Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 8, Dok. 171
volume linkBern 1988
Mehr… |▼▶Aufbewahrungsort
Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#J1.1#1000/1392#41* | |
Alte Signatur | CH-BAR J 1.1(-)1000/1392 3 | |
Dossiertitel | Faszikel 14: Wirtschaftskonferenz von Genua, April/Mai 1922 (1920–1938) | |
Aktenzeichen Archiv | 06.14 |
dodis.ch/44813
Aujourd’hui vers midi, au reçu de Votre lettre du 2 courant2, relative à la Conférence de Gênes, j’ai immédiatement téléphoné au Ministre des Affaires Etrangères pour lui demander une audience. De midi et quart à une heure et quart j’ai eu avec lui une longue conversation, au cours de laquelle il m’a dit à peu près ce qui suit:
«Je vous remercie de la communication que vous avez bien voulu me faire. Sans être opposé, en principe, à l’échange de vues suggéré par votre Gouvernement, je l’estime prématuré. En présence du programme si vague de la Conférence, je ne saurais quelles questions pourraient être utilement discutées dès à présent. Peutêtre, à la fin du mois, verra-t-on plus clair et alors je serais éventuellement disposé à prêter la main à des pourparlers, mais ceux-ci ne devraient pas se faire sur toutes les questions possibles, entre tous les pays d’Europe restés neutres pendant la guerre et parce qu’ils sont restés neutres, mais seulement entre ceux d’entre eux qui seraient spécialement intéressés dans une certaine question bien définie à traiter par la Conférence, comme, par exemple, celle de l’étalon d’or, qui ne concerne en Europe, que la Suisse, les Pays-Bas et la Suède. Et encore faudrait-il avoir soin de prendre contact, sur cette matière, avec la Banque d’Angleterre, que j’ai déjà sondée à ce sujet et qui m’a recommandé d’attendre quelque peu. C’est précisément pourquoi, si cette question devait faire l’objet de pourparlers, je désirerais qu’elle fût traitée à La Haye, vu la proximité topographique et les relations financières étroites qui existent entre les Pays- Bas et la grande puissance monétaire que resprésente la Banque d’Angleterre.
A titre général, j’estime dangereux et nuisible de maintenir en temps de paix les distinctions faites entre Etats pendant la guerre. Je voudrais éviter que les Etats restés neutres continuassent à se considérer et à se gérer comme un groupe spécial. Les membres de ce groupe se discréditeraient ainsi aux yeux des anciens belligérants et leur position s’en trouverait considérablement amoindrie. Ce n’est donc certainement pas sous l’étiquette «d’anciens Neutres» que je désirerais voir les Pays-Bas, les Etats Scandinaves et la Suisse procéder à un échange de vues dès avant la réunion de la Conférence.
De ce point de vue, je regrette doublement que votre Gouvernement ait cru devoir saisir aussi l’Espagne de sa proposition et je me demande s’il ne lui serait pas possible d’arrêter cette démarche, soit de lui enlever sa portée. Il faut se défier de l’Espagne et vous pouvez être sûr que tout ce que vous lui confiez est immédiatement rapporté à Paris.
En réunissant en un faisceau les Etats neutres, ceux-ci risqueraient d’éveiller la suspicion des autres groupements, de heurter les uns et les autres et d’être ainsi exposés aux attaques des deux côtés. J’estime que l’attitude des petits pays neutres à la Conférence devrait s’inspirer de la plus grande retenue. J’ignore si j’irai moimême à Gênes, mais si je le fais, j’observerai la plus prudente réserve. Je serai là pour voir et écouter, mais je ne me mettrai jamais en avant.3 C’est la ligne de conduite que je me suis imposée à Washington et qui m’a fort bien réussi.4
A cet égard aussi, je ne vois pas bien, dès aujourd’hui du moins, l’utilité de la suggestion faite par votre Gouvernement. Il en serait autrement si les pays neutres avaient l’intention de faire des propositions communes; ils auraient alors à s’entendre entre eux pour les préparer, mais telle ne doit pas être, selon moi, l’attitude des pays dont il s’agit; en tout cas, ce ne sera pas celle des Pays-Bas.
Je crois qu’il est d’autant moins nécessaire de se prononcer définitivement dès maintenant que des renseignements que j’ai reçus de bonne source me font admettre que la Conférence sera ajournée encore et ne se réunira guère avant le 20 avril. M. Schanzer, à peine revenu de Washington, doit se mettre au courant et le dimanche de Pâques tombe sur le 16 avril.»
Voilà, grosso modo, ce que m’a exposé M. van Karnebeek et ce que j’ai tâché de résumer, à Votre usage, dans mon télégramme d’aujourd’hui, No .9.5 Je crois devoir ajouter que je partage entièrement l’opinion du Ministre des Affaires étrangères.6 Je serais particulièrement heureux s’il Vous était encore possible de faire abstraction de la démarche que Vous Vous proposiez de faire auprès de l’Espagne et, si elle est déjà faite, d’en atténuer les conséquences, en laissant ce pays en dehors des conversations à entamer éventuellement plus tard. Mon expérience me démontre, en effet, qu’il y a lieu de se défier de l’attitude de l’Espagne, qui s’efforce, par tous les moyens, de se mettre bien en cour auprès de l’Entente.
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