Die Neutralitätspolitik verbietet den Beitritt zur politischen Gemeinschaft und zur EGKS. Die Schweiz sieht die Möglichkeit zur zwischenstaatlichen Zusammenarbeit in den Bereichen Landwirtschaft und Gesundheit.
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 19, doc. 43
volume linkZürich/Locarno/Genève 2003
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| Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001E#1969/121#6100* | |
| Old classification | CH-BAR E 2001(E)1969/121 223 | |
| Dossier title | Exposés du Chef du Département (1952–1954) | |
| File reference archive | B.58.06 |
dodis.ch/10153
ATTITUDE DE LA SUISSE ENVERS LES PLANS D’INTÉGRATION EUROPÉENNE
I
Nous sommes prêts à fournir notre contribution à tous les efforts faits en vue de resserrer la coopération européenne. Cependant notre participation devient impossible lorsque cette coopération atteint une limite où notre neutralité se trouverait mise en question. Exemples:
a) Nous sommes membres de l’OECE3;
b) nous ne pouvons envisager une adhésion à la Communauté politique;
c) nous ne pouvons pas adhérer à la CECA4;
d) nous sommes prêts à étudier le renforcement de la collaboration européenne dans le domaine agricole dans le cadre de l’OECE; nous sommes prêts à adhérer à un nouvel organisme agricole européen de caractère inter-gouvernemental ou à signer un accord général ou des accords particuliers prévoyant une coopération européenne plus étroite dans le domaine agricole, mais nous ne saurions entrer dans une communauté agricole avec autorité supra-nationale5;
e) de même nous sommes prêts à examiner la possibilité de développer la collaboration européenne dans le domaine de la santé dans le cadre de
l’OMS ou même en dehors de l’OMS, s’il est prouvé qu’un resserrement des liens entre les peuples européens est nécessaire et ne peut se faire au sein de l’OMS6. Mais nous serions obligés de rester en dehors d’un organisme à autorité supra-nationale.II
Nous ne nous opposons pas aux efforts d’intégration européenne. Nous nous bornons à poser les limites de notre participation. Si ces limites sont dépassées par d’autres Etats européens (Ex.: CECA), nous restons en dehors de la Communauté, mais nous sommes prêts à rechercher les moyens de collaborer avec elle. Il ne s’agit pas d’un lien étroit d’association, qui serait déjà au-delà de la limite jusqu’à laquelle nous pouvons nous avancer aujourd’hui, mais d’autre part nous sommes disposés à dépasser le stade des revendications ou démarches faites en ordre dispersé sur divers points particuliers. Nous désirons trouver une solution d’ensemble et pouvons envisager, par exemple, de signer avec la CECA une sorte de traité de commerce réglant nos relations avec elle.
Autrement dit, nous sommes prêts à considérer la CECA ou les autres communautés qui viendraient à être créées comme une réalité avec laquelle nous devons compter. En réglant nos relations avec la Communauté et non avec les Etats membres pour les affaires qui sont de son ressort, nous admettons l’idée d’un intérêt européen, qui passe avant les intérêts nationaux.III
Il reste à expliquer notre attitude réservée à l’égard des plans d’intégration européenne. Il est inutile de vouloir rechercher des justifications humanitaires et altruistes. Nous devons avouer que nous sommes égoïstes et expliquer que nous avons le droit de l’être.
Nous ne devons pas donner aux autres peuples l’impression d’un complexe de supériorité dû à notre longue expérience fédéraliste; nous ne devons pas leur faire sentir qu’à notre avis nous sommes seuls capables de réussir une telle expérience et que nous doutons du succès des efforts des autres. Une telle attitude négative et désabusée de notre part ne serait pas comprise et ne pourrait que nous nuire. Au contraire, l’exemple de la Suisse doit être la preuve que l’expérience fédéraliste est possible et que d’autres que nous peuvent aussi la réussir pour le plus grand bien de l’Europe.
Dès lors, notre absence au sein de l’avant-garde de la fédération européenne ne peut être expliquée que par notre égoïsme, un égoïsme légitime, ou si l’on veut par notre intérêt national.
Les six Etats membres de la «Petite Europe» ont tout à gagner si leur expérience réussit et pas grand’ chose à perdre si elle échoue. Ils auront simplement fait un effort inutile, et encore il n’est pas certain qu’il soit complètement perdu, même en cas d’échec.
En revanche, la Suisse jouerait le tout pour le tout en adhérant dès maintenant à une fédération européenne. En cas de réussite de l’expérience fédéraliste européenne, nous n’aurions pas lieu de nous plaindre de notre adhésion, mais en cas d’échec, les conséquences pour la Suisse seraient graves. Car nous aurions renoncé gratuitement à un long statut de neutralité, qui nous a valu l’indépendance, la paix et la prospérité7. On ne peut raisonnablement exiger de nous que nous abandonnions ces biens matériels et moraux pour tenter une expérience dont l’issue est encore incertaine.
Il est donc légitime que dans l’intérêt national, par égoïsme si l’on préfère, nous regardions d’abord l’Europe se faire sous nos yeux. Nous voulons d’abord être sûrs qu’elle est viable et constater qu’elle vit.
On ne saurait nous tenir rigueur de notre attitude, car les autres Etats sont également préoccupés de leurs intérêts nationaux. Aucun d’eux n’est partisan de l’intégration européenne par pur désintéressement.IV
Toutefois, nous devons veiller que le souci de notre intérêt national ne corresponde pas à une spéculation sur l’échec des tentatives fédéralistes en Europe et ne nous entraîne pas dans un égoïsme si mesquin qu’il équivale à une complicité de sabotage des efforts fédéralistes.
Si une grande nation comme les Etats-Unis s’attribue le droit de pratiquer un «égoïsme éclairé», c’est bien le droit d’un petit Etat comme la Suisse de songer aussi tout d’abord à ses intérêts nationaux. Mais notre devoir à nous est aussi de pratiquer un «égoïsme éclairé».
Cette politique «d’égoïsme éclairé» doit consister:
a) à témoigner non un mépris ou un scepticisme qui se retournerait contre nous, mais de la sympathie à l’égard des tentatives de fédération européenne;
b) à accepter la communauté existante ou celles qui verront le jour comme une réalité et régler nos relations avec elles sur une base contractuelle;
c) à expliquer que notre intérêt national ne nous permet pas d’aller plus loin pour le moment. Nous aurions trop à perdre en cas d’échec de la
fédération européenne, alors que les autres membres de cette fédération ne subiraient nullement les mêmes dommages que nous, l’enjeu n’étant pas le même pour tous les pays;
d) à nous préparer progressivement à faire un pas de plus, au fur et à mesure des développements de la fédération européenne.
En effet, on ne saurait dire que la Suisse ne fera jamais partie d’une telle fédération. Il se peut que dans quelques années ou quelques dizaines d’années nous constations que la fédération européenne vit et qu’elle est solide, qu’étant au centre de l’Europe nous ne pouvons rester en marge de la communauté et qu’alors la situation nouvelle justifie un abandon de la neutralité et une adhésion sans réserve.
Mais pour le moment, notre effort doit tendre:
a) à maintenir la neutralité;
b) à collaborer avec la ou les institutions européennes;
c) à éviter, dans cette première phase des tentatives fédéralistes, de faire un pas qui compromettrait définitivement notre statut d’Etat neutre;
d) mais à éviter en même temps de pratiquer une politique hésitante, incohérente, exclusivement égoïste et basée sur l’idée d’un échec de la fédération européenne, car une telle politique nous placerait dans une situation très inconfortable aussi bien dans l’avenir immédiat qu’au cas où plus tard les circonstances devaient nous amener à envisager sérieusement une adhésion pure et simple.V
La voie que nous devons actuellement rechercher n’est pas simple à suivre, la politique de neutralité est ingrate à pratiquer, mais nous réussirons dans la mesure où nous saurons poser des principes clairs et nous y conformer.
- 1
- Cette notice est rédigée par S. Masnata et adressée à M. Petitpierre pour la séance de la Commission des Affaires étrangères du 25 février 1953, cf. E 2800(-)1967/60/2.↩
- 2
- (Copie): E 2001(E)1969/121/223. Paraphe: LB.↩
- 3
- Cf. DDS, vol. 17 et 18, table méthodique: La Suisse et l’Organisation européenne de Coopération économique.↩
- 4
- Cf. table méthodique du présent volume: La Suisse et la Communauté européenne du charbon et de l’acier.↩
- 5
- Sur le plan Pflimlin, cf. E 2001(E)1969/121/282 et 283 ainsi que E 2001(E)1970/1/50; aussi DDS, vol. 19, doc. 41.↩
- 6
- Sur la création d’une communauté européenne de la santé, aussi appelée «pool blanc», cf. E 2001(E)1970/1/68 et 53.↩
- 7
- Cf. table méthodique du présent volume: Politique générale et doctrine de neutralité.↩
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European Coal and Steel Community (ECSC) Organisation for Economic Co-operation and Development (OEEC–OECD) UN (Specialized Agencies) Neutrality policy


