dodis.ch/44901 Aide-mémoire du Chef du Département politique,
G. Motta1
Visite de M. l’Ambassadeur Allizé à 4 heures.
Nous parlons de la question des Zones. C’est M. Allizé qui amorce la conversation.
Je lui explique que le Conseil fédéral n’a pas encore pris de décisions, mais que je considère avoir déjà fait au Gouvernement français la communication officielle du résultat du scrutin du 18 février soit par la conversation que j’ai eue le 19 février avec M. Allizé, soit par les conversations que M. Dunant a eues à Paris avec M. Laroche. J’explique en outre qu’il conviendrait de laisser se produire un certain apaisement dans les esprits avant de reprendre des négociations. Tel est aussi l’avis du Gouvernement de Genève et des négociateurs consultés dans la journée d’hier.2
M. Allizé me donne communication verbale d’une instruction qu’il a reçue de M. Poincaré. Il me lit le texte de cette instruction. Il en résulte ce qui suit:
a) Le Gouvernement français regrette le rejet de la convention. Son regret est d’autant plus grand que le vote du peuple suisse aurait eu le caractère d’une manifestation contre la politique générale de la France. Il est pénible que l’on ait réussi à tourner contre la France la grande majorité de ce peuple ami.
b) Le Gouvernement français estime avoir fait un effort loyal pour arriver à l’accord prévu par l’article 435 du Traité de Versailles. Il est disposé à reprendre la négociation, mais celle-ci ne pourrait avoir d’autre base que celle du transfert du cordon douanier à la frontière politique.
c) Le Gouvernement français attend, sans retard, des propositions éventuelles.
J’ai fait remarquer à M. Allizé qu’il serait impossible de reprendre la négociation sur d’autres bases que celle du maintien des petites Zones, – que si la France s’y refusait, il ne resterait aux parties d’autres voies que celles de l’arbitrage. J’ai exprimé la conviction que la France ne se serait pas refusée à cette voie, la seule qui puisse aboutir à un résultat satisfaisant. Si la France refusait cette méthode, il ne resterait plus comme ultima ratio que l’appel à la Société des Nations.
M. Allizé n’a, naturellement, pas pu se prononcer n’ayant pas d’instructions à ce sujet. Il a objecté cependant que la France ne pouvait admettre un arbitrage sur un article du traité de Versailles. J’ai tâché de lui montrer la faiblesse évidente de cet argument. Nous nous sommes quittés sans formuler des conclusions précises. J’ai averti simplement M. Allizé que le Conseil fédéral aurait poursuivi ses études d’information.