Geschichtlicher Überblick, Plan und Antrag zur Frage der Arbeitsbewilligungen zwischen der Schweiz und Frankreich.
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 19, doc. 44
volume linkZürich/Locarno/Genève 2003
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E1001#1000/6#276* | |
Old classification | CH-BAR E 1001(-)1000/6 276 | |
Dossier title | Anträge des Justiz- und Polizeidepartementes Januar - Mai 1953 (1953–1953) | |
File reference archive | 1.4 |
dodis.ch/8957 Le Département de Justice et Police au Conseil fédéral1
Depuis trois ans environ, un malaise grandissant existe dans nos relations avec la France. En 1946, il s’est agi de rétablir un régime quelque peu normal avec ce pays, bien que les rumeurs de la guerre ne fussent pas encore éteintes et que l’on redoutât déjà le retour du chômage et le marasme des affaires. De part et d’autre, on entendait faire face à l’immédiat et au proche avenir sans prétendre construire quelque chose de définitif. C’est dans ce sens que des négociations ont été engagées avec les autorités françaises en vue de conclure un arrangement destiné à régler les conditions de séjour et d’établissement des ressortissants d’un pays dans l’autre2. Cet arrangement3, entré en vigueur le 1er août 1946, a été déclaré confidentiel à la demande des autorités françaises, qui redoutaient que les facilités consenties dussent être concédées à d’autres Etats. Reprenant l’essentiel des dispositions de l’arrangement similaire du 21 juillet 19354, rendu nécessaire en raison du protectionnisme provoqué par la crise économique mondiale, il intervint en marge du traité d’établissement, auquel on ne fit qu’à peine allusion. Il en est résulté quelque incertitude sur la valeur de cet instrument. C’est sans doute la cause d’une gêne qu’il faut maintenant s’employer à dissiper. La France est en effet engagée dans une politique active d’immigration commandée par ses besoins économiques et démographiques. Elle est ainsi amenée en même temps à prendre sur le plan interne des mesures législatives et administratives beaucoup plus strictes que par le passé pour contrôler les étrangers. Enfin, l’organisation professionnelle, qui se développe dans tous les pays, est en France très fortement teintée d’un dirigisme, réprouvé en théorie, mais qui subsiste en fait. On paraît croire du côté français que l’arrangement confidentiel impliquait de notre part une reconnaissance d’un nouvel état de fait et de droit. En effet, les autorités françaises nous donnent de plus en plus l’impression que les textes en vigueur ne les engagent qu’à appliquer à notre colonie les dispositions du droit interne. Les conséquences pour cette dernière risquent d’être désastreuses, car elle est ainsi gravement menacée de vieillissement et d’affaiblissement. Déjà actuellement, on constate une régression sensible de son effectif.
D’autre part, les autorités françaises semblent avoir pris ombrage de certaines mesures administratives suisses. Elles en ont fait abondamment état depuis un an pour souligner un certain malaise régnant dans la colonie française en Suisse. La stagnation de cette colonie à Genève depuis 1946 est-elle peut-être l’objet de préoccupations de la part des autorités françaises? Les doléances de ces dernières, si elles ont pu trouver quelque aliment dans des cas isolés et dans des rigueurs administratives, ne sauraient toutefois mettre en cause l’application régulière par les autorités suisses des principes de l’arrangement confidentiel. L’examen de cas récemment signalés par l’Ambassade de France au Département fédéral de Justice et Police en apporte la confirmation5. Il n’en reste pas moins que l’interprétation que l’on semble donner du côté français à certains faits critiquables et dont le consulat général de France à Genève est sans doute l’artisan principal pèse lourdement sur les relations avec notre pays voisin.
Il importe de dissiper ce malaise peu conforme aux traditions d’amitié qui nous lient avec la France. De plus, les intérêts de notre colonie dans ce pays – la plus importante de nos colonies puisqu’elle comprend un tiers de tous les Suisses à l’étranger – postulent que tous les efforts compatibles avec les exigences de la politique interne soient entrepris dans ce sens pour assurer son existence.
Il convient dès lors de revoir les principes mêmes sur lesquels nos relations avec la France sont fondées. Du côté suisse, ce qui doit déterminer ce nouvel examen, c’est la mesure dans laquelle la présence de la colonie française actuelle et l’accueil de nouveaux venus sont compatibles avec les intérêts économiques de notre pays et la situation du marché de l’emploi. Des sondages effectués auprès de chefs de service de l’administration genevoise, il ressort que les quelques 13’000 Français résidant actuellement à Genève ne posent aucun problème du point de vue de la surpopulation étrangère ni du point de vue du marché du travail. De manière générale, le ressortissant français est un élément qui est le bienvenu dans l’économie genevoise. On ne conçoit guère qu’il puisse en être différemment pour les autres cantons qui, à eux tous, n’hébergent guère plus de Français que le seul canton de Genève.
Cette constatation nous permet d’envisager une solution aux problèmes que posent actuellement nos relations avec la France. Rien ne s’oppose à ce que le statut des ressortissants français en Suisse repose sur des bases très libérales. Les assurances que nous pourrions donner à ce sujet, avec l’assentiment des cantons notamment du canton de Genève, seraient de nature à dissiper toutes les craintes que les autorités françaises ont pu concevoir pour l’avenir de leur colonie en Suisse.
Une délégation suisse devrait rencontrer les autorités françaises le 16 de ce mois à Genève pour faire table rase des griefs qu’elles nous opposent. Nous pensons que cette délégation pourra créer ainsi un climat favorable à la discussion de la situation des Suisses en France, qui doit impérieusement faire l’objet de pourparlers ultérieurs et ceci dans un avenir rapproché. La situation de nos compatriotes ne sera évoquée lors de cette réunion que dans la mesure où les échanges de vues le nécessiteront.
Le premier objectif atteint, il faudra poursuivre, en s’appuyant sur le bénéfice des premières négociations, l’étude des solutions à apporter aux difficultés que notre colonie en France a rencontrées jusqu’ici et que l’interprétation par les autorités françaises de l’arrangement confidentiel du 1er août 1946 n’a pas permis de résoudre.
Les autorités françaises proposent aux autorités suisses, à l’occasion de leur rencontre du 16 février, de préparer un accord relatif aux travailleurs frontaliers valable pour toute la frontière franco-suisse. Aucune précision n’a été donnée sur les modalités de la réglementation envisagée. Il importe d’emblée de réserver l’attitude des cantons-frontière. Il convient donc de renvoyer cette étude à une commission spéciale qui devrait faire appel à des représentants des autorités cantonales intéressées.
Les négociations ont été prévues, avec l’accord des autorités françaises, à Genève. Le Département fédéral de Justice et Police a pris contact à ce sujet avec le Conseil d’Etat genevois. Des sondages officieux ont été effectués précédemment auprès de membres de ce gouvernement, qui se sont déclarés disposés à mettre à la disposition des délégués les locaux nécessaires.
Il sied que la délégation française, des représentants du Consulat général de France à Genève, ainsi qu’une délégation des autorités genevoises soient conviés à un repas offert par la délégation suisse au nom du Conseil fédéral, comme il est de coutume en pareille circonstance.
Il convient enfin d’appeler à siéger au sein de la délégation suisse M. Guillermet, secrétaire général du Département de Justice et Police du canton de Genève, et M. Zurbuchen, directeur du Contrôle de l’habitant qui assument la responsabilité des décisions de ce canton en matière de police des étrangers. M. le Conseiller d’Etat Duboule, dont ils dépendent, y a donné son assentiment.
Le Département politique fédéral6 et le Département fédéral de l’Economie publique7 consultés ont donné leur adhésion au présent rapport8.
- 1
- Propositon: E 1001(-)-/1/276.↩
- 2
- Sur les questions d’immigration entre la Suisse et l’Allemagne, cf. le rapport de H. Rothmund au Conseil fédéral du 13 janvier 1954, E 2001(E)1967/113/136 (dodis.ch/7900); entre la Suisse et l’Italie, cf. DDS, vol. 19, doc. 116.↩
- 3
- Il s’agit de l’Arrangement confidentiel entre la France et la Suisse au sujet de la situation des ressortissants de l’un des deux Etats résidant dans l’autre conclu dans le cadre des accords du 1er août 1946. Cf. le Rapport sur les négociations franco-suisses de juin 1946 concernant la situation des ressortissants de l’un des deux Etats résidant dans l’autre, ainsi que les échanges de main-d’œuvre entre les deux pays du 15 juillet 1946, E 7170(A)-/1/25.Au sujet de la confidentialité de l’arrangement, cf. la proposition commune des Départements fédéraux de Justice et Police et de l’Economie publique, E 1001(-)-/1/615: Il faut encore relever que l’arrangement entre la France et la Suisse au sujet de la situation des ressortissants de l’un des deux Etats résidant dans l’autre est confidentiel et ne doit donc pas être publié, ni porté à la connaissance du public par la voie de la presse ou autrement. Rien ne s’oppose en revanche à ce que les autres conventions soient publiées dans le recueil des lois fédérales.↩
- 4
- Cf. DDS, vol. 11, table méthodique: II. Relations bilatérales, 11.2. Questions de travail.↩
- 5
- Sur le malaise régnant dans la colonie française en Suisse, cf. la lettre du DPF à l’Ambassade de France à Berne du 2 décembre 1952, E 2001(E)1969/121/91 (dodis.ch/8609) et la réponse de celle-ci du 30 décembre 1952, ibid. (dodis.ch/8610).↩
- 6
- Cf. le rapport joint du 9 février 1953. Non reproduit.↩
- 7
- Cf. le rapport joint du 5 février 1953. Non reproduit.↩
- 8
- A la suite de ce rapport, le Département de Justice et Police propose: Vu ce qui précède, nous proposons d’entente avec ces départements: 1) d’engager des pourparlers avec la délégation française à la réunion de la commission mixte instituée par l’arrangement confidentiel du 1er août 1946 sur les points et dans le sens indiqués par notre rapport; 2) de désigner à cet effet, comme membres de la délégation suisse, les personnes dont les noms et qualités suivent: MM. Heinrich Rothmund, Chef de la Division de police du Département fédéral de Justice et Police, Chef de la délégation, Max Kaufmann, Directeur de l’Office fédéral de l’industrie, des arts et métiers et du travail, Paul Baechtold, Chef de la Police fédérale des étrangers, Albert Jobin, Chef de section à l’Ofiamt, Arthur Guillermet, Secrétaire général du Département de Justice et Police du canton de Genève, Georges Chavaz, Conseiller social auprès de la Légation de Suisse à Paris, Walter Zurbuchen, Directeur du Contrôle de l’habitant à Genève, Roger Merlin, 2ème Adjoint à l’Ofiamt, Etienne Serra, 2ème Secrétaire de légation au Département politique fédéral, Louis Dessibourg, Juriste de 1ère classe à la Police fédérale des étrangers. 3) d’allouer une indemnité journalière de 50 francs pour le chef de la délégation et de 40 francs pour les autres membres; 4) d’offrir par les soins de la délégation suisse un repas à la délégation française, à des représentants du Consulat général de France à Genève et à une délégation des autorités genevoises; 5) d’aviser les autorités françaises, par l’entremise du Département politique fédéral, de l’objet des négociations et de la composition de la délégation. Cette proposition du Département de Justice et Police est acceptée par le Conseil fédéral lors de sa séance du 10 février 1953, cf. PVCF No 231 du 10 février 1953, E 1004.1(-)-/1/550.↩
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