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Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 1991, Dok. 11
volume linkBern 2022
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
Signatur | CH-BAR#E5007-01#2014/93#2385* | |
Dossiertitel | Kriegsmaterialausfuhr in die Türkei (1990–2003) | |
Aktenzeichen Archiv | 784.2-006 |
Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
Signatur | CH-BAR#E2010A#2001/161#1700* | |
Dossiertitel | Offizieller Arbeitsbesuch von Bundesrat René Felber im Iran, 3./4.April 1991 (1991–1991) | |
Aktenzeichen Archiv | B.15.21(5) • Zusatzkomponente: Iran |
Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
Signatur | CH-BAR#E1010C#1996/219#470* | |
Dossiertitel | Auslandreisen des Bundespräsidenten, des Bundesrates und von Chefbeamten (1991–1991) | |
Aktenzeichen Archiv | 354 |
Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
Signatur | CH-BAR#E7001C#1999/296#571* | |
Dossiertitel | Iran (1991–1991) | |
Aktenzeichen Archiv | 2310-1 |
Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
Signatur | CH-BAR#E2010A#2001/161#1707* | |
Dossiertitel | Arbeitsbesuch von Bundesrat René Felber in der Türkei, 5./6.April 1991 (1991–1991) | |
Aktenzeichen Archiv | B.15.21(6) • Zusatzkomponente: Turquie |
dodis.ch/57361Entretiens du Chef du DFAE, le Conseiller fédéral Felber, avec le Président iranien Rafsandjani à Téhéran et le Président turc Özal à Ankara1
Visite bilatérale en République Islamique d’Iran et en République de Turquie
Je me suis rendu en Iran (2 au 4 avril 1991), où c’était la première visite bilatérale d’un Conseiller fédéral, et en Turquie (4 au 6 avril 1991), où la dernière rencontre bilatérale au niveau du MAE remontait à 15 ans.2
Le but de ces déplacements était à la fois d’évaluer sur place les effets de la guerre du Golfe sur la position respective des deux pays concernés, et de donner un élan politique à des relations parfois marquées par le doute ou l’incompréhension.3 La problématique kurde irakienne est venue se greffer sur cet ensemble, ce qui m’a permis de mesurer «à chaud» les réactions et les difficultés nouvelles créées par un exode dramatique.4
Aussi bien à Téhéran qu’à Ankara, mon séjour a révélé combien il est important de soigner nos échanges avec des pays complexes mais avec un impact indéniable sur la région et même pour la conception de notre politique étrangère. J’ai ainsi pu constater, autant avec le Président iranien Rafsanjani qu’avec le Président turc Özal, que le capital de bonne volonté dont notre pays jouit surpasse largement le côté parfois ardu de certains incidents de parcours bilatéraux. On se réjouit manifestement de voir la Suisse assumer son rôle dans le domaine humanitaire, dans celui des bons offices comme du dynamisme effectif ou potentiel de nos relations économiques et commerciales.
Ce qui m’a le plus frappé lors de mes entretiens en Iran, c’est à la fois la prudence et la détermination qui marquent l’action du Président Rafsanjani, de son Ministre des affaires étrangères Velayati et de leurs proches.5 Ceux-ci s’efforcent en effet de mettre la République Islamique sur des rails qui la ramènent pleinement dans le giron politique et économique de la communauté internationale. Ainsi, même si le langage à l’endroit des États-Unis reste celui de l’attentisme, on sent bien que le moindre signal sera saisi au bond.6 Dans le domaine de l’évolution de la société actuelle, l’islamisme militant est en perte de vitesse, sans qu’il ait encore trouvé sa substitution. Enfin, au niveau économique ma discussion avec le Ministre compétent, Mohsen Nourbaksh, a mis en exergue une volonté de déréglementation et d’encouragement au secteur privé, où la proposition que j’ai faite de négocier un accord de protection des investissements est tombée fort à propos.
Bien entendu de nombreuses zones d’ombre subsistent puisque l’Iran, en dépit de certains progrès, conserve un déficit important dans le domaine des droits de l’homme.7 D’autres problèmes bilatéraux attendent encore une solution définitive, c’est le cas du deuxième vol Swissair pour Téhéran8 et de l’affaire Radjavi, où les propositions iraniennes ont peu de chances de débloquer la situation actuelle.9
Enfin, j’ai bien senti la préoccupation, teintée de frustration des Iraniens face à la situation en Irak, accentuée encore par la perspective, entretemps devenue réalité, d’une arrivée massive de réfugiés kurdes. Un propos combien significatif du Président à ce sujet résume bien le dilemme qui est celui des voisins de l’Irak comme de la communauté internationale: les États-Unis ont poussé à la guerre contre l’Irak pour le Koweït, et maintenant affichent leur neutralité devant le massacre du peuple irakien. Tout cela a relativisé d’autant les discussions tenues sur l’avenir stratégique et politique de la région, notamment l’idée d’une CSCM et le sort du peuple palestinien.10
Mon passage en Turquie a permis de prendre la température des autorités turques par rapport à la pression exercée par l’influx de réfugiés sur son front sud-est, dont on sait qu’il est la région sensible du pays puisqu’il correspond à l’habitat traditionnel des Kurdes turcs.11 Mes interlocuteurs ont amèrement rappelé le peu d’empressement de la communauté des nations lors de l’entrée massive de Kurdes irakiens en 1988,12 brandissant ce précédent pour expliquer une position quelque peu ambiguë quant à l’ouverture de leur frontière.13 Quant au sort de leur propre communauté kurde, que le langage officiel se refuse à décrire comme minorité, nous sommes convenus de diverger sur les termes.14 Cependant, une lueur d’espoir peut être perçue dans les affirmations du Président Özal qui dit vouloir abolir les mesures discriminatoires contre la langue kurde sans pour autant franchir le Rubicon de l’autonomie.15
Les émotions soulevées à Ankara par la suspension de l’exportation d’armes et par notre traitement méticuleux des demandeurs d’asile turcs, ont bien sûr inspiré des commentaires à mes interlocuteurs.16 J’ai cru percevoir un élément d’exercice de style dans l’exposé de mon homologue Alptemocin sur l’historique des problèmes de sécurité posés par l’activisme de certains groupes kurdes.17 J’ai pu quant à moi rassurer mes partenaires sur l’aspect non-discriminatoire de notre suspension d’exportation;18 j’ai obtenu aussi la garantie que tous les droits constitutionnels de demandeurs d’asile refoulés seraient respectés. Enfin, il m’a été possible d’assurer le soutien de la Suisse à la négociation d’un accord AELE/Turquie.19
Pour conclure, s’il était besoin de faire la démonstration de l’utilité d’un tel périple, les tragiques développements au Kurdistan irakien sont venus nous rappeler l’indispensable effort de compréhension qui nous incombe face à des partenaires qui ne demandent qu’à façonner ensemble les ponts entre le Nord et le Sud. Lorsque, de plus, ces partenaires sont les héritiers «volens nolens» d’anciennes civilisations aux rapports multiples avec la nôtre, le soin des échanges n’en est que plus impératif.
- 1
- CH-BAR#E1010C#1996/219#470* (354). Cette note d’information au Conseil fédéral est très probablement rédigée par Pierre Combernous, le Secrétaire diplomatique du Chef du DFAE, le Conseiller fédéral René Felber. Elle est transmise au Conseil fédéral, signée par le Conseiller fédéral Felber, en date du 9 avril 1991. Au vu du visa du Vice-chancelier François Couchepin, le Conseil fédéral en prend connaissance lors de sa séance du 10 avril 1991, cf. le facsimilé dodis.ch/57361. La note d’information est mobilisée dans le cadre de la discussion sur les livraisons d’armes à la Turquie et de l’aide accordée aux populations kurdes, cf. le dossier CH-BAR#E1003#2003/92#2*. Lors de sa visite, le Conseiller fédéral Felber est accompagné par Combernous et par les collaborateurs du DFAE l’Ambassadeur Jenö Staehelin, Chef de la Division politique I, Marco Cameroni, Chef de la Section presse et information et l’Ambassadeur Guy Ducrey, Chef du Secrétariat politique. Lors du passage en Turquie, du 4 au 6 avril 1991, ils sont rejoints par les collaborateurs de l’Ambassade de Suisse à Ankara, l’Ambassadeur Adolf Lacher et le Conseiller d’ambassade Benoît Junod.↩
- 2
- Sur les entretiens du Ministre des affaires étrangères turc, İhsan Sabri Çağlayangil, avec le Chef du DPF, le Conseiller fédéral Pierre Graber, à Berne les 14 et 15 février 1977, cf. dodis.ch/48214.↩
- 3
- Sur les implications de la guerre du Golfe pour la Suisse, cf. DDS 1991, doc. 2, dodis.ch/57332 et doc. 4, dodis.ch/54707, ainsi que la compilation thématique Crise du Golfe (1990–1991), dodis.ch/T1673.↩
- 4
- Cf. à ce propos DDS 1991, doc. 3, dodis.ch/58521 et la compilation thématique Réfugiés kurdes, dodis.ch/T1911.↩
- 5
- Le Vice-ministre des affaires étrangères iranien, Mahmoud Vaezi, s’est également rendu en Suisse peu de temps avant la visite du Conseiller fédéral Felber en Iran, cf. le télex hebdomadaire 12/91 du 18 mars 1991, dodis.ch/59620 et dodis.ch/58402.↩
- 6
- L’engagement du gouvernement iranien en faveur de la libération d’otages américains au Liban au cours de l’année 1991 entrouvre la perspective d’un rapprochement prudent entre les États-Unis et l’Iran, cf. notamment dodis.ch/59053 et dodis.ch/58407. Depuis 1990, la Suisse joue, avec son opération «Grand Nettoyage», le rôle d’entremetteuse dans les négociations visant la libération de tous les otages sur la scène libanaise, cf. DDS 1991, doc. 33, dodis.ch/58395 et dodis.ch/58409, ainsi que la compilation thématique Opération «Grand Nettoyage» (1990–1991), dodis.ch/T1956. Sur l’état des mandats de la Suisse en tant que représentante des intérêts iraniens dans d’autre pays et des intérêts étrangers en Iran, cf. dodis.ch/59993 et dodis.ch/60029.↩
- 7
- Cf. dodis.ch/60090.↩
- 8
- Cf. le télex hebdomadaire 34/90 du 20 août 1990, dodis.ch/55154, pp. 15–17. Le deuxième vol Swissair à destination de Téhéran est approuvé par les autorités de l’aviation civile iranienne le 15 mai 1991, cf. le dossier CH-BAR#E2023A-01#2005/37#3294* (o.652.21.Iran).↩
- 9
- Sur l’affaire Radjavi, cf. DDS 1990, doc. 62, dodis.ch/56245, notamment la note 6, ainsi que la compilation dodis.ch/C1814. Sur l’état général des relations bilatérales entre la Suisse et l’Iran, cf. dodis.ch/58033. Au cours de l’année 1991 les relations entre les deux pays demeurent tendues. Le 26 juin 1991, des manifestants iraniens s’en prennent au convoi de la voiture du Ministre des affaires étrangères iranien, Ali Akbar Velayati, en visite à Genève, ce qui irrite fortement les autorités de Téhéran, cf. la compilation dodis.ch/C2061. Le 23 décembre 1991, le ressortissant iranien Zeynal Sarhadi, apparenté au Président Hachemi Rafsandjani, est arrêté à Berne sur la base d’un mandat d’arrêt international. Il est accusé par les autorités françaises de complicité dans l’assassinat de l’ancien Premier ministre iranien Chapour Bakhtiar à Paris. Immédiatement, l’attitude de l’Iran se dégrade considérablement, notamment au détriment du personnel diplomatique suisse à Téhéran, cf. DDS 1991, doc. 62, dodis.ch/59676 et la compilation thématique Affaire Sarhadi (1991–1992), dodis.ch/T2013.↩
- 10
- Cf. le rapport politique No 4 de l’Ambassadeur de Suisse à Téhéran, Anton Greber, du 5 mars 1991, dodis.ch/59664.↩
- 11
- Cf. la notice Problème Kurde du Secrétariat politique du DFAE du 16 janvier 1991, dodis.ch/58443.↩
- 12
- Cf. la notice de Pierre Helg de la Direction des organisations internationales du DFAE du 28 octobre 1988, dodis.ch/57267, p. 8 s.↩
- 13
- Sur la politique frontalière de la Turquie, cf. par exemple le rapport politique No 1 de l’Ambassadeur de Suisse à Sofia, Michael von Schenck, du 24 juillet 1989, dodis.ch/54686.↩
- 14
- Sur le discours officiel de la Suisse quant à la population kurde, cf. DDS 1991, doc. 3, dodis.ch/58521, et le PVCF No 641 du 9 avril 1991, dodis.ch/57573.↩
- 15
- Cf. les deux notices de Jean-Daniel Vigny, Chef de section du Service des droits de l’homme du DFAE, respectivement du 25 et du 27 mars 1991, dodis.ch/58681 et dodis.ch/58682.↩
- 16
- Pour la suspension des exportations de matériel de guerre vers la Turquie, cf. le PVCF No 74 du 17 janvier 1991, dodis.ch/57349. Pour les réactions turques, cf. le rapport de fin de mission de l’Ambassadeur de Suisse à Ankara, Adolf Lacher, du 27 février 1991, dodis.ch/58366. Sur la question de l’asile et de l’examen des demandes de personnes provenant de Turquie, cf. DDS 1991, doc. 3, dodis.ch/58521 et doc. 4, dodis.ch/54707, point 10.↩
- 17
- Sur la question des groupes d’activistes politiques kurdes en Suisse, cf. également DDS 1991, doc. 55, dodis.ch/57983, pp. 10–12 et annexe 3.↩
- 18
- En effet, la suspension s’applique également aux pays de la péninsule arabique, cf. dodis.ch/57793.↩
- 19
- Sur les négociations de l’accord entre l’AELE et la Turquie, cf. la notice du 5 janvier 1991 de Josef Doswald, Conseiller d’ambassade de la Mission suisse auprès de l’AELE et du GATT à Genève, à l’Ambassadeur Silvio Arioli, Délégué du Conseil fédéral aux accords commerciaux, dodis.ch/57552, ainsi que la proposition du 20 février 1991 du DFEP, p. 12, dodis.ch/57730, PVCF No 394 du 27 février 1991.↩
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