Das Konsistorium der protestantischen Kirche in Genf prangert die Verfolgung der Protestanten in Kolumbien an. Der kolumbianische Klerus reagiert auf diese Anschuldigungen. An der Spitze dieser Polemik soll ein Schweizer Missionar stehen.
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 19, doc. 74
volume linkZürich/Locarno/Genève 2003
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2300#1000/716#143* | |
Old classification | CH-BAR E 2300(-)1000/716 75 | |
Dossier title | Bogota, Politische Berichte und Briefe, Militärberichte, Band 2 (1941–1953) |
dodis.ch/9178 LA QUESTION PROTESTANTE
La presse colombienne a largement diffusé la déclaration par laquelle le Consistoire de l’église protestante suisse à Genève s’élève énergiquement contre la «persécution catholique» des protestants en Colombie, et formule le souhait que Rome prenne des mesures pour y mettre fin.
Cette protestation n’a pas encore été commentée publiquement. Suivant la Nonciature, le clergé colombien préparerait une documentation pour y répondre. Cette réponse viserait notamment à montrer que les faits évoqués par le Consistoire de Genève lui ont été communiqués d’une manière déformée et que, d’autre part, leur interprétation se révèle beaucoup moins simple qu’il ne paraît à première vue si l’on tient compte des mœurs politiques du pays.
Quoi qu’il en soit, on se demande ici pourquoi le Consistoire a choisi le moment actuel pour publier cette protestation. En effet, la situation telle que je vous l’ai décrite dans mon rapport politique No 5 du 2 mars 19532 a nettement tendance à s’améliorer depuis l’accession au pouvoir du Président Rojas Pinilla. Le nouveau régime ayant mis fin à la tension politique à l’intérieur du pays, les manifestations anti-protestantes ne pouvaient pas ne pas diminuer, le 50% de celles-ci étant, de l’avis général, imputables à des causes d’ordre politique. Dans ces conditions, pourquoi la protestation paraît-elle en ce moment?
Une explication qui vient tout naturellement à l’esprit est d’en chercher l’origine dans les deux voyages effectués en Colombie au cours de ces derniers mois par M. Jean Nussbaum, secrétaire de l’Associationinternationale pour la liberté religieuse3.
J’ai eu de fréquents entretiens avec ce compatriote fervent, actif et cultivé. Si mes informations sont exactes, ses nombreux voyages en Europe, en Amérique et en Proche-Orient seraient défrayés par une organisation religieuse américaine. On n’a pas pu me donner de détails sur cette organisation, mais M. Nussbaum n’a pas caché au soussigné qu’il était «Fondamentaliste». On peut donc se demander si M. Nussbaum ne s’efforce pas avant tout, par son zèle quelque peu intempestif, de justifier les déplacements qu’il effectue pour le compte de ce mouvement religieux américain de fondation récente et que dirige actuellement M. Gresham Machen4 à Philadelphie.
Si tel est le cas, il est à craindre que le Consistoire de Genève n’ait pas été suffisamment informé du point que voici. L’animosité colombienne n’a pas pour objet les protestants comme tels, mais les missionnaires américains. Les protestants européens établis en Colombie – qui s’abstiennent de toute «propagande» –, ne sont pas entravés dans l’exercice de leur culte et n’ont été victimes d’aucune espèce de persécution. Les manifestations de fanatisme antiprotestant coïncident avec l’apostolat que déploie en Colombie depuis quelques années un nombre croissant de missionnaires américains, apostolat dont l’ancien Ambassadeur des Etats-Unis5, un protestant, m’avait déclaré qu’il ne l’approuvait pas et refusait de le protéger. Ce diplomate se rendait compte que l’opinion colombienne n’acceptera jamais le principe suivant lequel l’analphabétisme de ce pays doit être combattu moyennant la conversion du catholicisme au protestantisme des couches illettrées de la population. La réaction, souvent appuyée par le clergé, a été assurément d’une violence que l’on réprouve à juste titre, mais l’on a peut-être pas attiré suffisamment l’attention des membres du Consistoire de Genève sur le fait que la cause de ces réactions doit être cherchée moins dans les convictions religieuses – souvent mal assurées – que dans l’amour-propre national, amour-propre particulièrement vulnérable envers la puissante Amérique du Nord. Il ne s’agit pas seulement d’un conflit religieux, mais du heurt de deux civilisations antagonistes.
- 1
- E 2300(-)-/9001/75.↩
- 2
- Non reproduit.↩
- 3
- L’Association internationale pour la défense de la liberté religieuse a été créée en 1946 par J. Nussbaum en personne.↩
- 4
- Fondateur de la Orthodox Presbyterian Church, J. Gresham Machen décède le 1er janvier 1937.↩