dodis.ch/47001
Le Chargé d'affaires de Suisse au Caire,
A. Brunner, au Chef de la Division des Affaires étrangères du Département politique,
P. Bonna1
Le Caire, 27 février 1940
Plusieurs Suisses rentrés dernièrement en Egypt e, après avoir accompli leur service militaire dans notre pays, se sont présentés chez moi et m’ont dit que les Autorités militaires compétentes en Suisse les auraient priés de leur fournir tous les renseignements d’ordre militaire qu’ils pourraient obtenir dans leur rayon d’activité en Egypt e. On leur a dit de se mettre en relation avec moi avant d’entreprendre quoique ce soit.
Vous pouvez facilement vous imaginer que l’Egypt e, carrefour des peuples européens, asiatiques et africains, transformée depuis la guerre en camp militaire, héberge des éléments douteux et enclins à toute affaire d’espionnage ou de contrebande. Les autorités anglaises, en étroite collaboration avec les autorités égyptiennes, ont commencé à jeter un filet serré sur l’Egypte pour éviter les fuites nombreuses des renseignements confidentiels qui se sont produites ces derniers temps. Le contrôle policier sur les étrangers et la censure de leur correspondance sont de plus en plus sévères. Tout mouvement qui n’entre pas dans l’activité ordinaire d’une personne est considéré comme suspect et souvent suivi d’une expulsion soi-disant administrative sans mentionner les raisons.
J’ai conseillé donc à tous les Suisses munis des instructions du Département Militaire Fédéral de s’abstenir de toute activité d’informations afin de ne pas compromettre leur avenir ainsi que la bonne renommée de la Colonie suisse en Egypt e.
Par contre, je suis prêt à fournir au Département Militaire Fédéral tous les renseignements pouvant l’intéresser sans risquer de compromettre nos compatriotes, surveillés de près par les autorités ainsi que par des concurrents jaloux.
Je vous prie d’informer le Département Militaire Fédéral de ce qui précède dans le sens que vous jugerez utile.