dodis.ch/48273Exposé du Chef du Département politique, P. Aubert, à l'occasion de la Conférence des ambassadeurs le 30 août 19781

Désarmement

Il peut paraître étrange qu'un pays dont un principe politique essentiel est la neutralité armée s'intéresse au désarmement. La paradoxe n'est qu'apparent. C'est précisément l'importance que nous attachons à notre armée qui nous interdit d'ignorer ce qui se fait en matière de désarmement dans les enceintes internationales. À cela s'ajoute que, modérément armés pour notre défense, nous sommes intéressés au premier chef à la réduction des arsenaux défiant l'imagination qui ont été accumulés depuis la dernière guerre mondiale.

L'intérêt que nous portons à ce genre de coopération internationale n'est donc pas nouveau. Nous avons participé à la Conférence du désarmement de 19322, dont le Conseiller fédéral Motta a été le président d'honneur. Nous sommes parties à plusieurs traités3 dans le domaine du désarmement, dont le plus important est le traité de non-prolifération des armes nucléaires4. Il était donc naturel que nous cherchions à manifester notre intérêt pour l'Assemblée générale extraordinaire de l'ONU, qui a traité de ces questions ce printemps et qui a consitué la première réunion à peu près universelle sur ce thème depuis la dernière guerre mondiale5.

Les Nations Unies débattent de désarmement depuis plus de trente ans; la réunion de cette année devait permettre de relancer un effort dont les résultats ont été jusqu'ici plutôt modestes. Elle a atteint certains de ses buts, en particulier la réforme du mécanisme de négociations, réforme qui permettra à la France d'y retrouver sa place, et, peut-être, d'ici quelques années, à la Chine d'y participer.

Nous avons cherché une formule qui nous permette de manifester notre intérêt dans les limites du possible, compte tenu de notre absence des Nations Unies. Nous avons d'abord pensé à une intervention dans le débat général. Vous savez qu'elle ne nous a pas été permise6, et nous avons donc dû recourir au moyen du document distribué par des délégations amies à l'Assemblée et simultanément remis à tous les pays avec lesquels nous avons des relations diplomatiques7.

Nous avons délibérément rédigé ce document, élaboré en étroite collaboration avec le Département militaire, dans un style sobre et direct, en évitant la rhétorique souvent pratiquée sur ce sujet dans les enceintes internationales. Il a été ainsi possible de présenter un texte apprécié dans les capitales et acceptable à notre opinion publique, qui l'a fort bien reçu.

Vous avez pu constater ainsi que nous avons omis de nous référer explicitement à la question des rapports entre désarmement et développement et à celle des ventes d'armes.

Nous entendons continuer à nous intéresser activement à ce problème en raison de ses incidences directes et indirectes pour notre pays. Nous suivrons donc tout aussi attentivement les travaux de tous les organismes qui s'occupent de désarmement, à Genève, à New York8 et ailleurs.

En ce qui concerne le projet français de conférence européenne sur le désarmement, nous avons accueilli cette initiative avec intérêt9. Rien ne s'opposerait, en principe, à notre participation à une telle conférence, si elle devait être convoquée. Je vous rappelle également que nous avons soutenu, avec nos amis neutres et non-alignés, des documents portant sur des mesures complémentaires dans le volet militaire de la CSCE10. Malheureusement, à Belgrade, ces mesures nouvelles n'ont pas été adoptées.