Classement thématique série 1848–1945:
XII. AFFAIRES ECCLÉSIASTIQUES
1. Nomination de Mgr Mermillod comme Cardinal
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 4, doc. 28
volume linkBern 1994
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2200.41-02#1000/1671#2866* |
Old classification | CH-BAR E 2200.41-02(-)1000/1671 456 |
Dossier title | Correspondances politiques et diplomatiques (1889–1890) |
File reference archive | 1 |
dodis.ch/42438 Le Chef du Département des Affaires étrangères, N. Droz, au Ministre de Suisse à Paris, Ch. Lardy1
Je vous remercie de vos intéressantes communications2 concernant l’élévation de M. Mermillod à la dignité de cardinal. J’en ai fait part ce matin au Conseil fédéral, après la lecture que venait de donner M. le Président d’une lettre de la nouvelle Eminence3 qui s’est empressée de nous annoncer – en fort bons termes d’ailleurs – ainsi qu’aux gouvernements des cantons de son diocèse le changement survenu dans sa situation hiérarchique.
Comme vous le relevez fort bien, cet événement doit être examiné par nous au point de vue constitutionnel. Deux questions principales se posent; Y a-t-il eu une atteinte à nos droits ou tout au moins un manque d’égards dans le fait que le Saint-Siège n’a pas pressenti le Conseil fédéral avant de faire cette nomination. La dignité à laquelle vient d’être élevé M. Mermillod implique-t-elle une juridiction ecclésiastique nouvelle établie en Suisse?
Sur le premier point, il y a lieu de remarquer que nous ne sommes pas dans la même situation que les autres gouvernements de l’Europe; nous n’avons pas de ministère fédéral des cultes, et tout ce qui se rapporte à ce domaine est demeuré essentiellement placé dans la compétence des cantons. Nous n’avons, à teneur de l’art. 50 de la Constitution fédérale, qu’à veiller à la liberté des cultes, à la paix entre les confessions, au respect des droits de l’Etat et des citoyens en général, nous n’exerçons aucun droit de placet, et c’est seulement lorsqu’il s’agit de l’érection d’évêchés que nous avons à intervenir comme autorité chargée du soin des relations extérieures. En conséquence, si le Saint-Siège avait jugé à propos de nous pressentir, nous aurions dû lui répondre que la question ne nous concernait pas, en tant qu’il ne s’agit pas de créer une hiérarchie en une juridiction nouvelle dans l’organisation de l’Eglise catholique en Suisse.
Au fond, il est préférable qu’on ne nous ait rien demandé puisque notre liberté d’action est encore plus intacte que si nous avions dû donner une réponse quelconque.
La possibilité que M. Mermillod devienne de facto le chef de l’Eglise catholique suisse et l’intermédiaire entre le Saint-Siège et les autres évêques, sans être absolument exclue, semble être bien diminuée par la considération que les autres évêques sont extrêmement jaloux de leur indépendance et qu’ils relèvent pour la plupart des cantons diocésains qui n’entendent pas laisser empiéter sur leurs droits. Si M. Mermillod voulait faire acte de supérieur, il ne manquerait sans doute pas de provoquer des conflits, dans lesquels nous aurions probablement à intervenir en vertu de l’art. 50. On suppose plutôt – le Vaterland le dit expressément – que l’élévation de M. Mermillod n’est que l’avant-coureur de sa retraite de Fribourg, ce qui permettrait au canton de Genève de reprendre les rapports diocésains avec son successeur.
Ces considérations ont amené le Conseil fédéral à ne pas faire une question de cette affaire. Il a décidé de répondre courtoisement à la lettre reçue4, sans du reste préjuger l’avenir, pour lequel il se réserve toute liberté.
Mes collègues et moi sommes du reste très curieux de recevoir les renseignements que vous pensez pouvoir obtenir au sujet du dossier Mermillod. A cette occasion, vous pourrez du reste indiquer en peu de mots, à titre officieux, le point de vue auquel nous nous plaçons. Ce n’est pas le principe du laisser-aller en tout état de cause, c’est celui d’une réserve qui n’exclut pas la vigilance.5
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