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Documenti Diplomatici Svizzeri, vol. 10, doc. 262
volume linkBern 1982
Dettagli… |▼▶Collocazione
Archivio | Archivio federale svizzero, Berna | |
▼ ▶ Segnatura | CH-BAR#E2200.41-04#1000/1676#12* | |
Vecchia segnatura | CH-BAR E 2200.41-04(-)1000/1676 2 | |
Titolo dossier | Conférence de Washington (1933–1933) | |
Riferimento archivio | I-C-16 |
dodis.ch/45804
Le nouveau coup de barre de la politique des Etats Unis2 a provoqué un désarroi au Quai d’Orsay et dans de nombreux milieux français. J’apprends que M. Herriot, accablé par les informations venant de Washington, a télégraphié de l’«Ile-de-France»3 à Paris, pour demander «pourquoi le Quai d’Orsay ne l’avait pas prévenu!». On considère, généralement, la brusque décision du Président Roosevelt comme un coup de Jarnac et on a de la peine à comprendre comment, quelques heures avant que le premier ministre britannique et un représentant du Gouvernement français, qui peut être assimilé à un président du conseil, - ayant, en effet, exercé ces fonctions et paraissant appelé à les assumer à nouveau4 - ne débarquent sur le sol américain, tout l’ordre du jour de la Conférence de Washington ait pu être renversé. M. Massigli, Directeur-adjoint des Affaires politiques et commerciales, qui a déjeuné aujourd’hui chez moi, a exprimé l’avis que la Conférence devrait être renvoyée. Des échos analogues, venant de différents pays, expriment un sentiment qui éclate de plus en plus. En tout état de cause, les objectifs immédiats que MM. Mac Donald et Herriot se proposaient d’atteindre s’éloignent toujours davantage.
J’ai eu aujourd’hui avec un régent de la Banque de France un long entretien portant sur toute la situation et sur les répercussions financières que le volte-face de la politique monétaire des Etats-Unis peut avoir sur les intérêts de pays à monnaie saine comme le nôtre.
Voici quelques points que nous avons abordés au cours de notre conversation et qui me paraissent être de nature à vous intéresser:
1° En présence des mesures subitement prises à Washington et qui ne sont peut-être qu’une nouvelle phase de la partie formidable jouée entre Londres et Washington5 - les Etats à monnaie saine ont un intérêt primordial à se concerter pour éviter une course générale à l’abîme. Vous voyez que mon interlocuteur voit la situation sous des couleurs extrêmement sombres.
2° Plusieurs personnalités étrangères sont déjà venues à Paris prendre contact avec le Gouverneur de la Banque de France dans un moment où le franc français paraît encore un rempart de l’étalon-or. Je vous suggérerais donc de vouloir bien examiner s’il n’y aurait pas intérêt à proposer à M. le Président Bachmann, de notre Banque nationale, de se mettre également en relations avec M. Moret6.
3° Les Etats dont la collaboration financière paraît indispensable pour opposer un bloc aux attaques futures contre l’étalon-or sont, outre la France et la Suisse, la Belgique et les Pays-Bas dont la devise, malgré certaines atteintes, est encore saine. En outre, mon interlocuteur estime que l’Angleterre, bien qu’elle ait abandonné Pétalon-or7, pourrait faire partie de ce bloc du moment qu’elle pratique une politique monétaire dirigée fondée sur l’or. J’ai demandé quel serait le rôle de l’Allemagne dans cette nouvelle combinaison. Mon informateur m’a répondu que, pour le moment, on ne s’en occupait pas.8
4° Ce rapprochement dans le domaine monétaire ne pourrait guère se concevoir sans un rapprochement parallèle entre les mêmes pays dans le domaine économique. Nous en reviendrions ainsi au projet exposé jadis par M. Schulthess à M. Tardieu, au cours de l’année dernière, et, plus récemment, à M. Serre, l’actuel Ministre du Commerce9.
L’idée de ce rapprochement semblait s’affaiblir au cours de ces derniers jours, vu les espoirs que les récentes nouvelles parvenues d’Amérique avaient fait naître à Paris. En effet, le Président Roosevelt faisait connaître son intention de demander à bref délai au Congrès de lui accorder en matière de négociations commerciales des pleins-pouvoirs lui permettant d’une part de négocier au cours de la Conférence Economique de Londres un traité unilatéral10 tendant à la réduction générale de tous les tarifs douaniers, et d’autre part, de négocier séparément avec les différents Etats des traités bilatéraux impliquant une réduction des droits de douane américains allant jusqu’à 50% des taux actuellement en vigueur.
Des négociations commerciales avec les Etats-Unis auraient peut-être entraîné la Grande-Bretagne sur la même voie et amené par là un rapprochement économique entre la France, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis. La récente dévaluation du dollar est de nature à modifier profondément ces projets et ces espoirs.
En effet, à l’heure actuelle, la France peut se trouver obligée11 d’un moment à l’autre, si la dévalorisation de la monnaie américaine devait s’accentuer, à prendre des mesures de défense vis-à-vis des Etats-Unis pour entraver l’afflux sur le territoire français des marchandises américaines importées au bénéfice de l’écart des changes. Ces mesures de défense se traduiraient très probablement par l’institution d’une surtaxe compensatrice de change qui indisposerait fort le Gouvernement de Washington. La Grande-Bretagne elle-même serait vraisemblablement obligée de recourir à des moyens analogues.
Toutefois, je dois constater en terminant qu’en ce qui nous concerne, l’idée d’un rapprochement économique ne semble pas encore inspirer la politique commerciale de la France à notre égard. En effet, d’après les renseignements que je viens de recueillir auprès du Ministère du Commerce, la Commission des Accords Commerciaux se serait prononcée hier au soir en faveur d’une nouvelle démarche auprès du Conseil fédéral afin d’obtenir la déconsolidation des droits de douane liés dans la Convention de commerce franco-suisse du 8 juillet 192912 Je ne serais, cependant, pas surpris si les événements qui viennent de se produire aux Etats-Unis avaient pour conséquence d’ajourner encore toute décision définitive concernant la dénonciation de cette convention13.
- 1
- Lettre (Copie): E 2200 Paris 6/2.↩
- 2
- 1.L’abandon, le 19 avril, de Vétalon-or.↩
- 3
- Sur invitation personnelle de Roosevelt, le Ministre des Affaires étrangères, Paul-Boncour, a délégué Herriot à Washington pour y discuter des questons économiques avec le Président américain et le Premier Ministre anglais Mac Donald. Le 17 avril, Herriot a quitté la France à bord du paquebot «Ile-de- France».↩
- 4
- Depuis décembre 1932, lorsqu’il avait dû démissionner en tant que Président du Conseil, Herriot n’avait plus occupé de charge ministérielle. Il présidait à l’époque la Commission des Affaires étrangères de la Chambre.↩
- 5
- Cf. rcos 86 et 213.↩
- 6
- Un entretien entre Bachmann et le Gouverneur de la Banque de France devait effectivement avoir lieu le 22 mai suivant. Cf. la notice du Chargé d’affaires à Paris, P. Ruegger, du 23 mai 1933: Communication de M. de Stoutz A l’occasion d’un entretien qu’il a eu hier avec M. Bachmann, M.de Stoutz a rappelé la question d’une coopération éventuelle des Etats à monnaie saine en vue de la Conférence de Londres. M. Bachmann a eu, à Bâle, des conversations à ce sujet avec MM. Moret, gouverneur de la Banque de France, Trip, de la Banque d’émission néerlandaise et Franck de la Banque d’émission belge. L’intérêt d’une coopération a été reconnu, cependant M. Moret a paru désireux de ne pas avoir l’air de préjuger les conversations anglo-américaines en cours en vue d’une stabilisation de fait des monnaies anglo-saxonnes. Aucune entente précise n’a été envisagée jusqu’ici, malgré le désir de toutes les personnalités interrogées par M. Bachmann de voir se créer un front unique à Londres en matière financière (E 2200 Paris 6/2).↩
- 7
- Cf. no 102.↩
- 8
- Cependant, dans sa lettre du S mai suivant au Département politique, Dunant écrivait: [...] Le Régent de la Banque de France, avec lequel je demeure en contact, m’a dit que l’on paraît actuellement disposé à rechercher aussi une coopération financière plus étroite avec l’Allemagne. [...] ( E 2200 Paris 6/2).↩
- 9
- Sur les discussions entre Schulthess et Tardieu en mars 1932 cf. no 163, AI. L’entretien Schulthess- Serre ne semble pas avoir laissé de traces dans les dossiers des Archives fédérales.↩
- 11
- Correction manuscrite sur l’original: amenée.↩
- 12
- 11.Cf no 366, n.2.↩
- 13
- Sur la dénonciation de la convention de commerce franco-suisse, cf. nos 280 et 292.↩
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Conferenza economica e monetaria di Londra (1933)
Svalutazione del franco svizzero del 1936 e abbandono internazionale del sistema aureo