dodis.ch/45396 Der schweizerische Gesandte in Paris, A. Dunant, an den Vorsteher des Politischen Departementes, G. Motta1
J’ai eu l’honneur de recevoir votre dépêche du 28 février 1928 relative à diverses intrigues ourdies au cours de ces derniers mois en vue de faire transférer deGenève à Vienne le siège de la Société des Nations2. C’est avec le plus vif intérêtque j’ai pris connaissance des informations recueillies à ce sujet par vos Services et je vous remercie d’avoir bien voulu me les communiquer.
Bien que la question dont il s’agit paraisse aujourd’hui enterrée et ne présente plus guère qu’un intérêt rétrospectif, vous ne jugerez peut-être pas inutile de recevoir les quelques renseignements que j’ai pu rassembler sur l’accueil que l’idée du transfert a reçu en France.
Tout d’abord, il vous intéressera sans doute d’apprendre que, d’après un de nos compatriotes qui occupe une situation assez importante au Secrétariat Général de la S.d.N., le Président du Conseil de Tchécoslovaquie aurait été, en Poccurence, le porte-parole et l’agent d’exécution du Chancelier autrichien. Le véritable promoteur de la tentative serait Mgr Seipel. M. Bénès lui aurait donné son concours en échange de contre-prestations dont on ne connaît pas très bien la nature exacte.
La presse française ne s’est guère occupée d’un transfert éventuel de la S.d.N. à Vienne. Deux journalistes interrogés à ce sujet par un de mes collaborateurs lui ont laissé entendre que si M. Bénès attachait beaucoup de prix à combler les vœux du Chancelier autrichien, il n’était pas impossible que ses desseins eussent rencontré une certaine sympathie auprès de M. Berthelot dont l’amitié avec l’homme d’Etat tchécoslovaque est bien connue.
Il n’en semble pas moins certain que dans les milieux diplomatiques français et dans l’opinion éclairée l’idée du transfert ne rencontre aucun écho3. Les divers personnages que nous avons pu interroger sont unanimes à déclarer que l’installation du Sécretariat Général sur les rives du Danube pourrait tout aussi bien favoriser que contrarier le rattachement de l’Autriche à l’Allemagne. A ce point de vue donc, le transfert ne présenterait pour la France aucun intérêt. Il offrirait, en revanche, le très sérieux inconvénient de transporter le centre de gravité de la Ligue dans une atmosphère germanique et dans un milieu de langue allemande. Si, donc, les intrigues de M. Bénès et de Mgr Seipel devaient être reprises par eux ou par d’autres, on peut espérer qu’elles susciteraient en France des résistances obstinées.