Classement thématique série 1848–1945:
X. QUESTIONS FINANCIÈRES ET COMMERCIALES
3. Nouveau tarif de douane suisse
Également: Le Chargé d’affaires ad interim d’Autriche-Hongrie se renseigne sur les conséquences du référendum contre le tarif des péages pour les négociations commerciales. Annexe de 5.6.1891
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 4, doc. 56
volume linkBern 1994
more… |▼▶Repository
Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2200.53-06#1000/1751#816* | |
Old classification | CH-BAR E 2200.53-06(-)1000/1751 118 | |
Dossier title | Österreichisch-schweizerische Verträge (1888–1891) | |
File reference archive | III |
dodis.ch/42466
Pour faire suite à ma lettre de ce matin2, je viens vous informer de deux faits intéressants dans la question du référendum contre le nouveau tarif:
1° La décision de la Ligue reçoit partout le plus mauvais accueil. Ceux des membres de l’Assemblée fédérale qui ont contribué à la prendre, même les Genevois, en sont fort ennuyés. L’idée se fait jour de reprendre en fait la proposition intermédiaire neuchâteloise repoussée hier, et de ne recueillir les signatures que conditionnellement, c’est-à-dire de ne les déposer que si les négociations n’aboutissent pas. C’est l’intention qui prévaudra sans doute à Neuchâtel et dans d’autres cantons, où les comités d’action feront très probablement une déclaration publique dans ce sens. Il est donc encore très problématique, non pas que les 30,000 signatures soient réunies, mais qu’il en soit définitivement déposé le nombre suffisant.
2° Tout à l’heure j’ai eu la visite du Prince de Wrede, chargé d’affaires ad intérim d’Autriche, qui venait s’informer de la situation après avoir lu les journaux annonçant la décision de la Ligue. Je lui ai dit qu’à mon avis, cette décision n’était pas de nature à exercer une influence réelle sur la marche de nos négociations. «Nous nous sommes présentés aux négociations», ai-je dit entre autres, «avec notre tarif de 1891 en déclarant que s’il n’était pas pris comme base, nous ne pourrions négocier. Les délégués austro-allemands ont fait remarquer qu’il était encore dans la période du référendum, mais ont néanmoins consenti à entrer en matière. Le fait que le référendum pouvait être demandé était donc prévu. Il n’est du reste pas encore certain que la demande aboutisse ou soit déposée. C’est essentiellement le canton de Genève qui a fait hier pression sur la Ligue, mais les autres cantons ne sont pas d’accord, et si une votation populaire devait avoir lieu, il est plus que probable que le tarif serait adopté à une très grande majorité.
Maintenant, de deux choses l’une, ou bien l’on continuera à négocier comme si cet incident ne s’était pas produit, ou bien l’on suspendra les négociations jusqu’après la votation populaire, c’est-à-dire jusqu’en automne. Je suis d’avis qu’il est dans l’intérêt des trois pays de continuer les négociations. Si l’Autriche et l’Allemagne croyaient pouvoir se prévaloir de la demande de référendum pour élever leurs exigences vis-à-vis de notre tarif, elles nous obligeraient peut-être à renoncer aux négociations jusqu’après la votation populaire éventuelle. Mais dans ce cas, nul doute que le peuple suisse se lèverait presque unanime pour sanctionner le tarif, et les concessions de notre part deviendraient plus difficiles.»
«– J’en suis persuadé», me dit M. de Wrede, «mais si nous continuons à négocier, quelle sera la situation après une votation populaire, soit qu’elle adopte, soit qu’elle rejette le tarif? N’en résultera-t-il pas une altération de notre traité de commerce?»
«– En cas d’adoption, il ne peut y en avoir aucune, puisqu’à la place du tarif, ce seront les droits conventionnels qui feront règle. En cas de rejet, les altérations que ces droits pourraient subir seraient tout en votre faveur, puisqu’à supposer que dans le tarif conventionnel à l’entrée en Suisse, nous eussions inscrit des droits supérieurs à ceux des tarifs de 1884 et 1887, qui sont en vigueur, ce sont ces derniers droits qui légalement chez nous seraient seuls applicables. Donc, vous en auriez l’avantage. Si le Reichstag allemand décidait aujourd’hui de fixer à 21/2 marks le droit sur les céréales, fixé, disent les journaux, à 31 /2 marks dans votre nouveau traité avec l’Allemagne, vous ne vous y opposeriez sans doute pas: les droits conventionnels sont des maxima qu’on s’engage à ne pas dépasser. Donc, le rejet du tarif suisse de 1891 pourrait peut-être vous être avantageux, mais en aucun cas désavantageux.»
«– Je vois très clairement la chose», répondit le Prince de Wrede.» Il me paraît comme à vous que nous ne devons pas nous inquiéter de cette demande de référendum. Au premier abord, elle m’avait paru de nature à entraver les négociations.»
«– J’aime à croire que ce ne sera le cas ni d’un côté ni de l’autre. A mon avis, la question ne doit pas avoir de portée internationale, elle en a seulement une intérieure pour nous, et même assez désagréable, car elle provoque une lutte dont nous nous serions fort bien passés.»
M. de Wrede m’a quitté en me disant qu’il ferait rapport dans ce sens à son gouvernement. J’ai tenu à ce que vous fussiez aussi au courant de cet entretien.
En ce moment, toute l’attention de mes collègues est dirigée vers le débat sur le rachat des actions du Central.3 Mais ceux que j’ai pu entretenir aujourd’hui de la question du référendum et de son influence sur nos négociations, partagent mon opinion.
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