Classement thématique série 1848–1945:
IV. RÉFUGIÉS, IMMIGRATION, POLICE DES ÉTRANGERS
IV.2 CONFÉRENCE D'ÉVIAN (COMITÉ DE LONDRES POUR LES RÉFUGIÉS)
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 12, doc. 346
volume linkBern 1994
more… |▼▶Repository
Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001D#1000/1553#5760* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(D)1000/1553 267 | |
Dossier title | Aide-mémoire etc.; Konferenz von Evian und London betr. Comité intergouvernemental (1938–1945) | |
File reference archive | B.41.21.1.Uch • Additional component: Deutschland |
dodis.ch/46606
Les Délégués du Conseil fédéral à la Conférence d’Evian, H. Rothmund et H. Werner, au Chef du Département de Justice et Police, J. Baumann1
[...]2
IV. Exposé de la Suisse
M. Rothmund exposa, à la séance du 11 juillet3, la situation particulière de notre pays qui ne peut être qu’un pays de transit pour les réfugiés. Le contrôle sur l’admission des étrangers fut établi à la fin de la grande guerre. Plusieurs organisations nouvelles furent créées au cours de ces dernières années pour apporter leur aide aux infortunés. La Suisse a encore près de 100000 chômeurs durant les mois d’hiver. Les dépenses totales pour l’assurance chômage, les secours de crise et l’assistance aux pauvres dépassent 160 millions de francs par an. Une étroite collaboration existe entre les autorités de la police des étrangers et les organisations d’assistance privées, afin de rechercher dans tous les cas une solution constructive. Un droit de recours est garanti à tout étranger contre les décisions négatives prises à son égard par la police des étrangers. Tous les autres Etats voisins de l’ancienne Autriche ayant fermé leurs frontières aux réfugiés, la Suisse a dû rétablir, le 1er avril, le visa pour les passeports autrichiens.
Le Comité dont la création a été proposée par les Etats-Unis devrait traiter l’ensemble de la question d’immigration dans les pays d’outre-mer, en abordant ce problème sous tous ses aspects. La S.d.N., dont c’est l’une des tâches les plus nobles, devrait poursuivre son œuvre en faveur des réfugiés qui ont reçu un accueil temporaire dans les pays européens. L’entrée des réfugiés dans les pays de transit sera rendue plus facile lorsque ces derniers auront la certitude que ceux qu’ils ont reçus pourront se rendre ailleurs. S.d.N. et Comité de Immigration devraient avoir des rapports étroits l’un avec l’autre. Des actions spéciales, en faveur des enfants de réfugiés, par exemple, pourront être étudiées lorsque les Etats européens connaîtront les conditions d’immigration dans les pays d’outre-mer. M. Rothmund forma, en terminant, le vœu que la conférence apporterait des éclaircissements, qui faciliteraient la tâche de tous ceux qui sont disposés, dans la mesure de leurs possibilités, à prêter leur concours aux réfugiés.
f ]4
VIII. Résolution finale
Le projet de résolution soumis d’abord confidentiellement par M. Taylor aux chefs des diverses délégations, fut adopté à l’unanimité, en séance privée, le 14 juillet 1938, avec certaines modifications de forme que les délégations nordiques et néerlandaise, auxquelles s’était jointe la délégation suisse, proposèrent d’y apporter, afin d’éliminer quelques expressions qui leur avaient paru de nature à froisser la susceptibilité de l’Etat intéressé. La résolution constate que rémigration involontaire d’un nombre considérable de réfugiés ne pose pas seulement aux pays d’asile et d’établissement des problèmes de nature économique et sociale, mais aussi d’ordre public. L’adoption d’un programme d’envergure destiné à coordiner l’assistance aux émigrants involontaires actuels et virtuels doit être envisagée. Il est nécessaire que le Comité obtienne la collaboration du Gouvernement allemand en vue de trouver une solution rationnelle du problème qui lui est soumis. Les pays d’asile ou d’établissement se déclarent convaincus que celui-ci apportera sa contribution en permettant aux émigrants involontaires d’emporter leurs biens avec eux et d’émigrer suivant un plan systématique. Une nouvelle réunion du Comité intergouvememental aura lieu à Londres, le 3 août 1938. Un président et quatre vice-présidents seront élus. Le Comité désignera un directeur autorisé, agissant selon les directives du Comité, dont la mission sera d’entreprendre des négociations en vue de réaliser une émigration ordonnée, et de se mettre en rapport avec les Gouvernements des pays de refuge et d’établissement afin d’accroître les possibilités d’établissement permanent. Ce Comité déterminera sa méthode de collaboration avec la S.d.N.. Un barème sera adopté pour répartir ses dépenses entre les Gouvernements participants.
Les instructions qui lui avaient été données par le Conseil fédéral pour la réunion d’Evian, et le but qui était assigné à la Conférence convoquée à Londres, de créer un bureau permanent dont la première tâche serait d’entreprendre des négociations avec l’Allemagne, qui, en cas d’échec, serait, peut-être, l’objet de certaines mesures de la part des Gouvernements participant à ce Comité, engagèrent M. Rothmund à demander un entretien au président du Comité intergouvememental, peu avant la séance de clôture, le 15 juillet. Il hésita d’autant moins à solliciter cette entrevue avec M. Taylor que les délégations américaine et française avaient constamment témoigné à la délégation suisse des sentiments de confiance et lui avaient montré un esprit de «fair play». M. Rothmund exposa au chef de la délégation des Etats-Unis que ses occupations dans son service ne lui permettraient pas de se rendre à Londres, le 3 août. En raison de la situation dans laquelle se trouvait la Suisse, son intention était, d’autre part, de proposer au Conseil fédéral de ne pas participer à cette Conférence. La Suisse, cependant, prendrait connaissance avec un vif intérêt du résultat des efforts qui seraient entrepris à Londres. Elle poursuivrait, dans la mesure de ses possibilités, sa tâche humanitaire à l’égard des réfugiés. M. Rothmund fit également part de ces circonstances à M. Bérenger. Les délégués des Etats-Unis et de la France montrèrent de la compréhension pour l’attitude adoptée par notre pays en face du problème des réfugiés.
IX. Entretiens avec les représentants d’organisations
de réfugiés
Les délégués de la Suisse eurent, au siège de la Conférence à l’Hôtel Royal, un entretien avec les porte-parole de Immigration autrichienne, à la demande de ces derniers. Le professeur HeinrichNeumann, ancien chef de la clinique universitaire oto-rhino-laryngologique de Vienne, qui fut le médecin de plusieurs personnalités illustres, et le Dr. Loewenherz exposèrent les vœux de la communauté israélite de Vienne, en faveur de l’admission immédiate et temporaire d’un grand nombre de réfugiés dans notre pays. M. Rothmund indiqua à ses interlocuteurs les raisons pour lesquelles la Suisse ne pouvait accueillir une telle requête. Notre pays n’est pas, dans les circonstances actuelles, disposé à recevoir un nombre important de réfugiés, avant d’apprendre vers quels pays d’établissement définitif ceux-ci auraient la possibilité de se rendre. Nous eûmes aussi des conversations avec Melles Ferrière et Cahn de 1’«InternationalMigration Service» et avec quelques autres personnalités, parmi lesquelles nous citerons les délégués américains James Me. Donald, ancien Haut-Commissaire pour les réfugiés d’Allemagne, Warren, directeur de 1’«InternationalMigration Service» et Brandt.
X. Conclusions
En proposant au Conseil fédéral de prendre acte de ce rapport, nous croyons devoir souligner l’intérêt réel qu’avait notre pays à ne pas refuser sa collaboration à l’œuvre d’Evian, dont l’initiative est due au président Roosevelt. Les résultats que le nouvel organisme de Londres sera en mesure d’obtenir en vue de trouver une solution humaine au problème des réfugiés, auront, sans doute, des répercussions heureuses pour les Etats européens menacés par l’envahissement des fugitifs d’Allemagne. La situation particulière de la Suisse qui a encore été rendue plus délicate depuis le rattachement de l’Autriche à l’Allemagne, impose à notre pays une réserve nécessaire. C’est pourquoi il nous a paru indiqué de ne pas promettre notre concours au Comité qui se réunira le 3 août prochain à Londres. Toutefois, en considérant que notre pays est le plus important, sinon le seul pays de transit pour les réfugiés du territoire autrichien, nous ne pouvons nous désintéresser des résultats qui seront obtenus par la réunion convoquée dans la capitale anglaise. Il serait ainsi utile de rester en liaison étroite avec le Comité de Londres afin d’être tenus au courant de ses travaux d’une manière suivie5.
- 1
- E 2001 (D) 3/267. Un projet dactylographié de ce document corrigé par Rothmund, se trouve dans E 4800 (A) 3/3.↩
- 2
- La partie non reproduite de ce rapport traite des points suivants: I. Organisation de la Conférence, II. L’ordre du jour du comité, III. Exposés généraux.↩
- 4
- Suivent les points suivants: V. Rapport du Haut-Commissaire de la Société des Nations pour les réfugiés provenant d’Allemagne, VI. Sous-comité des organisations, VII. Sous-comité technique.↩
- 5
- Le Conseil fédéral approuva ce rapport dans sa séance du 27 juillet 1938 et décida de se rallier à la conclusion finale de la délégation suisse que la Confédération, tout en suivant les travaux ultérieurs du comité et des sous-comités précités, avec l’intérêt qu’ils méritent, devrait s’abstenir de prendre part à la première session du comité intergouvememental, convoquée, à Londres, pour le 3 août prochain; cf. E 1004.1 1/375, No1269. Pour la lettre de Rothmund communiquant cette décision au Président du Comité Intergouvememental, Myron C. Taylor, cf. No 353.↩
Tags
Attitudes in relation to persecutions
Policy of asylum German Realm (General) Austria (General) Humanitarian aid