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Documents Diplomatiques Suisses, vol. 1, doc. 505
volume linkBern 1990
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Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
▼ ▶ Cote d'archives | CH-BAR#E21#1000/131#85* | |
Ancienne cote | CH-BAR E 21(-)1000/131 44 | |
Titre du dossier | Verteilung der Flüchtlinge und Kostenbeteiligung, sowie Heimschaffung (1864–1864) | |
Référence archives | 11.2.1.3 |
dodis.ch/41504 Le Conseil fédéral à tous les Etats confédérés1
Depuis le commencement de l’insurrection de la Pologne, il est arrivé de ce pays en Suisse des réfugiés qui sont restés jusqu’à leur départ à la charge des cantons respectifs, notamment de Zurich et Saint-Gall. Comme le nombre n’en était pas considérable, nous n’avons pas jugé à propos de prendre des mesures générales.
Eu égard aux circonstances, et disposant des faibles ressources que le budget nous accorde pour la police des étrangers, nous avons accordé des subventions en vue du départ d’un certain nombre de Polonais.
Or il résulte des communications qui nous sont parvenues ces derniers jours, que le chiffre des réfugiés à Zurich s’est accru à plus de cent et qu’au dire de quelques-uns d’entre eux, on peut s’attendre à une affluence plus considérable.
On ne saurait dans ces conjonctures équitablement exiger de quelques Cantons qu’ils aient à supporter seuls les charges qui en résultent. Avec la nécessité de les répartir, surgit aussi pour nous le devoir de vous rappeler les principes sur lesquels reposent de précédentes décisions de l’Assemblée fédérale, quant aux rapports de police entre la Confédération et les Cantons et les Cantons entre eux, cela afin de procurer un mode de procéder uniforme et d’éviter les inconvénients qui pourraient se présenter.
Tout d’abord il est notoire que le droit d’asile et la police des étrangers en général, ont de tout temps appartenu et appartiennent aujourd’hui encore aux Cantons, lesquels ont en conséquence à supporter les charges qui en résultent.
D’un autre côté, la Confédération ne pourrait ni ne voudrait refuser sa coopération. La Constitution nous impose des devoirs vis-à-vis de l’étranger aussi bien que des Cantons, et, en nous efforçant de les remplir, nous espérons pouvoir aussi alléger les charges qui incombent aux Cantons.
Nous avons déjà fait quelques démarches à ce sujet auprès de l’étranger. De l’Italie2 et de la France3 l’assurance nous a été donnée qu’il ne sera apporté aucun obstacle à l’entrée des Polonais dans ces Etats, et que leurs représentants en Suisse sont autorisés à viser les papiers suisses délivrés aux réfugiés. De la part de la Bavière il nous a été répondu4 que les réfugiés n’y sont pas contraints de passer en Suisse, mais qu’on leur laisse la faculté de continuer leur chemin. Pour le cas où dans d’autres Etats on procéderait d’une manière préjudiciable à la Suisse, il nous importerait d’en être informés. En ce qui concerne les rapports entre Cantons, ce qu’il y a selon nous de plus naturel, c’est que les Cantons accueillent chez eux les réfugiés qui cherchent spontanément un asile sur leur territoire. Si des Etats étrangers observent ce mode d’agir envers la Suisse, il n’y a assurément point de doute que ces procédés ne soient respectés plus scrupuleusement encore entre les Cantons de la Suisse.
Pour le cas toutefois où quelques Cantons demeureraient chargés outre mesure, nous estimons qu’ils seraient en droit de départir un certain nombre de réfugiés à d’autres Cantons où ils auraient choisi eux-mêmes leur séjour, et que ces derniers Cantons devraient être tenus de leur accorder l’asile. Cette mesure ne serait toutefois point exécutée secrètement ou par voie de contrainte; bien plus, les autorités compétentes auraient à délivrer à chaque réfugié une légitimation à cet effet. En cas de conflit, ou de résistance de la part de réfugiés, il en serait immédiatement fait rapport à notre Département de Justice et Police qui procédera ou soumettra le cas à notre décision.
Afin que notre Département de Justice et Police soit mis en état de surveiller la chose et de prendre de son chef, le cas échéant, des dispositions utiles, il conviendrait de lui communiquer, à certains intervalles (en cas de grande affluence, chaque semaine) une liste des Polonais arrivés, indiquant distinctement par écrit les noms et l’origine, accompagnés du signalement. On donnerait aussi les noms de ceux qui sont partis.
Quant à ce qui concerne l’entretien et la subsistance des réfugiés, ils sont en principe à la charge des Cantons. Nous avons néanmoins autorisé notre Département de Justice et de Police à délivrer des passeports à court terme aux réfugiés qui veulent quitter la Suisse, et à leur donner un subside pour le voyage comme cela s’est pratiqué jusqu’à présent.
Pour le cas ou parmi les Polonais se présenteraient des individus ayant combattu en Pologne, mais appartenant à d’autres Etats, on les traiterait comme d’autres étrangers dans une position analogue. La présente circulaire ne concerne point les individus de cette catégorie.
En présence de l’accueil réservé en Suisse aux réfugiés politiques, la Confédération a naturellement aussi le droit d’exiger d’autre part que chacun d’eux cherche à s’occuper selon ses facultés et moyens, et tienne une conduite paisible et honnête. Ceux qui y manqueraient seront renvoyés.
La crainte de voir se former des heimathloses a dans les derniers temps engagé les Cantons à se montrer quant à la concession de l’asile plus réservés qu’ils ne l’étaient précédemment. Nous croyons que dans le cas dont il s’agit, ces appréhensions ne se justifieraient pas.
Il y a des réfugiés polonais dans tous les Etats de l’Europe, et ceux-ci ont dans cette question tous le même intérêt, qui ne saurait pas demeurer méconnu. Au surplus l’expérience apprend que parmi les réfugiés politiques aucun n’est tombé dans la classe des heimathloses proprement dits.
En terminant nous exprimons l’espoir que les sentiments d’humanité dont les Cantons ont constamment été animés envers les victimes de la politique, et qui se sont récemment encore manifestés au sein du peuple par des dons volontaires, ne feront pas non plus défaut chez toutes les autorités.5
- 1
- Circulaire (Copie): E 21/85.↩
- 2
- Note du ministre d’Italie à Berne, A. Jocteau, au Chef du Département de Justice et de Police, J. M. Kniisel, du 6 mai 1864, non reproduite.↩
- 3
- Note non retrouvée.↩
- 4
- Note du Ministre des Affaires étrangères de Bavière, K. von Schrenk, au Conseil fédéral, du 5 mai 1864, non reproduite.↩
- 5
- Publié dansFl? 1864 II, p. 56–58. Par un arrêté du Conseil fédéral du 23 septembre 1864 (E 1004 1/58, no 3823), c’est à la Confédération qu’il appartient désormais de répartir les réfugiés et de les soutenir matériellement. Voir aussi le Rapport du Conseil fédéral à la haute Assemblée fédérale concernant les réfugiés polonais, du 6 novembre 1865 (FF 1865 III, p. 883–931 ).↩
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Russie (Politique)
Insurrection de Janvier (1863–1864)