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Documents Diplomatiques Suisses, vol. 3, doc. 175
volume linkBern 1986
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Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
▼ ▶ Cote d'archives | CH-BAR#E27#1000/721#23324* | |
Ancienne cote | CH-BAR E 27(-)1000/721 5125 | |
Titre du dossier | Franz. und ital. Festungsbauten an der Schweizergrenze, v.a. Berichte und Frage der diplomatischen Demarchen bei Frankreich (1876–1891) | |
Référence archives | 12.A.5 |
dodis.ch/42154 Der schweizerische Gesandte in Paris, J. K. Kern, an den Bundespräsidenten und Vorsteher des Politischen Departements, E. Welti1
Vous avez vu par mon rapport de ce jour2 relatif au chemin de fer du Simplon que M. le Général Farre et que M. Gambetta avaient parlé d’une autre question que j’avais cru devoir réserver pour un rapport spécial. Il s’agit de la construction de fortifications en Suisse. Je m’empresse de vous rendre compte de cette partie de mes entretiens avec ces messieurs.
I. Entretien avec M. le Général Farre.
M. le Ministre de la Guerre a pris l’initiative, après m’avoir fait part de sa première impression au sujet du percement du Simplon, de me parler «de l’agitation qui se fait en Suisse dans les cercles militaires et ailleurs sur la question des fortifications à la frontière franco-suisse». «Je puis vous assurer», a dit le Ministre de la Guerre, «que tous les ouvrages français élevés depuis 1870 sur la frontière francosuisse ont un caractère exclusivement et uniquement défensif. Aucun officier supérieur, en état de juger ces questions, ne pourrait songer à attribuer à ces forts un caractère offensif. Puisqu’on s’est placé en Suisse à propos de cette agitation sur le terrain de la possibilité d’une guerre entre l’Allemagne et la France, il me sera permis de dire qu’il ne pourrait pas être sensé de la part de la France de tenter une invasion de l’Allemagne par la Suisse. Quel intérêt la France pourrait-elle avoir à ajouter aux forces allemandes celles dont dispose la Confédération? Nous connaissons les forces de la Suisse, son patriotisme; non seulement nous ne pouvons pas avoir la moindre intention de violer, les premiers, sa neutralité, mais cela n’aurait pas de bon sens de superposer aux difficultés d’une guerre franco-allemande, les obstacles de toute nature, militaires et politiques que ferait naître la violation d’un territoire dont la neutralité est garantie par le droit public européen. J’irai même plus loin», a continué le Général Farre, «non seulement les nouveaux forts construits par nous à la frontière suisse n’ont aucun caractère offensif contre la Suisse, mais ils contribuent, à mon avis, à renforcer la neutralité de votre pays. Puisque nous raisonnons dans l’hypothèse d’une guerre franco-allemande, est-ce qu’il n’est pas préférable qu’on sache à Berlin que si une armée allemande essayait de traverser la Suisse et réussissait à franchir votre territoire elle rencontrerait à la frontière française des forteresses importantes? Il me paraît qu’on se rend compte en Allemagne du caractère défensif de ces forts, puisqu’on a pas créé de nouvelles défenses le long de la frontière entre la Suisse et l’Allemagne. Je tiens donc à vous répéter en terminant que [nous]ne pouvons pas songer à des ouvrages offensifs contre la Suisse, et j’ai tenu à profiter de cette occasion pour vous le dire.»
J’ai répondu à M. le Général Farre, qu’en décembre 1877 j’avais déjà eu l’occasion d’entretenir de cette question M. Waddington qui venait de prendre le portefeuille des Affaires Etrangères, et que M. d’Harcourt, alors Ambassadeur à Berne avait fourni au Conseil fédéral des explications tout à fait semblables à celles qu’il venait de me donner.3 J’ai ajouté que je n’avais reçu du Conseil fédéral ni communications, ni instructions à ce sujet depuis cette époque, en sorte que je devais m’abstenir d’aborder le fond même de la question. J’ai ajouté cependant que cette question des fortifications préoccupait en Suisse l’opinion publique et les cercles militaires à un plus haut degré aujourd’hui qu’à l’époque de mon entretien avec M. Waddington et de l’entretien de M. d’Harcourt avec M. le Président de la Confédération. J’ai fait observer que la Suisse dans tout ce qui touche à la défense de sa neutralité avait toujours su concilier les égards dus à tous ses voisins avec les besoins de sa sécurité et que le Conseil fédéral saurait en cette circonstance encore s’inspirer des mêmes sentiments, et j’ai terminé en disant à M. Farre que je ne manquerais pas de vous rendre compte de notre conversation.
II. Entretien avec M. Gambetta.
J’ai dit à M. Gambetta que M. le Général Farre, à l’occasion de notre entretien sur le Simplon m’avait aussi parlé de l’agitation qui se manifestait en Suisse à propos des fortifications. M. Gambetta avait déjà eu connaissance de cette conversation par M. Cérésole et a développé avec chaleur, et en manifestant des sentiments de vive sympathie pour notre pays, l’idée de M. le Général Farre, que les nouveaux forts français n’ont aucun caractère offensif et qu’il ne pourrait entrer dans l’idée d’aucun gouvernement français de violer le premier la neutralité de la Suisse et d’ajouter la résistance de l’armée suisse et des complications européennes aux difficultés d’une guerre franco-allemande. M. Gambetta a aussi répété que les nouveaux forts français étaient plutôt une sauvegarde de la neutralité suisse puisqu’une armée étrangère qui aurait réussi à la violer, serait certaine de rencontrer ce nouvel obstacle.
J’ai répondu à M. Gambetta dans le même esprit qu’au Général Farre.
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France (Autres)
Fortifications françaises dans la zone frontalière de la Suisse (1875–1937)