Thematische Zuordung Serie 1848–1945:
III. BILATERALE BEZIEHUNGEN
12. Italien
12.1. Allgemeine Beziehungen
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 9, doc. 395
volume linkBern 1980
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2300#1000/716#904* | |
Old classification | CH-BAR E 2300(-)1000/716 396 | |
Dossier title | Rom, Politische Berichte und Briefe, Militärberichte, Band 28 (1928–1928) |
dodis.ch/45412
Der schweizerische Gesandte in Rom, G. Wagnière, an den Vorsteher des Politischen Departementes, G. Motta1
«Die Schreckensherrschaft in Italien». Ce titre, que je rencontre à chaque instant dans certains journaux suisses, est évidemment exagéré. En six ans de fascisme, il y a eu l’assassinat de Matteotti et quelques autres faits sanglants; il n’y a pas eu une seule condamnation à mort. Si l’on parle de «Schreckensherrschaft» pour l’Italie, de quels termes doit-on se servir pour la Russie?
Ce qui caractérise la situation actuelle en Italie, sous cet aspect extérieur d’ordre parfait qui frappe tous les voyageurs et que le Royaume n’avait jamais connu jusqu’ici, c’est un certain sentiment d’insécurité qui se manifeste en premier lieu dans le domaine financier. Malgré les comptes magnifiques du Ministère qui nous montrent les finances de l’Etat en parfait équilibre avec des résultats chaque mois plus satisfaisants, malgré la stabilisation de la lire, malgré les mesures du Gouvernement pour régler les prix des loyers, des denrées alimentaires, des hôtels et même des chaussures, l’opinion publique n’est pas rassurée; elle s’inquiète du lendemain; l’absence de contrôle et de critique au Parlement et dans la presse augmente ses appréhensions, d’autant plus que les Banques, qui ont de l’argent en abondance, limitent leurs crédits à des termes très courts.
La critique nécessaire du Parlement, si elle ne se manifeste pas dans les discours, apparaît dans le rapport présenté récemment par le député Tumidei, un spécialiste en matière financière, comme président de la Commission générale du budget. Les journaux n’en disent rien, mais j’ai le rapport sous les yeux et il est, avec toute la prudence voulue, d’une singulière éloquence. Les dépenses prévues au budget ont augmenté de plus de deux milliards en quatre ans; les paiements effectifs ont augmenté de quatre milliards. Le rapporteur conjure le Gouvernement de limiter ses frais. «Au moment, dit-il, où nous réalisons la stabilisation de notre monnaie, cette augmentation de dépenses ne peut et ne doit pas être maintenue. Autrement, l’Etat sera obligé de recourir à une forte augmentation des impôts.»
Inutile de relever que les milliards, il y a quatre ans, valaient beaucoup moins que ceux dépensés en 1928.
Ce rapport contient beaucoup d’autres observations qui laissent le lecteur perplexe et ébranlent sa confiance dans l’équilibre du budget de l’Etat.
Il est certain que la danse des milliards continue et augmente sans cesse d’intensité. 800 millions pour les assainissements agricoles, me disait l’autre jour le Ministre de l’Economie, au déjeuner offert au Congrès pour le contrôle des semences. Cinq milliards pour les travaux publics en cours; rien que pour la Sardaigne on a voté un milliard de travaux. Et chaque année des centaines de millions s’engouffrent dans les sables des Colonies.
A Rome, nous assistons à des travaux édilitaires, devant lesquels tous les régimes précédents avaient reculé pour raison d’économie: éventrements, larges avenues comportant d’énormes démolitions, transformation de la vieille ville en une cité moderne, moins pittoresque et plus aérée, mais au prix de formidables dépenses. Pour l’archéologie, les fouilles d’Herculanum, la mise au jour des anciens forums de Rome, on n’hésite devant aucun sacrifice; des quartiers entiers sont démolis.
Ajoutez les dépenses pour l’art, la reconstruction du somptueux opéra de Rome, les œuvres sociales, les subventions aux œuvres de délassement des ouvriers, à la presse, aux innombrables feuilles et revues fascistes, à tous ceux qui, sous couleur de patriotisme, exploitent la caisse de l’Etat.
Et je ne parle pas de ces expéditions aventureuses qui flattent l’amour-propre national. Celle de Nobile a déjà coûté 25 millions, d’après ce que m’a dit un soussecrétaire d’Etat; il faudra tripler ce chiffre pour la recherche des malheureux perdus dans les glaces et pour les indemnités aux familles en cas de mort.
Et toutes ces commémorations et toutes ces fêtes! C’est une agitation perpétuelle qui enrichit les cafetiers, mais grève la caisse de l’Etat. Dix mille ouvriers milanais transportés à Rome, cinq mille petites écolières venant, de tous les points de l’Italie, défiler devant le Duce, etc. etc. Pour la première fois, un journal ose lever la voix. Le Regime fascista, organe de Farinacci, écrit que les Italiens sont excédés de toutes les fêtes qui se succèdent à jet continu; «les cérémonies dominicales avec les défilés habituels, les saluts à la romaine et les discours sont devenus intolérables; les mêmes choses se répètent avec une asphyxiante monotonie. Le peuple préfère une journée de soleil à un discours...».
Et l’homme de la rue pense que tous ces discours et toutes ces fêtes, patriotiques, militaires, sportives, artistiques, organisées ou encouragées par le Gouvernement, doivent lui coûter très cher. Et ici encore il se demande d’où vient l’argent.
Il est du devoir de l’observateur impartial de noter ces inquiétudes d'ordre financier. Mais, je le répète, elles ne suffiront ni à renverser, ni même à ébranler le régime. Il est fort, très fort, et peut affronter les murmures de Tumidei et la fronde de Farinacci.
- 1
- Rapport Politique: E 2300 Rom, Archiv-Nr. 28.↩