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Documenti Diplomatici Svizzeri, vol. 20, doc. 34
volume linkZürich/Locarno/Genève 2004
Dettagli… |▼▶Collocazione
Archivio | Archivio federale svizzero, Berna | |
▼ ▶ Segnatura | CH-BAR#E2001E#1970/217#2388* | |
Vecchia segnatura | CH-BAR E 2001(E)1970/217 111 | |
Titolo dossier | Errichtung einer Informationsstelle in Genf für Mitteleuropa durch die Arabische Liga (1947–1957) | |
Riferimento archivio | B.25.60.3 |
dodis.ch/12916 Notice interne du Département politique1 NOTE POUR M. LE PRÉSIDENT DE LA CONFÉDÉRATION CONCERNANT LE PROJET DE LA LIGUE ARABE D’OUVRIR UN BUREAU PERMANENT D’INFORMATION À GENÈVE
1. Selon les informations recueillies par un collaborateur de notre Légation au Caire, au cours d’un entretien de caractère privé avec le Chef de la Section culturelle de la Ligue arabe, il a appris que cette organisation, lors de sa séance du 14 octobre, a décidé en principe, sans beaucoup d’enthousiasme d’ailleurs, l’ouverture d’un Bureau permanent d’information pour l’Europe centrale, avec siège à Genève2.
D’après les renseignements donnés à notre Légation, la Ligue arabe, qui dispose déjà d’un bureau d’information auprès des Nations Unies à New-York, envisagerait d’accréditer son bureau à Genève auprès de l’Office européen des Nations Unies.
(Des informations que nous avons pu recueillir au sujet du statut du bureau de New-York, il ressort que ce dernier ne jouirait pas d’un statut spécial).
On peut donc s’attendre que nous soyons dans un proche avenir saisis d’une démarche officielle demandant l’autorisation pour l’ouverture du bureau en question.
Le problème que le Conseil fédéral sera éventuellement appelé à résoudre est des plus délicats. En effet, il paraît au moins douteux que la Ligue envisage aujourd’hui d’installer un bureau à Genève uniquement pour pourvoir aux nécessités du rayonnement culturel arabe et de donner des informations au sujet des pays membres. Il faut surtout s’attendre à ce qu’elle déploie une activité de caractère politique en faveur des peuples arabes d’Afriquedu Nord, d’une part, et dirigée contre l’Etat d’Israël, d’autre part.
2. Considérations de droit
La Ligue arabe3 est une communauté d’Etats créée par un traité (Charte de la Ligue des Etats arabes du 22 mars 1945) dont les membres sont des Etats souverains; elle relève donc du droit public international. Si elle désire établir une quelconque représentation en Suisse, trois possibilités lui sont ouvertes:
A) Demander au Conseil fédéral la reconnaissance de la Ligue arabe, et ensuite, s’il est fait droit à sa requête, accréditer auprès du Conseil fédéral un représentant de ladite ligue.
Cette première possibilité n’entre pas en ligne de compte, étant donné qu’il n’est pas dans les intentions du Conseil fédéral de reconnaître la Ligue arabe ni dans les désirs de celle-ci d’ouvrir une représentation à Berne
B) Se faire représenter auprès de l’ONU à Genève.
La Ligue, n’étant pas membre de l’ONU et ne pouvant pas 1’être (art. 3–6 de la Charte des Nations Unies), ne peut envoyer un délégué pour la représenter au sein ou auprès de cette organisation. Il se pose toutefois la question de savoir si la Ligue arabe pourrait accréditer par exemple un observateur auprès de l’ONU à Genève. Cette question relève, d’une part de l’ONU ellemême et du Conseil fédéral selon les dispositions de la Charte des Nations Unies, de l’accord entre la Suisse et l’ONU et de la pratique observée.
Toutes précisions à ce sujet devraient être données par la Division des Organisations internationales.
Toutefois il y a lieu de relever que, même si nous arrivions à la conclusion que la Ligue arabe peut ouvrir un bureau d’observation auprès du siège des Nations Unies a Genève, celui-ci devrait limiter son activité à l’entretien de relations normales avec l’ONU et n’exercer aucune activité politique susceptible de nuire aux relations entre la Suisse et des Etats tiers ou s’adonner à une forme quelconque de propagande politique.
C) Création d’une association de droit privé selon les dispositions du code civil suisse, Art. 60 et suivants.
La Ligue arabe, en tant que sujet de droit international public, ne peut elle-même établir une représentation en Suisse qui aurait la forme juridique d’une association de droit privé. Elle pourrait, en revanche, créer une telle association qui aurait la pleine indépendance juridique bien que placée en fait sous son patronage. Cette association pourrait alors exercer une activité culturelle, religieuse, voire politique, pour autant qu’elle respecte nos dispositions législatives en matière de sécurité de l’Etat (code pénal, police des étrangers, etc). Cette activité ne devrait être, en aucun cas, propre à nuire à nos bonnes relations avec des Etats tiers ni contraire à notre statut d’Etat neutre.
Il y a lieu de se demander s’il est opportun que nous attirions l’attention de la Ligue arabe sur ces possibilités. En effet, s’il est vrai que nous pourrions exercer un contrôle absolu sur une telle association qui ne jouirait d’aucune immunité ou privilège, il n’en demeure pas moins que ce serait suggérer à la Ligue arabe de créer une représentation par une voie détournée qui se situe en dehors des règles du droit des gens en matière de représentation d’Etats, ou d’organisations internationales qui relèvent du droit public international. Nous pouvons, par ailleurs, être certains qu’un tel bureau exercerait, à côté d’une activité de façade irréprochable, une activité politique qui, tôt ou tard, nous créerait des ennuis et nous obligerait à sévir. Certainement, les Etats arabes auront une réaction qui nous sera défavorable si nous opposons un refus à une demande d’ouvrir à Genève le bureau d’information en question conformément à la décision prise par la Ligue arabe le 14 octobre. Toutefois, si, par la suite, nous sommes obligés d’intervenir contre un tel bureau, d’en expulser les fonctionnaires, voire même de les arrêter ou de dissoudre une telle association, les incidences sur les relations entre la Suisse et les Etats arabes seront encore beaucoup plus défavorables. Le fait que nous ayons toléré trois associations sionistes sur notre territoire ne saurait être invoqué comme précédent4. Il s’agit en effet d’associations de droit privé qui sont indépendantes de 1’Etat d’Israël ou de tout autre sujet de droit public international. Officiellement, ces associations exercent une activité religieuse; en fait, la politique n’a pas été étrangère à leurs préoccupations et même à leur activité. Nous avons peut-être été d’une trop grande tolérance à ce sujet; ceci ne justifie pas que nous nous montrions aussi coulants vis-à-vis de la Ligue arabe qui a pris le caractère d’une alliance militaire qui se trouve en guerre avec Israël et soutient officiellement le mouvement insurrectionnel en Afrique française du Nord.
3. Comment, dès lors, répondre à une demande qui nous serait faite à ce sujet par les Egyptiens ou même prévenir une telle demande? Il serait possible de faire savoir aux autorités du Caire que l’ouverture d’une représentation de la Ligue arabe ne serait possible que sous les formes prévues sous les chiffres a) et b) de la présente note. Une telle réponse reviendrait à une fin de non recevoir sauf éventuellement pour un observateur auprès de l’organisation des Nations Unies à Genève, mais dont le champ d’activité serait extrêmement limité.
Si, en revanche, nous consentons à ce que la Ligue arabe recourt à la solution mentionnée sous lettre c), il y aurait lieu de mentionner avec beaucoup de netteté quelle limite une telle association devrait tracer à son activité et d’insister sur le fait que ni l’association, ni ses membres ne jouiraient des moindres immunités et privilèges.
4. A ce propos, il nous paraît intéressant de signaler que l’Office européen des Nations Unies à Genève a fait part à la Division des Organisations internationales du DPF d’une démarche égyptienne concernant l’accréditation d’une délégation permanente du Gouvernement du Caire. Nous nous demandons si les Egyptiens, qui veulent jouer dans le monde arabe le rôle de «leader», n’ont pas, après avoir pris connaissance des intentions de la Ligue, l’intention de camoufler éventuellement l’activité du bureau permanent dont il s’agit sous le manteau d’une délégation égyptienne auprès de l’ONU.
5. Il y aurait lieu de donner connaissance le plus rapidement possible à M. le Ministre Boissier de ces différentes possibilités en les complétant avec les indications que la Division des Organisations internationales voudra bien nous donner sur la possibilité d’accréditer un observateur auprès du siège genevois de l’ONU et en lui faisant savoir s’il y a lieu ou non d’invoquer auprès des Egyptiens, le point C) qu’à notre avis on peut éluder en nous fondant sur l’argument que la Ligue arabe est un sujet de droit international public qui ne saurait en aucune façon agir par l’intermédiaire d’une association de droit privé.
Cette note, qui a été rédigée en toute hâte, étant donné le délai très court dont nous disposions, ne fait qu’esquisser le problème et devrait être complétée par une étude plus approfondie des divers aspects de la question qu’elle mentionne5.
- 1
- E 2001(E)1970/217/111. Cette notice est rédigée par G. Lepori et adressée à M. Petitpierre.↩
- 2
- Cf. la lettre de A. Boissier à A. Zehnder du 20 octobre 1955, non reproduit.↩
- 3
- Sur la Ligue arabe, cf. E 2001(E)1970/217/318.↩
- 4
- Il s’agit premièrement de l’Organisationsioniste, fondée à Bâle en 1897. Sur 22 congrès organisés avant 1948, 14 eurent lieu en Suisse: Bâle 1897 (1.), 1898 (2.), 1899 (3.), 1901 (5.), 1903 (6.), 1905 (7.), 1910 (10.), 1927 (15.), Zurich 1929 (16.), Bâle 1931 (17.), Lucerne 1935 (19.), Zurich 1937 (20.), Genève 1939 (21.), Bâle 1946 (22.). Sur ce dernier congrès, cf. la notice de A. de Claparède à D. Secrétan du 12 septembre 1946, E 2001(E)-/1/258 (dodis.ch/2657), ainsi que DDS, vol. 16, doc. 97, dodis.ch/190 7 (dodis.ch/190). Les deux autres organisations sionistes sont le Fonds national juif (KerenKayemeth Le Israel ou KKL) fondé à Bâle en 1901, ainsi que l’Agence Juive pour la Palestine fondée à Zurich en 1929. L’Agence Juive ouvre un bureau provisoire de son département de l’immigration en 1939, à Genève. Cf. surtout E 2001(C)4/127, ainsi que E 2001(E)1/232, E 2001(C)4/124, E 2800(-)1967/59/40 et E 2802 (-)1967/78/8.↩
- 5
- Sur le développement de cette affaire, cf. la note de G. Lepori à M. Petitpierre du 13 juin 1956, E 2001(E)1970/217/111 (dodis.ch/12917).↩
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Il ruolo internazionale di Ginevra