Classement thématique série 1848–1945:
I. RELATIONS BILATÉRALES
I.2. Autriche
I.2.3. Affaires du Tessin
Imprimé dans
Documents Diplomatiques Suisses, vol. 1, doc. 177
volume linkBern 1990
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Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
Cote d'archives | CH-BAR#E2300#1000/716#692* | |
Titre du dossier | Paris, Politische Berichte und Briefe, Militärberichte, Band 6 (1853–1853) |
dodis.ch/41176
J’ai eu l’honneur de voir hier M. l’Ambassadeur d’Angleterre et M. le Ministre des Affaires étrangères. La dernière note de l’Autriche a été le sujet de notre entretien.2
J’ai cherché à faire ressortir ce que cette note renfermait d’exorbitant, tout en déclarant que j’exprimais une opinion personnelle, le Conseil fédéral m’ayant fait connaître qu’il n’avait pris encore aucune résolution.
L’ambassadeur met un grand intérêt à ce que vous ne brusquiez rien et surtout à ce que les relations ne soient pas interrompues. Il reconnaît que l’engagement absolu de renvoyer les réfugiés sur la simple désignation de l’Autriche est incompatible avec l’indépendance, mais il pense que vous pourriez répondre comme vous l’avez fait à M. Turgot l’année dernière3, en ajoutant que vous examinerez toute réclamation avec impartialité, qu’en exécution de vos propres arrêtés, il n’y aura point de réfugiés italiens dans les cantons des Grisons et du Tessin et en rappelant qu’il est admis en Suisse, sans contestation, qu’un réfugié abusant du droit d’asile doit être renvoyé. Il regrette les exceptions en faveur de 11 réfugiés et il estime que vous ne devriez pas hésiter à leur fixer un autre lieu de résidence en Suisse.
L’ambassadeur admet la probabilité que l’Autriche cherche à entraîner le cabinet des Tuileries dans sa politique à l’égard de la Suisse, mais il ne doute point du désir de la France de ménager un arrangement.
M. le Ministre des Affaires étrangères s’est montré plus sévère. Je présume que dans l’intérêt de la conciliation il est exigeant envers la Suisse, dans l’espoir de se faire mieux écouter du cabinet de Vienne.
M. Drouyn de Lhuys m’a rappelé que, dès son entrée en fonctions, il m’avait parlé de l’importance que devait mettre la Suisse à éviter tout sujet de plainte de la part de ses voisins; qu’il valait mieux prévenir ces plaintes que de les subir; que la Suisse avait peu tenu compte de ces conseils, dictés cependant par la pure bienveillance et que maintenant presque tout le monde se tournait contre elle.
Le ministre trouve les demandes de l’Autriche raisonnables et telles que la France pourrait les formuler; qu’elle ne fait elle-même aucune difficulté de renvoyer des réfugiés que les gouvernements étrangers lui signalent comme dangereux et que M. le Ministre de la Police générale venait de renouveler la défense de laisser séjourner les réfugiés dans le voisinage des pays dont ils se sont éloignés.
Je lui ai répondu qu’autre chose était de prendre des mesures spontanées et par l’effet de la bienveillance, ou de se lier par un engagement aussi absolu que celui dont il s’agit et notamment de subir un contrôle comme l’Autriche le propose.
M. Drouyn de Lhuys m’a fait observer qu’il était de toute justice que des réfugiés ne soient pas tolérés à l’extrême frontière, que ce principe était admis partout et que l’Autriche demandait l’éloignement de la Suisse de ceux seulement qui auraient violé le droit d’asile en participant notoirement à des menées révolutionnaires. M. Drouyn de Lhuys a d’ailleurs paru réserver le droit de représentation et d’examen.
Il a ajouté qu’il tenait à l’indépendance de la Suisse, mais qu’il ne la trouvait point engagée dans cette circonstance, et qu’il ne pourrait par conséquent nous soutenir dans une résistance à de légitimes prétentions.
On envisage ici généralement que le droit d’examen est toujours sous-entendu alors qu’un gouvernement adresse une demande, et c’est aussi à ce point de vue qu’on ne trouve pas la dernière note exagérée. M. le Directeur politique des Affaires étrangères que j’ai eu l’honneur de voir ensuite est tout à fait de cet avis, et il estime qu’il va de soi que l’Autriche aura à indiquer ses motifs et que le Gouvernement fédéral pourra les apprécier.
La demande d’un contrôle ne prête pas à une interprétation aussi bénigne; cependant on m’a fait observer qu’il était demandé comme accessoire et non d’une manière absolue; que le Conseil fédéral avait à en fixer le mode, et que c’était à lui à juger s’il devait accepter une négociation sur ce chef.
Je ne dois pas négliger de vous dire que le ministre a reconnu que, d’après son appréciation personnelle, le Conseil fédéral a loyalement et pleinement rempli ses devoirs dans le Tessin, et il a ajouté qu’il l’a fait observer à Vienne.
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