Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 10, doc. 237
volume linkBern 1982
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001C#1000/1533#2344* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(C)1000/1533 99 | |
Dossier title | Affaire Firstermacher Alberto (1932–1933) | |
File reference archive | B.46.12.2 • Additional component: Italien |
dodis.ch/45779
Nous avons l’honneur d’accuser réception et de vous remercier vivement de votre lettre du 24 de ce mois2 par laquelle vous avez bien voulu nous rendre compte de l’entretien que vous avez eu le même jour avec M. Suvich, sous-secrétaire d’Etat au Ministère italien des affaires étrangères, au sujet des menées d’agents italiens au Tessin.
Nous vous sommes reconnaissants d’avoir su invoquer tous les arguments opportuns pour amener le Gouvernement italien à nous donner, à brève échéance, une assurance formelle dans le sens que nous désirons et qui impliquerait l’abandon par la police d’un système illicite et parfaitement intolérable sur notre territoire. Nous n’avons, en revanche, pas constaté sans regret l’écart qui semble exister entre les dispositions du Gouvernement et, notamment, du Ministère des affaires étrangères et celles de la police italienne.
Ainsi que nous l’avions exposé dans notre lettre du 16 janvier déjà3, la tâche du Chef du Département fédéral de Justice et Police d’écarter le recours présenté au nom de Pacciardi sera grandement facilitée si nous recevons tout prochainement l’assurance que nous sommes fondés à réclamer de la part du Gouvernement italien. A cet égard, les événements intérieurs des derniers jours nous obligent à hâter encore dans la mesure du possible les déclarations que nous attendons du Gouvernement de Rome. Vous n’ignorez point les pressions qui sont exercées de la part de nombreuses personnalités tessinoises pour que le Conseil fédéral renonce à la ligne de conduite qu’il s’est tracée dans l’affaire Pacciardi en poursuivant un but d’apaisement général. Le Conseil d’Etat tessinois, invité à exprimer son avis sur le recours de Pacciardi, se prononcera sans doute en faveur d’une prolongation du permis de séjour de cet agitateur. Il ne faut pas se dissimuler que le Conseil d’Etat du canton du Tessin subit lui-même les répercussions d’un état d’esprit qui a été malheureusement alimenté par les agissements de la police italienne sur territoire suisse. Il importe donc que le Gouvernement de Rome, qui se rend sans doute compte des nécessités de l’heure, ne tarde point à nous déclarer formellement qu’il mettra fin aux menées de sa police. Seule une pareille déclaration serait de nature à apaiser les esprits et à rendre plus facile une décision définitive dans l’affaire Pacciardi. Tout en appréciant les paroles qui vous ont été dites par M. Suvich et tout en ne méconnaissant aucunement les difficultés qu’il y a pour vous de recourir trop souvent au Chef du Gouvernement italien lui-même, nous nous voyons, dès lors, obligés - à moins que la réponse de M. Suvich ne vous parvienne incessamment - de vous prier de solliciter une nouvelle audience de M. Mussolini. L’importance de la question qui est en jeu et les derniers développements nous paraissent aujourd’hui justifier cette demande tendant à une conversation avec le Chef du Gouvernement, qui est en même temps Ministre des affaires étrangères. Ce contact immédiat nous paraît d’autant plus souhaitable que M. Mussolini, détenant aussi le portefeuille de l’intérieur, est sans doute seul en mesure d’exiger de la police, qui dépend de ce Ministère, de suivre les directives que nous le prions de donner dans l’intérêt des bonnes relations entre nos deux pays. L’extrême mansuétude dont il a été usé ici à l’égard des agents appréhendés sur notre territoire nous fournit un argument de plus - et dont la juste valeur sera dûment appréciée par le Gouvernement italien - pour obtenir des déclarations qui à la fois faciliteraient les efforts du Conseil fédéral et rendraient plus sereins les rapports entre nos populations frontières et celles du Royaume voisin.
Il va de soi que, si vous le jugez opportun, vous pourrez aviser aussi au préalable M. Suvich de nos nouvelles instructions. Quant à votre entrevue avec M. Mussolini, nous nous rappelons qu’il a toujours fait preuve, dans des moments critiques, d’une compréhension que nous sommes heureux de reconnaître. La teneur de votre conversation avec le Chef du Gouvernement sera évidemment analogue à celle de votre échange de vues avec M. Suvich. Nous nous en remettons à vous pour juger si, au cours de ce nouvel entretien, il conviendra de laisser à M. Mussolini un bref résumé des faits les plus flagrants que nous devons, à notre regret, reprocher à la police italienne.
Ajoutons, pour votre complète information, que le soussigné a saisi l’occasion d’un entretien qu’il a eu hier avec le Ministre d’Italie pour lui expliquer toute la situation et pour insister, de son côté aussi, sur l’absolue nécessité de recevoir sans délai les déclarations que nous demandons au Gouvernement italien.
P.S. Le Gouvernement tessinois a envoyé hier au Département de Justice et Police un recours en faveur de Pacciardi4.
Nous n’avons pas à nous prononcer ici sur cette démarche sur laquelle vous n’aurez pas de la peine à vous former une opinion, - mais nous pensons qu’elle ajoutera encore aux difficultés du Conseil fédéral.
L’opinion publique tessinoise semble assez divisée dans l’affaire.
Il importe que le Gouvernement italien comprenne son devoir - d’ailleurs évident - à notre égard.
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