Unterredung Petitpierres mit dem rumänischen Gesandten: Erörterung der hängigen Fragen zwischen den beiden Ländern, insbesondere der Sperre der rumänischen Vermögen und der Nationalisierungen.
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 17, doc. 97
volume linkZürich/Locarno/Genève 1999
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2800#1990/106#152* | |
Old classification | CH-BAR E 2800(-)1990/106 21 | |
Dossier title | Roumanie : Gaston Boeuve, Mihail Magheru, Dimitri Oltéanu (1947–1958) | |
File reference archive | 342.50 |
dodis.ch/5400 Notice du Chef du Département politque, M. Petitpierre1 LONG ENTRETIEN DE PLUS D’UNE HEURE AVEC M. MAGHERU, MINISTRE DE ROUMANIE.
M. Magheru rentre de Bucarest, où il a fait un court séjour. Il est enthousiasmé par le changement qui s’est opéré dans son pays depuis qu’il l’avait quitté il y a cinq mois. On sent l’action de forces nouvelles, le retour à un équilibre. Les affaires se développent dans le domaine industriel et agricole. Il a assisté à une fête organisée à l’occasion du millième tracteur fabriqué par une des grandes usines de Roumanie. Dans le domaine de la culture également, on sent un renouveau puissant. M. Magheru insiste sur le fait que cette renaissance est due essentiellement à l’aide soviétique et à celle d’autres pays, comme la Tchécoslovaquie, qui fournissent à la Roumanie les matières premières et les machines dont elle a besoin.
Nous abordons ensuite les questions en suspens entre les deux pays.
1. Affaire Vitianu 2. M. Magheru demande que nous examinions cette affaire en comparant ce pourquoi M. Vitianu a été arrêté et le résultat de l’enquête dont il a été l’objet. Il trouve étrange que des plaintes aient été portées contre lui par des particuliers. Le Ministre paraît être renseigné sur le fait que l’enquête n’a pas donné les résultats qu’on en attendait3.
2. Blocage des avoirs roumains et envoi d’une délégation en Suisse.
Le Gouvernement roumain est décidé à ne pas négocier sous pression. Une délégation ne viendra pas en Suisse avant que le blocage ait été levé4. Cela, de l’avis du Gouvernement roumain et du Ministre, serait contraire à la dignité et à l’honneur de la Roumanie. Ceux-ci préfèrent donc subir les inconvénients de ce blocage, dont par ailleurs ils demandent la levée, le considérant comme injustifié.
M. Magheru a fait une petite enquête personnelle à Bucarest. Il est arrivé à la conclusion que le Conseil fédéral n’a pas été renseigné comme il aurait dû l’être par sa Légation. En effet, l’avis que la délégation prévue viendrait en Suisse avait été donné par le Gouvernement roumain à notre Légation plusieurs jours avant que le blocage ait été décidé à Berne5. En même temps, la Légation avait été informée du payement de certains arriérés dus par le Gouvernement ou par la Banque nationale de Roumanie6. Quand M. Magheru a discuté avec MM. Zehnder et Troendle7, ceux-ci n’étaient pas renseignés sur ces faits, qui, s’ils avaient été connus, auraient engagé le Conseil fédéral à renoncer au blocage.
De même, pour un visa de transit sollicité pour un diplomate roumain devant se rendre à Londres, à Berne on avait informé la Légation de Roumanie que le visa était accordé. Or celui-ci, jusqu’à présent, n’a pas été délivré par la Légation. Ce diplomate doit porter le nom de Macaresco.
3. Séquestre demandé par la Princesse Elisabeth. Cette princesse, sœur du roi Carol, a eu une partie de ses bijoux séquestrés en Roumanie. Elle a obtenu à Zurich, en se fondant sur ce fait, un séquestre sur les avoirs de la Banque nationale de Roumanie en Suisse. Cette mesure est incompréhensible pour M. Magheru, qui voit dans les différentes décisions prises à l’égard de son pays une volonté plus ou moins délibérée de ne pas faire ce qu’il faut pour entretenir de bonnes relations avec la Roumanie8.
4. Nationalisations9. M. Magheru affirme que les Suisses dont les biens ont été nationalisés en Roumanie seront indemnisés10. Les indemnités seront prélevées, le moment venu, sur un fonds constitué par les bénéfices réalisés par les entreprises nationalisées. Ce fonds se constitue assez rapidement. Depuis qu’elles ont été nationalisées, la plupart des entreprises ont amélioré leur productivité et augmenté leur production. On peut donc envisager que les propriétaires dont les biens ont été nationalisés recevront satisfaction. Ce problème des nationalisations a été mis de côté par d’autres pays, comme la Belgique, et laissé à l’écart des pourparlers commerciaux.
P[olitique voudra bien examiner les différentes questions soulevées11, de manière que moi-même12 ou M. Zehnder nous puissions revoir M. Magheru d’ici dix ou quinze jours. D’ici là, une décision aura pu être prise dans l’affaire Vitianu.
J’ai convenu cet après-midi avec M. de Rham qu’une conférence13 aurait lieu le plus rapidement possible avec le Ministère public et le Juge d’instruction fédéral pour tirer cette affaire au clair et préparer une proposition à l’intention du Conseil fédéral14.
- 1
- E 2800(-)1990/106/27.↩
- 2
- Solvan Vitianu, commerçant roumain et conseiller économique désigné de la Légation de Roumanie à Berne, a été arrêté en juillet 1948 et soupçonné d’espionnage économique et d’activités interdites en faveur d’un pays étranger, cf. E 2001(E)1967/113/133 (dodis.ch/5682) et E 2300Bukarest/14 (dodis.ch/5683). Cf. aussi E 2001(E)1967/113/133-138 et E 4110(A)-/ 34/51.↩
- 3
- Au sujet des activités d’espionnage des légations des pays de l’Est, cf. DDS, vol. 17, doc. 38, doc. 54 et doc. 100.↩
- 4
- A ce sujet, cf. la lettre de P. A. von Salis à A. Zehnder du 9 août 1948, E 2200.15(-)1970/ 74/11 (dodis.ch/6761): Enfin, vous [DPF]m’informez ne pas pouvoir accepter que le gouvernement roumain se dérobe à son obligation d’envoyer une délégation économique à Berne avant le 15 août. Si sa réponse à ce sujet n’était pas satisfaisante, vous envisagez de me rappeler à Berne pour rapport. Je comprends fort bien que la Division du Commerce ne s’accommode pas, en ce qui la concerne, de la mauvaise foi et de la malhonnêteté des Roumains qui consistent à profiter du cas Vitianu pour ne pas envoyer une délégation économique à Berne. Cette issue était prévisible, même sans cas Vitianu, car la reconnaissance de dettes en vieux lei et leur transfert créera un précédent pour les autorités roumaines qu’elles aimeraient évidemment, dans la mesure du possible, éviter. Je pense personnellement que même sans cas Vitianu nous aurions eu toute la peine du monde à convaincre le gouvernement roumain de venir négocier à Berne; je pense aussi que, même si l’on arrivait à un accord en la matière, nous rencontrerions des difficultés énormes pour son application pratique.↩
- 5
- Cf. PVCF No 1938 du 20 août 1948, E 1004.1(-)-/1/496.En vertu de cet arrêté, qui complète l’arrêté précédent du Conseil fédéral du 12 juillet 1946 [cf. PVCF No 1826 du 12 juillet 1946, E 1004.1(-)-/1/471], tous les paiements à effectuer de Suisse en Roumanie devront être acquittés auprès de la Banque Nationale Suisse. […]Cette mesure, qui a un caractère exceptionnel et provisoire, s’est avérée nécessaire pour la défense des intérêts suisses, gravement lésés en Roumanie. Cf. le communiqué du 20 août 1948, E 2802(-)1967/ 78/10 (dodis.ch/6800). Cf. aussi E 2800(-)1967/60/20 (dodis.ch/5685).↩
- 6
- Cf. la lettre de P. A. von Salis à A. Zehnder du 11 août 1948, E 2200.15(-)1970/74/11.↩
- 7
- Non retrouvé.↩
- 8
- A ce sujet, cf. E 2001(E)1967/113/781.↩
- 9
- Cf. DDS, vol. 17, doc. 14. Au sujet des nationalisations, cf. aussi la notice de H. Kaiser du 24 octobre 1947, E 2001-07(-)1970/349 (dodis.ch/1735), la notice du 9 décembre 1947, E 2001-07(-)1970/349 (dodis.ch/1739), et la lettre de l’Association des Suisses en Roumanie au DPF du 1er novembre 1947, E 9500.2-04(A)1970/356 (dodis.ch/1955).↩
- 10
- Un accord d’indemnisation entre la Suisse et la Roumanie sera conclu le 3 août 1951, fixant une indemnité globale de 42,5 millions de francs suisses. Cf. RO, 1951, pp. 829 ss.↩
- 11
- J. de Rham écrit le 26 octobre 1948 (date incertaine) une notice à l’intention de M. Petitpierre sur ces questions, cf. E 2001(E)1967/113/133.↩
- 12
- M. Petitpierre rencontrera à nouveau M. Magheru le 21 janvier 1949. Cf. la notice sur l’entretien. Non reproduit.↩
- 13
- Cette conférence a en effet eu lieu, cf. la notice de J. de Rham du 20 octobre 1948, E 2001(E)1967/113/133 (dodis.ch/6801): Etant donné ce qui précède, il ne reste en définitive qu’à adopter une attitude absolument ferme à l’égard de la Légation de Roumanie et à lui faire comprendre que nous avons la quasi certitude que Vitianu sera finalement condamné pour délit politique à une peine sérieuse et qu’au surplus l’affaire étant actuellement uniquement de la compétence des autorités judiciaires, une intervention de notre part n’est plus possible.↩
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