Imprimé dans
Documents Diplomatiques Suisses, vol. 1, doc. 62
volume linkBern 1990
Plus… |▼▶Emplacement
Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
Cote d'archives | CH-BAR#E2#1000/44#424* | |
Titre du dossier | Verwendung für die kriegsgefangenen Schweizerbürger in Rastatt (1849–1850) | |
Référence archives | B.253 |
dodis.ch/41061 Le Conseil fédéral au Conseil national1
Par arrêté du 10 courant2, vous nous avez renvoyé une pétition de l’Association patriotique de Bâle datée du 8 décembre;3 nous avons l’honneur de vous communiquer à cet égard ce qui suit:
Les pétitionnaires appellent votre attention sur le sort des Suisses retenus prisonniers à Rastatt, puis ils déclarent ne pas vouloir examiner si le Conseil fédéral a fait des démarches dans le but d’obtenir leur élargissement et quelles sont ces démarches; toutefois ayant appris par des soi-disant déclarations du commandant de la forteresse qu’à la première réclamation de la part de la Suisse, l’élargissement des prisonniers aurait lieu, ils adressent au Conseil national l’invitation pressante de charger le Conseil fédéral de faire immédiatement les démarches convenables en vue d’obtenir la mise en liberté de tous les Suisses prisonniers à Rastatt.
Nous ne pouvons nous empêcher de faire précéder ici quelques observations sur le caractère particulier de cette pétition ou pour parler plus exactement, de cette réclamation; s’il y a plainte portée au sujet d’actes positifs ou de non accomplissement de devoirs du Conseil fédéral, c’est là un droit constitutionnel, et il est fort naturel que l’Assemblée fédérale nous requière de lui faire rapport pour aviser ensuite selon les circonstances. Mais il n’en est pas de même quand les auteurs de la pétition eux-mêmes viennent déclarer qu’ils ignorent et ne veulent pas examiner si le Conseil fédéral a fait quelque chose et ce qu’il a fait dans une affaire qui leur tient à cœur, et cependant, ils portent plainte devant le Conseil national.
En pareille circonstance, les pétitionnaires auraient plus convenablement agi en s’adressant directement au Conseil fédéral.
Passant à la chose elle-même, nous avons l’honneur de vous annoncer que nous n’avons cessé d’y vouer notre attention. Il ne saurait vous avoir échappé que dans les premiers temps, après la répression de l’insurrection, en présence d’une domination militaire absolue, des passions politiques dans toute leur violence, de l’irritation contre la Suisse et des enquêtes judiciaires poursuivies avec ardeur, il ne pouvait pas être question d’une intercession en faveur de la totalité des prisonniers avec une chance quelconque de réussite. Ce non-obstant, à dater de la mijuillet nous avons à diverses reprises intercédé par correspondance4 en faveur de quelques prisonniers pour lesquels on pouvait faire valoir des motifs de nature particulière, démarches qui n’ont pas toutes été infructueuses puisque quelquesuns d’entre eux ont été mis en liberté. Un peu plus tard, les circonstances permirent de faire encore des démarches ultérieures et plusieurs Suisses détenus à Rastatt réclamèrent notre intervention par lettre du 10 octobre.5 Nous nous empressâmes de déléguer M. le Colonel Stehlin en qualité de Commissaire fédéral à Rastatt et à Carlsruhe6, aux fins de s’enquérir personnellement du sort des Suisses prisonniers et de s’employer en vue d’obtenir un traitement plus doux et leur élargissement le plus prompt possible. Les réponses que M. le Commissaire reçut de divers membres du Ministère grand-ducal n’étaient pas défavorables et permettaient d’espérer que tous les prisonniers suisses non particulièrement compromis pourraient être relâchés dans un délai assez prochain. A Rastatt, M. le Commissaire obtint accès auprès d’eux, il s’entretint avec tous et dressa une liste de leurs noms. Il s’exprime dans son rapport7, sur leur position comme suit.
«Depuis quelque temps, tous les Suisses ont été transférés dans les casemates du fort où sont détenus seulement les Badois et les étrangers gravement inculpés; les prisons ne sont pas en mauvais état, mais ils manquent d’air, et comme les constructions sont de fraîche date, elles ne laisseront pas d’être humides lorsqu’on les chauffe. La nourriture est suffisante, tous les deux jours de la viande ou de l’eau de vie, soupe et légumes tous les jours avec l1/2 livres de pain. Les prisonniers doivent travailler journellement au tombereau ou à la pelle, et ont pour la plupart l’air bien portant; leur barbe et leurs vêtements font mal à voir. Ils n’ont pas osé se plaindre devant la garde; quelques-uns parlant français me dirent qu’ils avaient beaucoup à se plaindre; naturellement ils préféreraient être en liberté; je les consolai en leur faisant espérer que cela ne tarderait pas et je crus m’apercevoir que ma visite leur avait été beinfaisante. Plusieurs d’entre eux me connaissaient et je ne leur dissimulai point que ma mission à Rastatt était l’effet de la sollicitude du Conseil fédéral.»
A la réception de ce rapport, nous adressâmes sans délai aux cantons respectifs8 une liste des prisonniers, leurs ressortissants, afin que leurs familles ou leurs communes pussent leur faire passer des secours en vêtements. Enfin au commencement de novembre, nous nous adressâmes encore par écrit au Gouvernement du Grand-Duché de Baden pour solliciter la mise en liberté des Suisses prisonniers.9 Nous sommes demeurés sans réponse jusqu’à ce jour et l’élargissement n’a pas eu lieu. Il résulte ainsi de là que la prétendue déclaration du commandant, qu’il suffirait d’une seule réclamation de la part de la Suisse, ou n’a pas été prononcée, ou qu’il y a eu méprise, ou enfin que c’était un propos hasardé et dénué de fondement, et qui effectivement paraît d’autant plus énigmatique que le commandant de la forteresse aussi bien que les prisonniers ont dû inférer de la présence de M. Stehlin que le Conseil fédéral intervenait en leur faveur.
Comme dans la pétition on fait encore ressortir le fait que d’autres Etats ont réussi dans leurs démarches en vue d’obtenir l’élargissement de leurs ressortissants, nous répondrons qu’à en croire les paroles du Ministère badois, ces Etats ont offert de punir eux-mêmes leurs corps francs, offre que nous n’avons pu faire, attendu qu’à l’heure qu’il est, c’est encore aux cantons qu’il appartient de prononcer sur leurs ressortissants aux termes de leur législation.
Nous croyons avoir prouvé que, dans cette affaire, nous avons fait tout ce qu’il était possible de faire en pareille conjoncture et, joignant ici les actes y relatifs, nous terminons ce rapport en déclarant que nous ne négligerons à l’avenir rien de ce qui serait de nature à mener la chose à bonne fin.10
- 1
- Rapport (Copie): E 2/424.↩
- 2
- E 1001(C) d 1/2, no 588.↩
- 3
- Non reproduite.↩
- 4
- Notes du Conseil fédéral au Grand-Duché de Bade des 15 juillet, 8 et 31 août, 12 et 19 septembre 1849 (non reproduites).↩
- 5
- Non reproduite.↩
- 6
- Lettre du Conseil fédéral à J. J. Stehlin du 15 octobre 1849 (non reproduite).↩
- 7
- Du 24 octobre 1849, qui comprend une liste de 82 prisonniers (non reproduit).↩
- 8
- Circulaires des 30 octobre et 2 novembre 1849 (non reproduites).↩
- 9
- Lettre du 8 novembre 1849 (non reproduite).↩
- 10
- Le 20 décembre 1849, le Conseil national rendra l’arrêté suivanf.DerBundesrathseieingeladen, auf jede geeignete und zweckdienliche Weise seine eindringlichen Verwendungen bei der grossherzoglich badischen Regierung zur Befreiung der in Rastatt gefangenen Schweizerbürger fortzusetzen (E 1001(C) d 1/2, no 636b). Adopté par le Conseil des Etats le 22 décembre 1849 (E 1001(D) d 1/1, no 379). Les prisonniers seront libérés en avril 1850 (Cf. la note du Ministre des Affaires étrangères de Bade, F. A. Klüber, au Conseil fédéral du 4 avril 1850, E 21/79).↩
Tags
Révolution de Mars (1848–1849)