[Berne,] 26 septembre 1961
I. M. Hammarskjöld2 souhaitait certainement que l’Organisation des Nations Unies puisse devenir universelle. Il l’a laissé entendre à nos observateurs à plusieurs reprises. Il espérait donc qu’un jour la Suisse pourrait y adhérer. Il admettait cependant que le moment n’en arriverait que lorsque les problèmes de Chine et d’Allemagne seraient résolus et que ces deux pays seraient représentés aux Nations Unies. Ce jour-là, il aurait été disposé, quant à lui, à s’employer à trouver une solution constitutionnelle réservant entièrement la position particulière de la Suisse par rapport au chapitre VII de la Charte, c’est-à-dire à créer un «cas spécial» de la Suisse.
II. En attendant ce moment, M. H[ammarskjöld] respectait la position prise par le Conseil fédéral. En 1958, M. Soldati résumait ainsi son point de vue: «Il a confiance en la Suisse, pays non membre, et croit que la Suisse ne refuse pas sa confiance au Secrétariat général. Il constate en Suisse une compréhension positive pour les Nations Unies, et les Nations Unies n’ont que de l’estime pour notre pays. La situation présente est donc parfaitement satisfaisante pour les deux parties.»3
III. Il se louait d’autre part de l’excellente collaboration qui s’était instaurée entre son Secrétariat et notre pays. Il apprécia beaucoup la promptitude de notre appui lors de l’affaire de Suez,4 ainsi que nos contributions au rétablissement de la paix en Corée5 et au relèvement du sort du Congo.6 Il prodiguait des éloges au travail fourni par des Suisses tels que M. Zellweger au Laos7 et M. Umbricht au Congo.8
IV. Dans l’état actuel du monde et dans certaines circonstances particulièrement délicates, M. H[ammarskjöld] en était même venu à considérer utile l’existence d’un État à la fois neutre et non membre des Nations Unies.9 Il estimait par exemple que notre appui à son action en Égypte en 1956 avait nettement renforcé sa position morale.
V. M. H[ammarskjöld] avait d’excellentes relations personnelles avec M. Petitpierre et il était parfois heureux de pouvoir ouvrir son cœur à l’observateur suisse auprès des Nations Unies.