Gespräch mit Präsident Perón über den Abschluss eines Wirtschaftsabkommens mit der Schweiz. Einem solchen Abkommen begegnen zahlreiche Schwierigkeiten, so die Probleme betreffend des Finanztransfers. Dieser wurde 1951 unterbrochen, um eine Untersuchung der sogenannten alten Vermögen zu ermöglichen. Argentinien weigert sich ausserdem, typische Schweizer Produkte, wie Uhren, zu importieren. Perón dementiert die Absicht, die Elektrizitätsindustrie zu verstaatlichen.
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 19, doc. 105
volume linkZürich/Locarno/Genève 2003
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001E#1969/121#7797* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(E)1969/121 351 | |
Dossier title | Wirtschaftsverhandlungen und Abkommen mit der Schweiz (1952–1952) | |
File reference archive | C.41.101.0 • Additional component: Argentinien |
dodis.ch/9070 Le Ministre de Suisse à Buenos Aires, M. Fumasoli, au Chef de la Division des Affaires politiques du Département politique, A. Zehnder1 VISITE AU PRÉSIDENT PERON. PROBLÈMES ÉCONOMIQUES ARGENTINO-SUISSES
Avant de partir en congé pour la Suisse, jeudi prochain, j’ai demandé au président Perón de me recevoir, désirant prendre congé de lui. Aimable comme toujours et bien que je l’aie rencontré ces derniers jours, occasionnellement, à plusieurs reprises, le général Perón me reçut immédiatement. Le sachant très occupé par la visite du président libanais2 qui est ici depuis quelques jours et auquel M. Perón voue un intérêt très marqué (les Syro-libanais en Argentine, sont près d’un demi million et ils représentent un nombre important de voix à l’occasion des élections), sans compter les problèmes économiques graves qui se posent ces jours-ci à M. Perón (presque tous les travailleurs sont en grève à cause de leurs réclamations en matière de salaires), j’avais décidé de l’entretenir seulement de deux questions importantes pour nous: l’accord aéronautique3 et les perspectives pour la conclusion d’un accord commercial normal, grâce à la reprise, par l’Argentine, des transferts financiers, sans lesquels un accord ne semble guère possible4. Il n’est pas très facile d’entretenir le président de problèmes précis, car il aime les monologues et les digressions et lorsqu’il est lancé dans un long développement, il ne se laisse pas facilement ramener au noyau des questions qu’on vient lui soumettre.
Je fais part à «Organisations Internationales», dans un rapport spécial5, de l’attitude favorable observée par le président Perón en ce qui concerne nos efforts en vue de la conclusion d’un accord aéronautique.
Pour ce qui a trait aux problèmes se rapportant à un arrangement économique normal (comportant donc des échanges de marchandises normaux, ainsi que les transferts financiers en général) le président s’est montré théoriquement très positif, sans cependant vouloir aller au fond de certaines questions qui ne sont pas de détail. Il a, comme d’habitude, fait un grand éloge de notre pays et de son gouvernement et il a déclaré qu’il désire vivement que les rapports commerciaux réciproques soient normalisés par la conclusion d’un accord général auquel ne s’oppose, dit-il, aucune difficulté. Comme je répondis que certaines difficultés subsistaient toujours, du côté argentin, le général Perón m’interrompit pour me dire qu’il avait fort bien compris l’importance des montres dans le cadre de l’exportation suisse6; qu’il avait expliqué aux ministères compétents que s’ils ne donnaient pas les permis d’importation, les montres seraient quand même importées en contrebande et qu’elles reviendraient plus chères au pays, de sorte que ce problème devait être réglé. J’ai répondu en soulignant à quel point il avait raison et en relevant que la contrebande ne renchérissait pas seulement les montres, mais qu’elle ruinait les importateurs réguliers, honnêtes et responsables, tout en favorisant l’immoralité. J’ai ajouté que jusqu’ici nous n’avions toutefois pas obtenu les permis d’importation sollicités, mais que j’espérais, vu son intervention, que le problème pourrait être réglé bientôt sur un plan général. M. Perón me rappela – pour justifier la position des ministères compétents – les difficultés que l’Argentine avait dû supporter de 1950 à fin 1952 et la politique de sélection sévère en matière d’importations qu’il avait dû inaugurer. Il a observé qu’il se rendait compte à quel point cette politique était dure pour certains importateurs, mais qu’il n’avait réellement pas eu la possibilité d’agir autrement.
Il affirma que la situation économique s’était beaucoup améliorée, mais qu’il était obligé, malheureusement, de continuer à maintenir le contrôle sur les importations, vu les difficultés que l’Argentine rencontre dans le domaine des exportations. En répondant à ma question tendant à savoir si la plus grave des difficultés auxquelles il doit faire face en matière d’exportation, était celle de la baisse des prix, M. Perón me répondit que ce problème pouvait être résolu par l’Argentine grâce à sa souplesse et à la possibilité pour elle de s’aligner en matière de prix, quitte à se rattraper par certaines opérations déterminées et que la difficulté la plus grave résidait pour lui dans la conquête de marchés suffisants pour le placement des récoltes. Comme vous le voyez et ainsi que je l’ai toujours relevé, l’Argentine ne peut pas se permettre de négliger les marchés étrangers, si petits soient-ils. Evidemment, les sacrifices auxquels elle consentira pour se les assurer seront en proportion avec l’importance des marchés et, à ce point de vue, la Suisse (qui n’absorbe qu’un tonnage restreint de céréales argentines) aura de la peine à obtenir d’importantes concessions de Buenos Aires, pour l’exportation des articles dénommés non essentiels. Toutefois, nous ne sommes pas indifférents à l’Argentine.
Ayant conduit la conversation sur l’objet principal de ma visite au président, à savoir sur ses intentions concernant les transferts financiers afférents aux investissements que l’on appelle anciens, c’est-à-dire antérieurs à la Loi du 26 août 1953, n o 14222, M. Perón me réaffirma sa volonté nette et précise de reprendre les transferts en question et il souligna que l’Argentine ne les avait suspendus qu’en 1951, au moment où la crise économique provoquée par la sécheresse allait rapidement atteindre son zénith. Il me démontra, plume à la main, pourquoi il lui avait paru absolument nécessaire de nationaliser les transports, bien que l’exploitation en coûte très cher à l’Etat, à cause des tarifs très bas qu’il doit maintenir. Il affirma que l’enquête en cours devait révéler l’origine précise des investissements anciens, mais qu’une fois ce travail fait, le transfert des revenus légitimes devait être repris sans hésitation: «je vous donne ma parole – dit-il – et vous savez que je tiens mes promesses, que les transferts financiers, ceux qui intéressent la Suisse en premier lieu, seront recommencés et qu’en cinq ans, en tout cas, l’Argentine ne devra plus un sous à qui que ce soit.» Quant à la définition «revenus légitimes» employée par M. Perón, à ma demande d’explication, il ne me donna que l’exemple suivant: une entreprise anglaise importa, en son temps, en Argentine, un capital de dix millions de pesos et obtint en même temps, d’une banque argentine, un emprunt de cent millions de pesos. Avec ce capital argentin, elle travailla fortement et transféra à Londres les bénéfices entiers de l’exploitation, c’est-àdire les revenus de cent dix millions. Il est clair que cette entreprise a ainsi rapatrié plusieurs fois les dix millions investis en Argentine, ce qui est injuste et ce que l’Argentine ne tolèrera plus jamais.
La conversation tomba sur les entreprises électriques. M. Perón déclara que le Gouvernement n’avait aucune intention de nationaliser ni la «Cade»7 ni la «Italo»8 et que, bien au contraire, il faisait tout le possible pour résoudre les problèmes auxquels ces compagnies étaient obligées de faire face. En faisant allusion à la question des tarifs (qui constitue le problème central des deux compagnies précitées), M. Perón observa qu’il s’agissait d’un problème très ardu vu qu’il est très difficile d’augmenter les coûts de production, sans créer au pays une chaîne de conséquences graves, mais qu’il avait déjà dit aux intéressés qu’il était prêt à faire un effort, s’ils augmentaient, de leur côté, la production d’énergie, ce qui allait probablement être le cas puisque M. Brosens (président de la «Cade») semblait avoir obtenu des crédits aux Etats-Unis (le Crédit Suisse doit être au courant des buts du récent voyage de M. Brosens à New York). M. Perón se moqua du parti radical argentin qui, dans ses campagnes électorales n’a jamais cessé de l’appeler «cadiste» parce que lui, Perón, favorise la «Cade», comme la «Italo», alors que les Radicaux en réclament l’expropriation (ce qui est d’ailleurs exact).
Je n’ai pas pu obtenir du président une déclaration formelle quant au moment précis de la reprise des transferts financiers: comme toute l’Administration, il attend aussi les résultats du recensement des «capitaux anciens» (dont il a été si souvent question dans les rapports de la Légation de ces derniers mois9), pour pouvoir prendre une décision. Je crois réellement que M. Perón désire sincèrement résoudre ce problème dont dépend le prestige financier (s’il y en a encore) de l’Argentine à l’étranger, mais que sachant combien il est dangereux de faire des promesses et de ne pas les tenir, il sait que pour prendre une décision il doit:
1) voir si, et à quelles conditions, l’Argentine pourra vendre sa récolte et quelle sera ensuite sa situation au point de vue de la balance commerciale et de celle des paiements; 2) résoudre le problème très grave qui se pose à elle, en ce moment, à cause des grèves persistantes organisées par les divers syndicats, dans toutes les branches de l’industrie et qui semblent devoir fatalement conduire le Gouvernement à élever considérablement les salaires, puis certains prix, avec, comme conséquence, une reprise de l’inflation; 3) attendre le résultat de l’enquête relative aux «capitaux anciens» afin de connaître quel serait le montant de divises exigé par la reprise des services financiers.
A tout cela, on pourrait faire suivre bien des commentaires sur l’incertitude du futur immédiat de l’économie argentine. Je m’en abstiens car les pronostics sont très difficiles à faire et parce que si je voulais invoquer ceux d’un grand nombre d’hommes d’affaires, je devrais ouvrir peut-être trop largement les portes du pessimisme.
Il est certain que M. Perón ne pouvait guère, s’il voulait rester sérieux, me faire des promesses et des déclarations précises à l’heure actuelle, car – comme déjà dit – la situation économique générale accuse une instabilité presqu’exceptionnelle. Le redressement dépend de quelques facteurs aux conséquences absolument imprévisibles aujourd’hui. Je n’ai donc rapporté de ma visite au président, qu’une promesse formelle d’appui en ce qui concerne l’accord aéronautique; une déclaration précise quant à sa ferme volonté de reprendre les transferts financiers, mais sans engagement quant à la date de la reprise; une déclaration de bonne volonté pour ce qui a trait à la conclusion d’un accord commercial et à l’importation des «non essentiels» tels que les montres. C’est dommage que la normalisation de nos échanges commerciaux avec l’Argentine soit si étroitement liée aux transferts financiers (liaison que je comprends d’ailleurs fort bien) car si nous avions les mains plus libres de ce côté-là, nous pourrions peut-être conclure actuellement, sans des difficultés excessives, un accord commercial, surtout si l’Angleterre et l’Allemagne – à la suite des conversations générales qui viennent d’avoir lieu à Londres et à Bonn – obtenaient de Buenos Aires partiellement au moins, la libéralisation qu’elles réclament. Les conséquences de ces conversations, surtout celles qui ont eu lieu à Londres (où il existe, comme chez nous, un grand intérêt pour les services financiers) devront être surveillées par nous avec la plus grande attention.
Ce n’est donc décidément que d’ici quelques mois, dans le meilleur des cas, que nous connaîtrons les décisions argentines au sujet de la reprise des services financiers afférents aux capitaux anciens10.
- 1
- Lettre: E 2001(E)1969/121/351.↩
- 2
- C. Chamoun.↩
- 3
- Sur les négociations concernant la conclusion d’un accord aéronautique entre la Suisse et l’Argentine, cf. E 2001(E)1970/1/134.↩
- 4
- Sur le problème des transferts financiers, cf. DDS, vol. 19, doc. 6, ainsi que le rapport de M. Fumasoli au Département politique du 5 octobre 1953, E 2001(E)1969/121/ 351 (dodis.ch/9069), et la lettre de M. Fumasoli à J. Hotz du 14 novembre 1954, E 7110(-) 1967/32/670 (dodis.ch/9072).↩
- 5
- Cf. la lettre de M. Fumasoli à la Division des Organisations internationales du Département politique du 28 mai 1954, E 2001(E)1970/1/134.↩
- 6
- Sur la question des montres, cf. la lettre d’A. Dominicé à A. Zehnder du 27 janvier 1954, E 2001(E)1969/121/352.↩
- 7
- Compañia Argentina de Electricidad. Sur cette société, cf. E 2200.60(-)1968/231/10.Cf. aussi DDS, vol. 15, doc. 163, dodis.ch/47767.↩
- 9
- Cf. E 2300(-)-/9001/99.↩
- 10
- Quelques mois plus tard, M. Fumasoli avertit le Département politique que le Ministre argentin pour les Affaires économiques lui a communiqué une réponse entièrement négative pour ce qui a trait à la reprise des services financiers. Cf. la lettre de M. Fumasoli à A. Zehnder du 14 novembre 1954, non reproduite.↩
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