Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 15, Dok. 286
volume linkBern 1992
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E2001D#1000/1553#684* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 2001(D)1000/1553 65 | |
Dossiertitel | Comité français de libération nationale (Anerkennung) (1943–1945) | |
Aktenzeichen Archiv | B.15.11.2 • Zusatzkomponente: Frankreich |
dodis.ch/47890 Le Délégué du Conseil fédéral à Paris, E. Schlatter1, au Chef du Département politique, M. Pilet-Golaz2
J’ai l’honneur de vous faire savoir que j’ai été reçu aujourd’hui par M. Georges Bidault, Ministre des Affaires Etrangères et que je lui ai posé diverses questions concernant les représentations diplomatiques réciproques franco-suisses, qui ont fait l’objet de nos conversations lors de mon récent séjour à Berne.
J’ai été fort étonné de constater qu’il semble y avoir eu une erreur regrettable de transmission imputable soit à M. Vergé, soit aux fonctionnaires du Quai d’Orsay, concernant les intentions de la Suisse en cette matière. En effet, M. Bidault avait l’impression que la Suisse demandait au Gouvernement Provisoire de la République Française d’envoyer à Berne un Ambassadeur, mais que la Confédération ne serait représentée à Paris que par un Chargé d’Affaires. M. Bidault d’ailleurs, s’empresse de dire qu’il croyait qu’il s’agissait d’une erreur, et j’eus vite fait de dissiper ce petit malentendu.
J’ai expliqué au Ministre des Affaires Etrangères que la Suisse attachait une très grande importance à sa représentation diplomatique en France et que, par conséquent, la question de la désignation d’un ministre plénipotentiaire à Paris faisait actuellement l’objet d’un examen approfondi des autorités fédérales; celles-ci tenaient par ailleurs à maintenir en cette question un parallélisme aussi complet que possible avec l’attitude observée par les autorités françaises en ce qui concerne les représentations diplomatiques respectives. M. Bidault dit que dès que la Suisse aurait, par la nomination d’un ministre à Paris affirmé nettement sa reconnaissance du Gouvernement Provisoire de la République Française, le Gouvernement français s’empresserait de demander à son tour l’agrément pour un ambassadeur à Berne. M. Bidault, en effet, considère que la désignation de chargés d’affaires ne correspond pas à l’importance que doivent revêtir nos missions diplomatiques. Il s’empresse d’ailleurs d’ajouter que ma personne ne soulevait aucune objection quelconque de sa part, et qu’il était au contraire très heureux de me voir à Paris. Je fus cependant frappé par le fait qu’il ne souffla mot de la demande d’agrément qui a été faite par le Département Politique pour ma désignation en qualité de chargé d’affaires en pied à Paris.
Je profitais de l’occasion pour demander à M. Bidault s’il estimait que M. Walter Stucki, qui avait été en son temps accrédité auprès du Président Lebrun comme Ministre de Suisse en France, pourrait le cas échéant, reprendre ses fonctions à Paris. La réponse immédiate de M. Bidault fut un non net et catégorique. Malgré toute l’admiration et le respect que le Gouvernement Français a pour M. Stucki et la magnifique attitude qu’il a observée pendant les jours critiques à Vichy, il paraît à M. Bidault absolument exclu de recevoir auprès du Gouvernement Provisoire de la République Française, un diplomate qui a exercé ses fonctions auprès d’un Gouvernement composé de traîtres à la France et qui seront châtiés pour leurs actes. D’ailleurs, Mgr. Valério Valeri, Nonce du Pape, qui est venu de Vichy à Paris, n’est pas reconnu comme représentant du Saint-Siège auprès du Gouvernement Provisoire, malgré les demandes instantes du Pape. M. Bidault m’a donné l’assurance que jamais l’agrément ne serait donné à Mgr. Valério Valeri, mais qu’au contraire, on demandait qu’il quitte la France le plus rapidement possible. Comme vous voyez, la position du Ministre des Affaires Etrangères dans cette question était on ne peut plus catégorique, sans équivoque possible, et j’ai l’impression que rien ne pourra le faire changer d’avis.
J’ai enfin demandé que le GPRF ne tarde pas plus longtemps à accorder l’autorisation aux représentations diplomatiques à Paris d’utiliser le chiffre dans leurs correspondances télégraphiques. Quand j’ai commencé à parler de cette affaire, M. Bidault a levé les mains au ciel et m’a affirmé que c’était pour lui aussi bien que pour tout le Gouvernement Français une situation impossible. Les autorités militaires alliées continuent à faire obstruction dans cette affaire et refusent le passage aux télégrammes chiffrés, même à des représentants de pays comme la Chine et d’autres nations alliées. M. Bidault est donc d’accord avec moi qu’il s’agit là d’un scandale et il m’affirme qu’il emploie toute son énergie à remédier à cette situation intenable, aussi bien pour le Gouvernement français que pour les missions diplomatiques accréditées auprès de lui.
En attendant que les démarches du Ministre des Affaires Etrangères soient couronnées de succès, M. Bidault me propose la procédure suivante: un télégramme chiffré avec mon chiffre serait accepté par le Ministère des Affaires Etrangères en vue de transmission à Londres où le message sera délivré tel quel à notre Légation qui se chargera de le faire parvenir à Berne. Le Ministre s’excuse des ennuis dont nous sommes victimes «pour autant que le Gouvernement français en est responsable». Je remercie M. Bidault de sa compréhension dans cette affaire et exprime l’espoir que la mission diplomatique suisse pourra bientôt jouir de tous les privilèges auxquels elle peut prétendre4.
- 1
- A la suite de la décision du 31 octobre (cf. No 275), le Conseil fédéral prend acte, lors de sa séance du 10 novembre, de la désignation par le Gouvernement français de J. Vergé comme Chargé d’A ffaires de France à Berne et adresse à E. Schlatter les lettres de créances qui l’accréditent en tant que Chargé d’Affaires de la Confédération Suisse auprès du Gouvernement provisoire de la République française (lettre du 10 novembre, E 2001 (D) 3/65, cf. lePVCF ° 1949 du 10 novembre 1944, E 1004.1 1/451).↩
- 2
- Lettre: E 2001 (D) 3/65.↩
- 3
- ;Le 8 novembre, E. Schlatter adresse à la DAE duDPFun rapport sur la visite du 4 novembre du Général König, Commandant militaire de la Place de Paris. Lors de cette visite officielle, le Général König a exprimé son opinion sur l’incorporation des F.F.I. dans l’armée régulière, sur les responsabilités de Pétain, sur l’épuration: De nouveau, au cours de cette guerre, les classes supérieures de la société auront donc en France perdu de leur prestige. Comme après la dernière guerre, elles seront obligées d’abandonner une partie de leurs privilèges. [...] ( E 2300Paris/92). ↩
- 4
- Le 10 novembre, E. Schlatter adresse une autre lettre au sujet de cet entretien et sur la difficile désignation d’un représentant de la Suisse en France. Il écrit notamment à Pilet-Golaz: En tous cas, l’homme que vous désignerez à ce poste doit aussi bien pouvoir tenir compte des susceptibilités extrêmes des Français que du complexe de supériorité des Anglo-Américains à Paris. [...] (E 2809/1/4).↩
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