Language: French
25.4.1933 (Tuesday)
CONSEIL FÉDÉRAL Procès-verbal de la séance du 25.4.1933
Minutes of the Federal Council (PVCF)
Insistance de la France en vue d’obtenir la déconsolidation d’une série de droits de douane liés à l’arrangement commercial de 1928. Ouverture de négociations officieuses.

Classement thématique série 1848–1945:
II. RELATIONS BILATÉRALES
11. France
11.1. Relations commerciales
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Printed in

Jean-Claude Favez et al. (ed.)

Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 10, doc. 264

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Bern 1982

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Repository

dodis.ch/45806
CONSEIL FÉDÉRAL
Procès-verbal de la séance du 25 avril 19331

663. Négociations commerciales avec la France

M. le président communique que le gouvernement français a déjà fait plusieurs démarches en vue d’obtenir la déconsolidation d’une série de droits de douane liés par l’arrangement commercial de 19282.Le département de l’économie publique s’est toujours refusé à entrer dans ces vues. Mais le chargé d’affaires de France, M. Hoppenot3, est venu insister auprès du président à ce sujet. Le gouvernement français allègue que l’Allemagne a profité de la déconsolidation des droits du traité franco-allemand pour relever son tarif douanier. La France est empêchée de faire de même, parce qu’une série de ses droits sont liés à l’égard d’autres pays. L’Italie et la Tchécoslovaquie ont consenti aux déconsolidations qui leur ont été demandées par la France. Celle-ci a besoin, maintenant, pour être entièrement libre, du consentement de la Belgique et de la Suisse. En ce qui concerne la Belgique, le gouvernement français déclare qu’il s’est heurté à un premier refus, mais qu’un haut fonctionnaire du ministère belge du commerce se rendra incessamment à Paris, où les conversations seront renouées4. D’autre part, d’après les renseignements recueillis par M. Barbey, notre ministre à Bruxelles, le gouvernement belge n’aurait jusqu’ici reçu aucune demande de la France, et il déclare que s’il en recevait une, il y opposerait une fin de non-recevoir.

Du côté suisse, on s’est attaché jusqu’ici à montrer au gouvernement français que son projet n’atteindrait pas le but qu’il se propose. En relevant les droits de douane sur certains articles, il entraverait sans doute les importations de Suisse, mais non pas celles d’Allemagne, où les prix de revient sont sensiblement inférieurs aux nôtres. Le département de l’économie publique n’a pas manqué non plus de rappeler que, l’arrangement commercial de 1928 ayant été soumis à l’approbation parlementaire, toute modification devrait être approuvée également par les chambres, où les déconsolidations demandées se heurteraient à une forte opposition. Aujourd’hui, le gouvernement français fait état du projet de trêve douanière de M. Roosevelt5 et allègue qu’à la conférence économique6, où l’on cherchera à supprimer les restrictions d’importation et les contingentements, la France et la Suisse devraient présenter un front commun. L’accord qui s’établirait sur les déconsolidations demandées par la France servirait ainsi de prélude à un accord entre les deux pays pour la défense de leurs intérêts à la conférence économique. Le gouvernement français est très désireux d’avoir les mains libres pour se rendre à la conférence. Il demande que le Conseil fédéral consente au moins à entendre les propositions qu’il compte faire et à s’engager dans des conversations qui, pour le moment, seraient purement officieuses.

Ces considérations n’ont pas réussi à ébranler la conviction de M. le président, qui continue à douter qu’une conversation puisse avoir aucune utilité. Toutefois, en raison de l’insistance amicale du gouvernement français, il propose au conseil d’accepter, tout en maintenant son opposition de principe, l’ouverture des négociations officieuses. Il doit être entendu que ces dernières auraient lieu à Berne. Cette proposition est adoptée.

1
E 1004 1/339Absents: Pilet-Golaz et Motta.
2
Arrangement commercial du 21 janvier 1928 (RO, 1928, vol. 44, pp. 59ss.) et avenant du 11 mars 1928 (RO, 1928, vol. 44, pp. 137ss.). Cf. aussi DDS vol.9, no 361, dodis.ch/45378 et annexes.
3
H. Hoppenot, conseiller d’ambassade.
4
Le 10 août, le Ministre-de Suisse à Paris, A. Dunant, écrit à ce propos au Chef du Département de l’Economie publique, E. Schulthess: Or, le Conseiller de l’Ambassade de Belgique à Paris, qui a dirigé jusqu’à la fin de l’année dernière l’Office du Commerce extérieur au Ministère à Bruxelles, m’a donné récemment, à titre très confidentiel, des renseignements sur les véritables mobiles de l’attitude de son Gouvernement dans les derniers pourparlers avec la France. Ce ne furent pas, avant tout, des raisons d’ordre politique qui ont engagé la Belgique à céder, ni - cela nous le savions déjà - des raisons d’ordre économique, bien que le Gouvernement de Bruxelles compte monnayer le fait qu’il a voulu épargner à la France l’odieux d’une dénonciation formelle du Traité franco-belge; ce furent, avant tout, des motifs d’ordre financier. Pour les besoins de sa trésorerie, le Gouvernement belge a, en ce moment, très fréquemment recours à Paris. Par un simple échange de lettres, qui n’est guère précédé de négociations, le Ministère des Finances belge s’assure, de temps à autre, le bénéfice d’une avance de fonds à court terme, ce qui constitue pour lui, paraît-il, un avantage précieux. Il est aisé de se rendre compte du puissant levier que détient la France dans ses pourparlers économiques avec la Belgique (E 7110 1/57).
5
Lors des entretiens Roosevelt- MacDonald au début du mois d’avril.
6
La Conférence économique mondiale doit s'ouvrir à Londres le 12 juin.