dodis.ch/43254
Der schweizerische Handelskonsul in
Montreal,
H. Martin, an den Vorsteher des Handels-, Industrie- und Landwirtschaftsdepartementes,
E. Schulthess1
[...]2
J’ai passé de longues heures avec M. Grigg et nous avons discuté une série d’affaires; il a même eu l’amabilité de m’inviter à déjeuner. M. Grigg est un fonctionnaire intelligent, très apprécié de son chef, et il revient d’un voyage en Extrême-Orient, où il avait été envoyé pour étudier le marché au point de vue de l’exportation canadienne. J’ai pu me rendre compte qu’il n’était point au courant du chiffre de nos exportations suisses au Canada, de telle sorte que j’ai prétendu ignorer la statistique moi-même. Quant à la partie de nos importations du Canada en Suisse, je la traiterai à part; M. Grigg ne paraissait pas même savoir que nous jouissions des droits réduits prévus au Traité français, et, là encore, j’ai fait dévier l’entretien; il a consulté un document officiel contenant la liste des arrangements commerciaux et des pays jouissant de la clause de la nation la plus favorisée, et ce document ne mentionnait pas le nom de la Suisse. A déjeuner, alors que notre conversation roulait sur des questions générales, il m’a dit que les marchandises provenant de pays n’ayant pas d’arrangement commercial, ou ne jouissant pas en vertu d’un Traité de la clause de la nation la plus favorisée, étaient soumises au tarif général canadien; j’ai écouté et parlé d’autre chose, car j’en savais assez.
Il en résulte que si le Canada faisait usage du droit de retrait prévu dans le projet de convention additionnelle soumis par Sir EdwardGrey à M. Carlin le 31 décembre 1913, les marchandises suisses seraient soumises au tarif général canadien pour le cas où un arrangement ne pourrait être conclu dans les douze mois de dénonciation.
Je lis dans la dépêche que la Légation de Londres vous adressait le 15 février 1913, page 2, que cette question vous a déjà inquiété; j’estime de mon devoir de la reprendre et de recommander vivement une tentative nouvelle tendant à insérer dans la convention additionnelle une clause nous assurant la jouissance provisoire de la situation actuelle jusqu’à conclusion d’un arrangement nouveau.
En cas de négociations futures, nous trouverons devant nous M. John Mac-Dougald, le commissaire des douanes, fonctionnaire influent dans sa partie, pas aimable, très difficile, et duquel il n’y a rien à attendre; M. Grigg m’en a chanté les louanges, ce qui m’a permis de constater que le Département du Commerce s’en rapporterait beaucoup à lui pour ces questions.
Il ne faut pas oublier que de jour en jour l’Association canadienne des industriels devient plus puissante, et que des négociations avec un pays industriel comme nous le sommes ne seront pas aussi faciles qu’il semble au premier abord; il est entendu que jamais nous n’obtiendrions les avantages prévus dans le Traité français; le résultat sera que nous aurons plus de difficultés pour nos soieries, nos broderies, etc., difficultés dont profiteront la France et l’Allemagne. Le commissaire des douanes ne manquerait, à mon avis, pas de se servir de l’arme que constitue l’absence de la clause provisoire pour nous acculer à l’échéance. En tous cas, les négociateurs suisses seraient placés dès le début devant une situation inférieure, puisqu’il y aurait pour eux nécessité d’aboutir dans un certain délai, délai que j’estime court si l’on réfléchit à la distance qui sépare Montréal de Berne.
Sur une exportation suisse au Canada de plus de 30 millions de francs, un relèvement (ne fût-il que de 1 ou 2 cents) sur nos principaux articles se chiffrera par de grosses sommes, et j’en donne pour preuve la démarche d’une maison d’importation de chocolats suisses à Toronto qui m’a demandé de l’aider à faire supprimer l’augmentation de 2/4 c instituée le 13 mai 1913; elle estime avoir déjà perdu plus de 4,000 dollars et avoir de la peine à soutenir la concurrence.
En résumé, je crois que le Gouvernement fédéral suisse rendrait un grand service aux exportateurs, et plus tard à celui qui sera appelé à négocier, en revenant à la charge à Londres; nous avons tout avantage à temporiser et à conserver le plus longtemps possible la position actuelle.