Classement thématique série 1848–1945:
2. RELATIONS BILATÈRALES
2.24. VATICAN
Également: Pilet-Golaz est reconnaissant à Maglione de son intérêt pour la Suisse, mais estime qu’une intervention du Saint-Siège auprès des autorités britanniques n’est pas nécessaire. Le Chef du DPF espère que la Grande-Bretagne finira par comprendre la nécessité pour la Confédération de garder avec le Reich des échanges économiques importants. Annexe de 22.10.1941
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 14, doc. 116
volume linkBern 1997
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2300#1000/716#1112* | |
Old classification | CH-BAR E 2300(-)1000/716 476 | |
Dossier title | Vatikanstadt, Berichterstattung, insbesondere der schweiz. Gesandschaft in Rom, Band 2 (1937–1945) |
dodis.ch/47302
Le hasard a voulu que j’ai été reçu par le Cardinal Secrétaire d’Etat, son Eminence Maglione, le lendemain de mon audience chez M. Mussolini2. On ne peut guère concevoir de contraste plus grand entre les Premiers Ministres des deux grandes Puissances ayant leur centre aux bords du Tibre. Un point de contact, et qui nous intéresse de près, existe cependant entre ces deux hommes d’Etat dans leurs connaissances de notre pays. Le Cardinal Maglione m’a posé immédiatement et rapidement des questions au sujet de nos difficultés économiques actuelles avec la Grande-Bretagne3. Il s’en est montré préoccupé, tout en exprimant le vif espoir que, dans l’intérêt de la vie matérielle de notre pays, les obstacles actuels pourraient être surmontés. Je vous signale ce fait parce que le Saint-Siège - qui, comme l’avait dit autrefois le Cardinal lui-même, est dans les meilleurs rapports avec le Gouvernement de Londres - peut dire des mots d’apaisement en notre faveur. J’ai toute raison d’admettre que cela a déjà été le cas lors des incidents assez préoccupants de l’année dernière, causés par les survols de notre territoire par la RAF. Des paroles que m’avait dites à l’époque le Ministre de Grande-Bretagne près le Saint-Siège - que je n’ai vu d’ailleurs depuis longtemps, en tenant compte, entre autres, de la surveillance exercée par l’Italie, à l’accès du Vatican, et les interprétations exagérées qu’on est enclin, dans la Rome fasciste, à donner aux contacts les plus naturels - ont nettement confirmé à l’époque cette impression. D’autre part, vous savez que lorsque nous avons passé par des périodes plutôt critiques de nos rapports avec l’Italie, le Cardinal Secrétaire d’Etat n’a pas hésité de convoquer l’Ambassadeur d’Italie pour lui faire des exhortations. La situation actuelle vis-à-vis de l’Angleterre est bien différente, mais je n’exclus pas, si tel était le désir du Département4, que le Cardinal Maglione pourrait, lors d’une conversation générale avec le Ministre d’Angleterre, demander à Londres que l’on tienne compte de la situation extrêmement difficile dans laquelle nous nous trouvons dans nos efforts de maintenir intact l’héritage national suisse et du fait que, tout en observant la neutralité la plus complète envers tous, la situation géographique elle-même veut qu’un pays, sans accès à la mer comme la Suisse, entretienne des rapports plus intenses avec ses trois voisins - mais avec une parité complète, si l’on considère l’espace de quelques années.
Je ne pourrais guère revoir le Cardinal avant une quinzaine de jours, mais, si tel était votre désir, je pourrais amplifier, lors de ma prochaine visite, les quelques indications préliminaires données hier.
Le Chef de la diplomatie pontificale s’est aussi enquis, au cours de notre entretien, de nos rapports actuels avec nos voisins, et en particulier avec l’Italie. Je lui ai fait part de mon impression quant à l’amélioration de l’atmosphère dans divers domaines, à la suite des petits orages de printemps et d’été. A propos de nos rapports avec nos voisins, le Cardinal a fait la réflexion éminemment juste qu’il était au fond extraordinaire qu’un petit pays tranquille et travailleur, qui n’aspirait qu’à vivre en paix, dût considérer comme un bonheur si on ne lui causait pas trop d’ennuis du dehors... Quant aux rumeurs de tentatives de paix qui circulent avec une persistance de plus en plus grande dans divers milieux romains, je n’ai pas eu l’occasion d’en parler cette fois avec le Cardinal. D’ailleurs, sur ce chapitre, la diplomatie du Vatican est extrêmement prudente. Le Cardinal s’est seulement enquis si dans les milieux diplomatiques près le Quirinal on prévoyait davantage d’obstacles à la préparation éventuelle de pourparlers auprès de l’Allemagne, de l’Angleterre ou des Etats-Unis. Et il a laissé entendre que le Vatican suivait particulièrement en ce moment l’opinion manifestée aux Etats-Unis.
En passant, je voudrais, du reste, relever que le Vatican a été, durant les dernières semaines, absolument hermétique au sujet de ses conversations avec M. Myron Taylor, l’Ambassadeur extraordinaire du Président Roosevelt, rentré maintenant aux Etats-Unis. L’Ambassadeur du Portugal près le Saint-Siège, par exemple, qui était allé s’enquérir auprès d’un haut prélat - il ne s’agissait pas du chef de la diplomatie vaticane - du contenu de ces pourparlers, s’est vu répondre simplement «qu’il fallait prier que les peuples seraient un jour éclairés et se réconcilieraient» - réponse qui n’a évidemment pas donné matière à une dépêche trop précise. Du côté américain, cependant, où on s’était peut-être fait des illusions sur la possibilité pour le Souverain Pontife de s’écarter, même légèrement, de la condamnation doctrinale absolue du bolchevisme, on n’a pas caché, après le départ de M. Taylor, une certaine déception. J’ai observé en particulier un geste dans ce sens de la part de l’Ambassadeur Phillips. Les milieux américains peuvent cependant se consoler à la pensée que d’autres formes de totalitarisme intégral n’ont, avec des nuances diverses, pas été moins réprouvées par l’Eglise catholique5.
- 1
- Rapport politique: E 2300 Vatikanstadt/2. Saint-Siège.↩
- 2
- A cette occasion, le Ministre Ruegger a remis au Chef du Gouvernement italien une réplique du buste de Marc-Aurèle retrouvé à A venches, offerte par le Conseil d’Etat vaudois. Cf. RP du 14 octobre (E 2300Rom/41 et E 2001 (D) 2/31).↩
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