Gespräch zwischen Macmillan und Petitpierre betreffend die UdSSR, China und die Genfer Viermächte-Konferenz.
Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 20, Dok. 40
volume linkZürich/Locarno/Genève 2004
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E2802#1967/78#223* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 2802(-)1967/78 8 | |
Dossiertitel | Grossbritannien (1946–1956) | |
Aktenzeichen Archiv | E. |
dodis.ch/13134 Le Secrétaire général du Département politique, A. Zehnder, au Chef du Département politique, M. Petitpierre1 DÉJEUNER MACMILLAN À GENÈVE, LE 11 NOVEMBRE 19552
1. Déjeuner en petit comité auquel assistent entre autres Sir Lionel Lamb, Sir Gladwin Jebb, M. Kirkpatrik, Sous-Secrétaire d’Etat, M. Grey Sous-Secrétaire d’Etat, et deux collaborateurs du Foreign Office.
2. Dès le début, la conversation est politique. Ce qui intéresse M. Macmillan en premier lieu, c’est le raidissement dans l’attitude de M. Molotov après son retour de Moscou. La délégation britannique a l’impression que les Russes ne cherchent même plus à sauver les apparences. Si jusqu’ici l’on croyait que les négociations sur le désarmement et les relations Ouest-Est pourraient encore aboutir à des résultats d’une moindre importance, les délégations occidentales sont en train de perdre même cet espoir.
En discutant ce raidissement, nous tombons logiquement sur la question de fond: la politique de détente est-elle une nécessité pour les Russes ou simplement une nouvelle tactique? Il y a, à l’avis des Anglais, trois faits essentiels à retenir:
a) difficultés économiques (prouvées à leur avis) en Russie,
b) émancipation de la Chine,
c) faiblesse interne du gouvernement russe actuel.
ad a. Les difficultés économiques sont de deux ordres:
1) interne et 2) externe. La politique de Malenkov a éveillé les appétits de la population. Pour les satisfaire, Moscou devrait augmenter la production de produits de consommation au détriment d’autres branches de l’économie nationale. Or c’est impossible. En effet, les réserves des pays satellites sont épuisées et l’aide que la Chine demande, oblige Moscou à maintenir sinon à renforcer la production lourde et agricole. Cependant, il ne faut pas exagérer l’importance politique de ses difficultés économiques. Le peuple russe s’accommodera encore une fois de l’austérité à laquelle il est habitué depuis des années.
ad b. L’émancipation de la Chine a fait perdre la face à l’Union Soviétique sur le continent asiatique. Mais, pour les Britanniques, il n’y a pas de doute que les deux pays collaboreront encore pendant plusieurs années et que les constantes politiques divergentes ne se feront sentir que dans quelques lustres.
Pour les Occidentaux (notamment pour les Américains) se pose le problème de la reconnaissance de la Chine communiste. Or cette reconnaissance pourrait renforcer la tendance des Russes de se rapprocher des pays neutralistes de l’Asie. La situation n’est plus la même qu’en 1950.
Il ne faut exagérer ni la tension ni la soi-disant amitié qui existe entre ces deux blocs communistes.
A l’avis des Anglais, ni les difficultés économiques russes ni l’émancipation de la Chine ne sauraient expliquer ni la politique de détente russe ni le raidissement récent dans l’attitude de M. Molotov.
ad c. Sans être en mesure de le prouver, on est donc plutôt tenté d’en chercher l’explication dans le passage de la politique moscovite du régime dictatorial au régime collectif. L’opinion publique se fait sentir par le truchement du comité central du parti. Il y a les jeunes et la vieille garde. La politique russe risque de devenir flottante selon les influences qui prendront le dessus au sein du parti.
Ici, je dis que Moscou a peut-être besoin de faire le bilan de la politique de détente avant de s’engager davantage. Il n’est donc pas exclu que le tandem Boulganine-Khrouchtchev revienne sur la politique du sourire après un arrêt passager.
3. Macmillan dit que Dulles se désintéresse de la Conférence de Genève. Il est beaucoup plus préoccupé de la situation dans le Proche-Orient où les Russes ont réussi à sauter par-dessus le barrage du système stratégique anglo-américain (bases américaines, pacte de Bagdad). Il chercherait une solution pour empêcher la guerre entre Israël et l’Egypte sans pour autant associer l’URSS à ce règlement, tout en tenant compte du besoin du parti républicain, lors des élections présidentielles de l’année prochaine, de récolter les voix des électeurs juifs.
4. Le voyage de M. Pinay à Bonn, utile pour bagatelliser l’affaire de la Sarre3, ne l’est pas sous l’angle de vue de la Conférence de Genève. Il éveillera la méfiance des Russes sans apprendre quoi que ce soit de nouveau à M. Pinay qui peut compter sur l’appui sans réserve d’Adenauer. Le problème est plutôt de savoir ce que fera l’Allemagne après la mort d’Adenauer. Pinay serait hanté par l’esprit de Rapallo. Les Anglais croient savoir que le nationalisme allemand, favorable à une entente directe avec les Russes qui seuls peuvent offrir à l’Allemagne ce qu’elle désire, ira en augmentant.
5. A ma question Macmillan dit qu’il n’a pas l’intention de sortir le plan Eden4 à la conférence présente. Les Russes sont capables de l’accepter comme base de discussion. Or le plan Eden n’est concevable que si la réunification de l’Allemagne était déjà chose acquise, sinon il aboutirait à la stabilisation de la ligne actuelle de démarcation. A l’avis de Macmillan, il n’y aurait pas de solution durable sans la disparition préalable de la ligne de démarcation des zones d’influence entre l’Ouest et l’Est. Le plan Eden tendait à diluer le rideau de fer dans l’espace en le remplaçant par une zone. Les Russes, en refusant la réunification de l’Allemagne, en accentuent la ligne géométrique immuable.
6. Macmillan espère encore qu’on s’entendra sur l’un ou l’autre des problèmes du désarmement en renvoyant leur étude technique aux Nations Unies. Quant au point 4 de l’ordre du jour, il ne croit plus à une solution téméraire vu les nouvelles instructions de Molotov, mais plutôt à une déclaration qui n’engagerait personne.
La conférence se terminera par la fixation d’une nouvelle conférence des Ministres des Affaires étrangères à fin mars ou au début d’avril à Genève.
- 1
- E 2802(-)1967/78/8.↩
- 2
- Le déjeuner a lieu dans le contexte de la Conférence des Ministres des Affaires étrangères des Quatre Grands convoquée à Genève, cf. DDS, vol. 20, doc. 25 et doc. 37. Sur la préparation de la Conférence, cf. la notice de M. Petitpierre du 15 juin 1955, E 2800(-)1990/ 106/20 (dodis.ch/13176).↩
- 3
- Sur la question de la Sarre, cf. le rapport politique de A. Huber à M. Petitpierre du 27 octobre 1954, E 2300(-)-/9001/193 (dodis.ch/10330).↩
- 4
- Sur le plan Eden, cf. l’exposé de A. Huber du 9 septembre 1955, E 2800(-)1967/61/65 (dodis.ch/10996).↩
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Vereinigtes Königreich (Politik)
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