Classement thématique série 1848–1945:
VI. AFFAIRES DE PRESSE, CENSURE, PROPAGANDE ET OPINION PUBLIQUE
Pubblicato in
Documenti Diplomatici Svizzeri, vol. 13, doc. 37
volume linkBern 1991
Dettagli… |▼▶Collocazione
Archivio | Archivio federale svizzero, Berna | |
▼ ▶ Segnatura | CH-BAR#E2001D#1000/1552#535* | |
Vecchia segnatura | CH-BAR E 2001(D)1000/1552 29 | |
Titolo dossier | Spezielle Berichte (1939–1943) | |
Riferimento archivio | A.21.24 |
dodis.ch/46794
La presse internationale a voué ces derniers temps son attention aux deux problèmes qui intéressent plus particulièrement notre pays.
1. L’expulsion d’Italie de trois journalistes suisses.
2. La visite que le Prince de Liechtenstein a faite au Chancelier Hitler.
Pour votre propre information, nous tenons à vous fournir sur ces deux questions les précisions suivantes.
1. Affaire des journalistes
Le 25 février dernier, M. Hodel (correspondant de la Neue Zürcher Zeitung), M. Gentizon (correspondant de la Gazette de Lausanne, d’autres journaux suisses encore et du «Temps» de Paris), M. Pedrazzini (correspondant occasionnel de divers journaux tessinois), étaient invités par les Autorités de police romaines à quitter l’Italie dans un délai de sept jours. Les agences télégraphiques saisissaient immédiatement de cette nouvelle la presse du monde entier au détriment d’une réglementation rapide et équitable de l’affaire par notre Légation, qui fut chargée par le Département Politique d’exprimer aux Autorités italiennes nos vifs regrets d’une mesure semblable, de demander au Ministère des Affaires Etrangères des explications sur les motifs qui paraissaient justifier une pareille décision et, enfin, de demander qu’il soit sursi à son exécution2.
Le Ministère des Affaires Etrangères déclara d’emblée de la manière la plus formelle à notre Légation qu’il ne s’agissait pas d’une mesure dirigée contre la Suisse, son Gouvernement ou sa presse, ni même d’un avertissement aux journaux représentés par nos compatriotes entrant en ligne de compte, mais qu’elle était dictée par des raisons personnelles à l’égard des intéressés. Il expliqua que nos ressortissants étaient victimes d’une dénonciation. Un délateur les accusait de s’être, au cours d’une conversation privée, exprimés d’une manière offensante pour le Chef du Gouvernement, l’armée italienne, le niveau de culture du peuple italien. La Légation fit immédiatement observer qu’une telle dénonciation était mensongère et demanda qu’il fût donné aux trois journalistes la possibilité de le prouver. Le Chef du Département Politique eut un entretien dans le même sens avec le Ministre d’Italie à Berne, qui promit de s’entremettre pour arranger les choses.
Les démarches de notre Légation aboutirent en premier lieu à un renvoi de la date fixée pour Péloignement de nos compatriotes. Puis, le 4 mars, le Comte Ciano qui, dès son retour de Varsovie, s’était occupé de cette affaire, faisant savoir au Ministre de Suisse à Rome que la mesure prise huit jours auparavant à l’égard de nos journalistes était suspendue. Le Chef du Gouvernement italien n’avait pas pu être amené à prononcer la révocation pure et simple de la mesure en raison de la répercussion qu’avait eue l’incident dans la presse. L’essentiel est que les journalistes puissent rester à Rome. La suspension de la mesure s’identifiera avec une révocation d’ici une quinzaine de jours et nous pouvons admettre que l’affaire est désormais définitivement classée, sauf des circonstances imprévues et malheureuses.
La presse étrangère s’est perdue en conjectures sur le but et la portée de la mesure dont ont été frappés nos compatriotes. Ces commentaires étaient pour la plupart nettement tendancieux. Sans connaître exactement l’origine de la dénonciation qui a causé ce fâcheux incident, nous pensons que ce serait une erreur de voir dans le renvoi de trois correspondants de journaux suisses à Rome, ainsi que certains journaux l’ont prétendu, une manœuvre de Taxe Rome-Berlin. Vous savez que la nouvelle lancée il y a quelque temps par l’agence Reuter au sujet d’une démarche que les Ministres d’Italie et d’Allemagne auraient entreprise auprès du Chef du Département au sujet de l’attitude de la presse suisse a été démentie. Il s’agissait d’une pure invention sortie du cerveau d’un journaliste suisse de quatrième ordre. D’autre part, l’affaire qui nous occupe n’est pas liée non plus, ainsi qu’on pouvait le lire dans certains journaux, à l’attitude du Gouvernement fédéral ou de la presse suisse vis-à-vis de l’article du «Giornale d’Italia» (Svizzera 1939) qui contenait sur notre Gouvernement et sur notre pays des appréciations que le Conseil fédéral lui-même a taxées de méséantes3. Le renvoi de nos compatriotes n’a constitué qu’un incident isolé.
Le Prince de Liechtenstein arrivait à Berlin le 2 mars au matin. Les détails de cette visite avaient été arrangés directement entre le Chef du protocole de la Maison princière et le Ministère des Affaires Etrangères du Reich. Contrairement à notre attente, le Ministre de Suisse à Berlin ne fut pas invité à prendre part à ces manifestations. En revanche, le Prince fit une visite à notre Légation le lendemain de son entretien avec M. Hitler et il convia notre Ministre et son premier collaborateur à un déjeuner au cours duquel il informa notre représentant à Berlin qu’il n’avait pas été reçu seulement par le Chancelier, mais qu’il avait également rendu visite au Maréchal Goering et au Ministre Frick. Les visiteurs avaient emporté de leurs conversations l’impression que l’Allemagne n’avait aucune intention d’entreprendre quoi que ce soit à l’égard de la Principauté. Aucune pression n’aurait été exercée sur le Gouvernement Liechtensteinois en vue d’obtenir qu’il tolère une propagande nationale-socialiste sur son territoire. A titre confidentiel et pour votre information seulement, nous aimerions relever que nous attachons, pour notre part, une certaine importance à la situation au Liechtenstein et que nous la suivons très attentivement.
Le problème du Liechtenstein comporte deux aspects qu’il est essentiel de ne pas perdre de vue. D’une part, le Prince et indirectement son Gouvernement ont un intérêt bien compréhensible d’entretenir avec le Gouvernement du Reich des relations aussi amicales que possible. En effet, la Maison princière possède dans le pays des Sudètes et en Allemagne des propriétés considérables. C’est la raison pour laquelle sans doute le Gouvernement a montré une tendance à ignorer une certaine propagande nationale-socialiste déployée par les agents de sa voisine sur son territoire au cours de ces derniers mois. Nous avons cru devoir attirer l’attention du Chef du Gouvernement sur cette question, ainsi que sur les naturalisations plutôt fréquentes dans la Principauté de réfugiés juifs appelés à verser des honoraires considérables4.
Nous savons, d’autre part, que la population qui n’a pas entièrement les mêmes intérêts que la Maison princière et le Gouvernement d’afficher des sympathies spéciales à l’égard de l’Allemagne est, dans sa grande majorité, désireuse de maintenir les relations contractuelles qui la lient à la Confédération. Des élections auront lieu dans une semaine environ pour le renouvellement du «Landtag» et du Gouvernement. Il n’est guère possible de prévoir quelle sera l’issue de ces votations car, si les intérêts du Gouvernement sont liés au sort du Prince, on ne peut pas ignorer entièrement que ceux du peuple le sont également dans une certaine mesure5.
- 1
- (Copie): E 2001 (D) 2/29.↩
- 2
- Sur cette affaire, cf. E 2001 (D) l/15 et 100, E 2001 (D) 2/17 et E 2200 Rom 23/17.↩
- 3
- Lors de sa séance du 21 février 1939, le Conseil fédéral a pris position par un communiqué de presse dans lequel il regrette cet article wegen seines ungenauen und unanständigen Charakters. (Cf. E 1004.1 1/382, No 358).↩
- 4
- Cf. annexe au No 16.↩
- 5
- Sur la tentative de prise de pouvoir national-socialiste au Liechtenstein le matin du 24 mars 1939, cf. E 2001 (E) 1969/262/12.↩
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