur ce point je tiens à dissiper même l’ombre d’un malentendu. Le Gouvernement suisse prendra des mesures de surveillance aussi effectives que possible, mais cela ne sera fait que dans les limites de son appréciation souveraine. L’ex-impératrice viendra le 7 janvier, l’opération est fixée au 10, dès que l’opération aura été faite et que tout danger de complication pourra être considéré comme écarté, l’ex-impératrice devra quitter le pays. Je pense donc qu’elle ne pourra pas séjourner en Suisse deux semaines, mais plutôt moins. (Minute de Motta du 26 décembre 1921 : E 2001 (B) 3/49).Motta informe le Conseil fédéral de la teneur de cet entretien avec l’Ambassadeur de France et les Ministres d’Angleterre et d’Italie, lors de la séance du Conseil fédéral du 29 décembre 1921 (E 1005 2/1).