Thematische Zuordung Serie 1848–1945:
I. KIRCHENPOLITIK
1. Der Kulturkampf
1.3. Der internationale Kontext
1.3.1. Beeinflussungsversuche der Mächte
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 3, doc. 10
volume linkBern 1986
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E22#1000/134#1543* | |
Old classification | CH-BAR E 22(-)1000/134 306 | |
Dossier title | Berichte von Minister Kern in Paris sowie französische Zeitungsberichte betr. den Kirchenkonflikt in der Schweiz (1873–1873) | |
File reference archive | 4.05.01 |
dodis.ch/41989 Der schweizerische Gesandte in Paris, J. K. Kern, an den Bundespräsidenten und Vorsteher des Politischen Departements, P. Cérésole1
J’ai eu hier avec M. de Rémusat et avec M. Thiers, deux conversations importantes sur les conflits religieux en Suisse, & je m’empresse de Vous en rendre compte.2
I. M. de Rémusat recevait hier à l’hôtel du Quai d’Orsay les chefs de Missions accrédités à Paris. J’ai cherché à cette occasion à apprendre de lui quelque chose de plus que ce /gwe/m’avait dit M. Lanfrey, au sujet des démarches du parti clérical pour pousser le gouvernement français à intervenir contre le mouvement catholique-libéral en Suisse. J’ai introduit ma demande dans les termes suivants:
«Des renseignements provenant de sources différentes m’ont convaincu que ces démarches du parti clérical existent, sans cependant que j’aie pu arriver à en connaître les auteurs. Tout récemment, la neue freie Presse publiait la correspondance suivante, qui fait aujourd’hui le tour des journaux «on annonce que Mgr Nardi, envoyé confidentiel du Vatican, serait arrivé à Paris. Ce personnage, qui s’est immédiatement mis en rapport avec des personnalités éminentes, serait chargé d’une mission en Suisse. Le Ministre de France, M. Lanfrey, serait également parti pour Paris et il aurait été reçu lundi dernier par M. Thiers. L’entretien aurait naturellement roulé sur le conflit du clergé avec l’autorité fédérale et quelques cantons. D’après cette correspondance, la question prendrait des proportions inattendues et considérables». (Voir Suisse fédérative radicale du 23 Avril No 66).
«Cet article, reproduit par la presse suisse, ai-je continué, augmente l’agitation et provoque une méfiance qui ne facilite pas les bons rapports entre la France et la Suisse. Je me fais donc un devoir de Vous demander s’il y a quelque chose de vrai dans les bruits répandus, afin de pouvoir en informer mon Gouvernement.»
M. de Rémusat a répondu: «Je ne sais rien de cet envoyé du Vatican. C’est donc dans tous les cas une nouvelle fausse.»
Sur ma réplique: «Mais il y a eu cependant, je le sais (voir mon rapport sur ma conversation avec M. Lanfrey3)
des démarches de ce genre et il serait très intéressant pour le Conseil Fédéral de savoir si les auteurs de ces démarches sont suisses ou étrangers».
M. de Rémusat, après quelque hésitation, a répondu: «C’est Mgr Dupanloup, appuyé par quelques autres cléricaux, qui a adressé au Gouvernement, sous forme de pétition, un mémoire attirant l’attention du Gouvernement sur ce qui se passe en Suisse et sur la position des catholiques dans Votre pays. Ce mémoire, très bien rédigé, quoique contenant quelques exagérations, se base sur le fait que les traités annexant à la Suisse quelques paroisses sardes a garanti le libre exercice de la religion catholique.4 Par l’annexion de la Savoie à la France, cette dernière puissance succède aux droits du Roi de Sardaigne en tout ce qui concerne les obligations contractées par Genève et la Suisse envers les communes catholiques annexées; la France a donc un titre conventionnel qui l’autorise à intervenir.»
M. de Rémusat m’a communiqué les détails qui précèdent à titre tout à fait confidentiel, et attend qu’ils ne recevront pas de publicité. Comme Vous le voyez, ce mémoire ne parle nullement de Porrentruy, ce qui laisse place à la supposition qu’il est dû aux incitations de M. Mermillod, soit directement, soit par l’intermédiaire du Vatican.
J’ai immédiatement remercié M. de Rémusat de cette communication, en ajoutant: «Toute demande de cette nature, même sous la forme la plus adoucie et quels que soient les ménagements apportés dans la forme, susciterait le plus vif mécontentement en Suisse. Sous l’influence de l’esprit national, toutes les nuances d’opinion disparaîtraient, et tous y verraient une tentative d’immixtion dans nos affaires intérieures. La Suisse n’attaque nullement la religion catholique; elle se borne à défendre les droits de l’Etat contre les empiètements de Rome et contre les tendances du Vatican de placer l’obéissance à Rome au dessus de l’obéissance aux lois du pays. La Suisse et ses autorités n’ont subi aucune influence de la part de l’Allemagne ou de l’Italie; elles s’opposeront avec la plus grande fermeté à toute tentative d’ingérence dans ce que la Suisse considère comme les attributs de son indépendance, et celà de quelque côté que vienne cette tentative.» J’ai rappelé les conséquences de l’intervention française en 1847 en faveur des Jésuites & du Sonderbund, intervention qui a tourné au préjudice de ceux qui avaient essayé d’exercer une pression sur la Suisse. «Les ultramontains eux mêmes, regretteraient sûrement les suites des démarches qu’ils ont peut être provoquées, eux ou M. Mermillod, parce que ces démarches auraient sûrement un effet absolument contraire à celui qu’ils en attendent.»
M. de Rémusat m’a répondu qu’il comprenait toute la portée de mes appréciations, et que je devais être convaincu que le Gouvernement français réfléchirait mûrement et userait de la plus grande circonspection avant de faire une démarche dans le sens de la demande de l’Evêque d’Orléans. «Le Conseil des Ministres ne s’en est pas encore occupé. Il est possible, d’après ce que j’ai pu apprendre, qu’un certain nombre de membres du parti clérical, adressent au Gouvernement une interpellation lors de la rentrée de l’Assemblée Nationale le 19 Mai.»
J’ai répliqué que le fait seul de cette interpellation et des débats qui en seront la conséquence auraient déjà pour effet de froisser le sentiment suisse, très susceptible lorsqu’il s’agit d’immixtion de puissances étrangères dans les affaires intérieures, & que je devais répéter que cette manifestation irait contre le but de ses auteurs.
M. de Rémusat a terminé en exprimant, dans un esprit très bienveillant, et comme pensée entièrement personnelle, que l’intérêt de la Suisse même lui paraissait être d’user d’une prudence extrême dans tout ce qui touche ces délicates questions religieuses, d’autant plus délicates que la Suisse est un pays mixte. Je dois dire qu’il a employé les termes les plus réservés et les plus empreints de bon vouloir.
II. La certitude que j’avais acquise par mon entretien avec M. de Rémusat de l’existence de démarches du parti clérical auprès du gouvernement français m’a engagé à me rendre le soir même chez M. Thiers, qui reçoit tous les jours au palais de l’Elysée. Je tenais à confirmer directement au Président de la République ce que j’avais dit à 5 heures du soir à son Ministre des Affaires Etrangères, chez lequel j’étais resté près de 3/4 d’heure en conférence. J’ai expliqué et répété succinctement à M. Thiers ce que j’avais dit à M. de Rémusat; je l’ai fait dans le même esprit et en renouvelant les mêmes observations. J’ai terminé mon résumé en disant: «J’ai trop de confiance dans la haute sagesse du chef du pouvoir et de ses Ministres pour croire qu’ils se laisseraient entraîner à une intervention quelconque et sous quelque forme que ce soit, dans ces délicates questions. Les conséquences de cette immixtion pour les rapports entre les deux pays et pour les catholiques eux-mêmes ne peuvent pas Vous échapper».
M. Thiers m’a répondu aussitôt, avec une certaine vivacité, mais en baissant la voix (il y avait environ quarante personnes dans les salons): «Il n’y a pas eu jusqu’à ce jour de demande formelle d’intervention en faveur des catholiques en Suisse. Il y a eu seulement des lettres, dont le but était d’attirer l’attention du Gouvernement sur ce qui se passe en Suisse». M. Thiers n’a nullement indiqué la provenance de ces lettres, ce qui prouvait que M. de Rémusat n’avait pas encore pu lui faire part de notre conversation, qui avait eu lieu entre 5 et 6 heures au Ministère des Affaires Etrangères. Il ignorait donc que j’avais réussi à obtenir de M. de Rémusat, non sans une certaine insistance, communication de la démarche de l’évêque d’Orléans. N’étant pas certain que cette ouverture de M. Rémusat fut approuvée par le Président de la République, je me suis abstenu de dire à M. Thiers que je connaissais l’auteur du «Mémoire». M. Thiers a continué dans les termes suivants: «Je sais très bien à quoi visent les cléricaux dans leurs démarches auprès de mon Gouvernement. Mais on n’y réussira pas; je ne veux rien entendre de tout cela. Vous pouvez en être convaincu, et je Vous autorise à l’écrire à Votre Gouvernement.» – J’ai répliqué: «Ces cléricaux, qui attaquent le Conseil Fédéral et ceux des Gouvernements Cantonaux qui défendent les mêmes principes, ne sont pas non plus Vos amis». – «Je le sais bien» a ajouté M. Thiers. «Je ne m’étais donc pas trompé, ai-je continué, en Vous exposant, quelles conséquences aurait toute velléité d’intervenir dans cette affaire, sous quelque forme que se produise cette intervention, et je m’en réjouis sincèrement. Les bons rapports entre les deux pays dépendent de cette politique d’abstention et du respect de notre indépendance.»
Je me félicite d’autant plus de cette conversation avec M. Thiers que les antécédents du président de la République, ses discours sur le pouvoir temporel, comme aussi le langage d’un certain nombre de députés et la réserve dont M. de Rémusat ne s’est pas départi, ne me permettaient pas d’attendre une réponse aussi conforme au point de vue adopté dans cette question par le Conseil Fédéral.
J’avais l’intention de parler à M. Thiers de la Ligne d’Italie, mais avant que j’eusse pu aborder ce sujet est survenu Lord Lytton, Ministre d’Angleterre pendant le congé de Lord Lyons. M. Lytton venait présenter sa femme au Président, ensorte que j’ai dû me borner à dire à M. Thiers que j’espérais trouver prochainement l’occasion de lui faire quelques communications au sujet de la ligne du Simplon.
Je ne manquerai pas de le faire dès que les circonstances seront propices & celà dans le même sens que vis-à-vis de M. de Rémusat, dans mon entretien d’hier, sur lequel Vous trouverez plus bas des indications. – M. Thiers n’aime pas les audiences particulières. Ce fait est bien connu des membres du Corps diplomatique. Tout en dirigeant personnellement toutes les affaires jusque dans leurs détails, il préfère renvoyer les envoyés étrangers à ses Ministres. C’est pour celà qu’on ne demande une audience particulière que lorsque cela est absolument nécessaire. Même dans les audiences particulières, M. Thiers aime à se tenir dans les généralités, et évite d’en venir à la question même, ce que M. Lanfrey lui-même a éprouvé lors de son dernier séjour. – On est donc forcé de choisir, au milieu des réceptions habituelles du soir, un moment favorable pendant lequel M. Thiers n’est pas entouré, ce qui n’est pas toujours facile.– J’ai donc lieu d’être satisfait de mon entretien d’hier soir et de la déclaration faite spontanément par M. Thiers et d’un air bienveillant: «Je ne veux rien de tout celà. Vous pouvez écrire à Votre gouvernement, ce que je viens de Vous dire.» Il semble que M. Thiers n’a pas oublié les conséquences, pour le gouvernement de Louis Philippe, de l’intervention en faveur des Jésuites & du Sonderbund.
III. J’ai eu hier avec M. de Rémusat une longue conversation sur la ligne d’Italie.
J’ai exposé les motifs qui devraient engager le gouvernement français à ordonner d’office une enquête soit administrative soit judiciaire, sur l’état des finances de la compagnie, et sur la gestion de M. de La Vallette.
Je dois me réserver de faire sur ce sujet un rapport spécial5 qui partira lundi prochain, le temps me manquant aujourd’hui.
Je me bornerai donc à quelques détails sur ce que j’ai dit à M. de Rémusat sur la question des passeports & sur la mission de M. Ozenne.
IV. Passeports
«J’ai vu avec plaisir, ai-je dit au Ministre des Affaires Etrangères, que dans Votre dernière note du 22 Février6, Vous aviez reconnu que cette question s’était modifiée par suite de la suppression du passeport vis-à-vis de l’Allemagne. Les difficultés actuelles viennent donc du Ministère de l’Intérieur.
J’ai renouvelé vis-à-vis de M. de Rémusat les arguments développés il y a quelques jours vis-à-vis de M. de Goulard.7
M.de Rémusat a répété qu’en effet, le Ministère de l’Intérieur n’avait pu encore se décider à adhérer à la demande de la Suisse. M. de Goulard prétend qu’il existe des relations continuelles et des menées entre les réfugiés communards à Genève et les Français ou étrangers qui partagent leurs convictions à Lyon, à Marseille et à Grenoble.
Ces mots de M. de Rémusat ne laissent guère place à l’espoir de voir M. de Goulard renoncer à exiger la présentation de certaines pièces propres à constater l’identité des voyageurs.8
V. Mission de M. Ozenne.
J’ai dit à M. de Rémusat que, d’après ce que j’avais pu apprendre de M. Ozenne lui même, celui-ci se rendrait à Berne avant d’aller à Vienne pour y examiner la révision des traités de commerce.
M. de Rémusat m’a dit qu’il croyait en effet que tel était le projet de M. Ozenne.
J’ai répondu qu’il serait certainement agréable au Conseil Fédéral et au Département du Commerce d’être prévenu quelque temps à l’avance de l’arrivée de M. Ozenne, afin de pouvoir réunir les matériaux nécessaires pour pouvoir entrer en pourparlers avec ce fonctionnaire. J’ai ajouté que la question était fort difficile & extrêmement délicate pour le Conseil Fédéral, en présence de l’opinion libreéchangiste non seulement des autorités fédérales, mais du peuple suisse tout entier. J’ai donc prié M. de Rémusat de tenir compte de cette position tout à fait spéciale du pays que j’ai l’honneur de représenter. «Je comprends, a dit M.de Rémusat, qu’il ne sera pas très facile de s’entendre sur l’objet de la mission de M. Ozenne».
- 1
- Bericht: E 22/1543.↩
- 2
- \.Am22.4.1873 hatte Cérésole an Kern geschrieben: [...]M. Lanfrey m’a également informé du mauvais effet que produisent en France les conflits confessionnels qui divisent la Suisse. A ce propos, je prends la liberté de vous recommander encore, Monsieur le Ministre, de saisir les occasions favorables pour éclairer soit M. de Rémusat, soit M. Thiers sur le véritable caractère de ces conflits, sur les véritables auteurs de l’aggression et sur la position spéciale dans laquelle la Suisse se trouve placée. Vous pouvez insister sur l’effet désastreux que produirait, au point de vue & dans l’intérêt des catholiques suisses eux-mêmes, une apparence quelconque d’intervention ou seulement de pression de la part de la France. Vous pouvez ajouter que nous n’avons reçu et que nous ne recevrons aucune impulsion, ni aucune direction quelconque de la part de l’Allemagne ou de l’Italie, et que nous saurons maintenir à leur égard notre entière liberté d’action et d’allures si, ce qui n’a pas eu lieu jusqu’ici, on essayait d’agir sur nous, mais que nous n’accepterons pas davantage une ingérence quelconque de la part de la France. [...] ( E 2200 Paris 1/91).↩
- 4
- Vgl. Nr. 1, Anm. 17. Vgl. auch DDS 2, Nr. 443, Annex.↩
- 6
- E 21/15712.↩
- 7
- Vgl. Nr. 9.↩
- 8
- Vgl. Nr. 12, Anm. 5.↩
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