Langue: français
2003
Relations internationales, revue trimestrielle d'histoire, publiée avec le concours du CNRS, n° 113, printemps 2003.
Référence bibliographique (Bib)
Antoine Fleury: Introduction, pp. 3-7
Hervé Gullotti: Présence culturelle française en Suisse. L'exemple de l'Association suisse des conférences de langue française (1930-1950), pp. 9-26
Marc Perrenoud: Secret bancaire et politique étrangère de la Suisse (1932-1962) pp. 27-40
Damien Carron: Un contentieux franco-suisse: les Suisses dans la Légion étrangère (1946-1962), pp. 41-58
Dario Gérardi: Un aspect des relations économiques italo- suisses au XXe siècle: la Suisse et l'utilisation du port de Gênes (1914-1950), pp. 59-76
Eric Flury-Dasen: La Suisse et la Suède face au défi de la guerre froide: politique de neutralité, question allemande et mission en Corée, pp. 77-94
Mauro Cerutti: La Suisse et les États-Unis en Amérique latine à l'époque de la guerre froide: la crise du Guatemala de 1954, pp. 95-113
Sacha Zala: Publications sur les relations internationales de la Suisse parues depuis la fin de la Guerre froide. Notice historiographique, pp. 115-133
Jean-Claude Favez: Les publications de la Commission indépendante d'experts Suisse - Seconde Guerre mondiale. Note de synthèse sur les 25 volumes, pp. 135-143.

Résumés/Abstracts

H. Gullotti: Présence culturelle française en Suisse. L'exemple de l'Association suisse des conférences de langue française (1930-1950) (pp.9-26)
L'Association suisse des conférences de langue française (ASCLF) est un réseau de type institutionnel qui a participé depuis la fin de la Première Guerre mondiale à la pénétration culturelle française en Suisse. Organisme faîtier fondé au début des années trente pour répondre à une demande helvétique croissante en orateurs francophones, l'ASCLF a joué jusqu'aux années cinquante un rôle prépondérant dans l'organisation des tournées de conférenciers français, grâce à l'engagement de Léon Degoumois, professeur à l'Université de Berne. L'étude de l'ASCLF permet d'évaluer la marge de man¿uvre de la mission diplomatique française dans la gestion du flux des conférenciers faisant le voyage de la Suisse. Plusieurs variables ont rendu cette action culturelle relativement aisée: la concurrence des impresarii helvétiques dans l'organisation des tournées de conférences, le respect de la neutralité suisse, en particulier durant le second conflit mondial, et les options politiques des dirigeants de l'ASCLF, qui auront dans l'après-guerre un petit relent de Vichy.

French Culture in Switzerland
The Association suisse des conférences de langue française (ASCLF) is an institutional organization which facilitated the diffusion of French culture in Switzerland at the end of the first world war. This federative association was founded at the early 1930s due to the increasing demand for francophone speakers. The ASCLF was central up to the 1950s in the organization of conference rounds, thanks to the efforts of Léon Degoumois, professor at the University of Berne. The study of the ASCLF gives the opportunity to evaluate the extent to which the French diplomatic mission controlled the flow of speakers coming to Switzerland. Several parameters affected the ease of this cultural interaction: the competing tours organized by the Swiss impresarii, the regard to Swiss neutrality, particularly during the second world war, and the political options followed by the leaders of the ASCLF which had a slight post-war Vichy after taste.


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M. Perrenoud: Secret bancaire et politique étrangère de la Suisse (1932-1962) (pp.27-40)
Au cours du XXe siècle, la place financière suisse a bénéficié d'une expansion considérable qui a eu des effets importants sur la politique étrangère de la Confédération. Dès 1932, la fuite des capitaux attirés par les banques suisses provoque des tensions avec la France. Confirmé légalement en 1934, le secret bancaire occupe une importance centrale dans la politique étrangère de la Suisse, en particulier de 1943 à 1948 quand la Confédération est accusée d'avoir permis que les biens pillés par l'Axe soient vendus et dissimulés. La Guerre froide a mis une sourdine à ces reproches. Le secret bancaire fut accusé de favoriser la fuite des capitaux au détriment des Etats engagés dans la construction européenne. Considérées comme des menaces sur un pilier de la prospérité suisse, ces critiques fournirent des arguments pour une politique très réservée face à l'Europe.


Banking Secrecy and Swiss Foreign Policy (1932-1962)
During the last century, the Swiss financial sector enjoyed a rather big rate of growth which had an important effect on Swiss foreign policy. From 1932 on, the flight of capital attracted by Swiss banks lead to considerable tensions with France. Legally approved in 1934, banking secrecy played an important role in Swiss foreign policy, especially from 1943 to 1948 when Switzerland was accused of having sold and camouflaged assets looted by the Axis powers. With the beginning of the Cold War, accusations like these decreased and disappeared from the public agenda. Nevertheless, banking secrecy was criticized of favouring capital flight at the expense of the states engaged in building a European structure. Considered as a threat to a basic element of Swiss prosperity, these accusations contributed to a very reticent political attitude of the Swiss towards Europe.


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D. Carron: Un contentieux franco-suisse: les Suisses dans la Légion étrangère (1946-1962) (pp.41-58)
L'enrôlement des Suisses à la légion étrangère constitue un problème qui pèse lourdement sur les relations franco-suisses dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Cette réalité n'est pas nouvelle, puisqu'en 1910 déjà le Conseil fédéral en fait mention; elle atteint, avec les guerres coloniales menées par la France en Indochine d'abord, en Algérie ensuite, un degré de tension élevé. C'est surtout l'engagement par la légion de Suisses mineurs qui pousse les autorités suisses à réagir fermement. Elles se résignent, après avoir tenté sans succès de résoudre le problème par la voie juridique, à agir sur le plan intérieur en empêchant les jeunes citoyens de partir s'engager, tandis que la pression est maintenue par la voie diplomatique sur les autorités françaises. Les légionnaires suisses rentrés au pays sont jugés et condamnés pour avoir servi dans une année étrangère. Les archives de la justice militaire constituent pour l'étude de la guerre d'Algérie une source très intéressante. Certains légionnaires avouent lors de leur procès avoir dû participer à des actes de violence envers les populations autochtones. À plusieurs reprises, ces déclarations provoquent des réactions violentes de l'opinion publique suisse, poussant les autorités françaises à réagir.

Swiss Nationals into the Foreign Legion
Post-World War II Swiss-French relationships were greatly influenced by the enrolment of Swiss nationals into the Foreign Legion. Although this was indeed not new (the Swiss Federal Council mentioned it as early as 1910), tensions between the two countries grew further with the outbreak of the colonial wars led by France first in Indochina and then in Algeria. The Swiss authority was eventually forced to firmly react at the news that some Swiss minors were involved. It tried to first solve the problem through legal means (which proved unsuccessful), and later by applying domestic pressure on young Swiss citizens not to enlist; simultaneously, it applied diplomatic pressure on French authorities. Upon their return, Swiss legionnaires are tried and condemned for serving in foreign troops. Military justice archives thus represent a very rich kind of sources for the study of Algerian war. Some legionnaires' testimonies confirm that they were involved in violent acts towards autochthonous populations. On many occasions, such testimonies provoked violent reactions in the Swiss public opinion that forced French authorities to react.


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D. Gérardi: Un aspect des relations économiques italo- suisses au XXe siècle: la Suisse et l'utilisation du port de Gênes (1914-1950) (pp.59-76)
Situé à moins de 200 km des frontières helvétiques, le port de Gênes assume une importance particulière pour le ravitaillement de la Suisse en période de guerre ou de tension internationale. Ceci se vérifie lors des grandes crises du XXe siècle. Au cours de la Première Guerre mondiale, le trafic suisse par Gênes va plus que doubler par rapport à la situation d'avant le conflit, le port ligurien desservant près du tiers des importations totales de la Suisse. Lors de la Seconde Guerre mondiale, la situation se répète pour la Suisse, qui est confrontée à nouveau aux blocus des belligérants. Durant les premières années de la Seconde Guerre mondiale, c'est la quasi-totalité des importations suisses d'outre-mer qui transite par le territoire italien (85% entre 1940 et 1942). À chaque fois, d'importantes négociations sont nécessaires entre Rome et Berne pour régler la question du transit des marchandises en provenance ou à destination des pays d'outre-mer. C'est aussi le cas en 1950 avec l'ouverture des hostilités en Corée, où, dans le contexte de la Guerre froide, certains responsables envisagent la possibilité d'une nouvelle déflagration mondiale.

Switzerland and the Harbour of Genoa
Located at less than 200 km of the Swiss borders, the harbour of Genoa assumes a particular importance for the supply of Switzerland in period of war or international tension. This is checked at the time of the great crises of the 20th Century. During the First World War, the Swiss traffic by Genoa goes more than to double compared to the pre-war level, the Italian harbour serving about a third of the total imports of Switzerland. At the time of the Second World War, the situation is repeated for Switzerland, which is confronted again with the blockades of the belligerents. During the first years of the Second World War, it is almost the totality of the Swiss overseas imports which forwards by the Italian territory (85 % between 1940 and 1942). At each time important negotiations are necessary between Rome and Bern to settle the question of the transit of the goods in source or bound for the overseas countries. It is also the case in 1950 with the outbreak of the hostilities in Korea, where, in the context of the Cold war, certain persons in charge consider the possibility of a new world conflict.


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E. Flury-Dasen: La Suisse et la Suède face au défi de la guerre froide: politique de neutralité, question allemande et mission en Corée (pp.77-94)
La politique de neutralité et l'appartenance à l'Europe démocratique occidentale constituèrent la base d'un rapprochement plus actif entre la Suisse et la Suède après la Deuxième Guerre mondiale - même si la Suède défendait une politique extérieure plus pragmatique et plus active grâce à sa participation à l'ONU, au Conseil de l'Europe et au Conseil nordique. Les deux pays se sont informés sur les points de vue et les positions concernant des problèmes internationaux qui ont contribué à la formation de leur propre opinion (la politique allemande p. ex.). Ils se sont tenus au courant sur les tentatives de pression américaines; et dans certains cas, leurs attitudes et leurs réponses ont concordé (le commerce Est-Ouest). Finalement, ils ont adopté des démarches communes dans des situations où ils ont exercé tous les deux le même engagement en tant qu'Etat neutre (Mission des nations neutres en Corée). Dans la définition de sa politique extérieure, la Suède tenait une position de premier ordre aux yeux des autorités suisses.

Switzerland and Sweden and the Policy of Neutrality
The policy of neutrality and the self-image of being a democratic Western European state constituted the basis for an active relationship between Switzerland and Sweden after World War II - even if Sweden defended a more pragmatic and active foreign policy due to, her participation in the UN, the Council of Europe and the Scandinavian Council. The two countries briefed each other on their viewpoints and positions concerning international problems, which helped them reciprocally in the forming of their own opinion (i.e. the German problem). Furthermore, they informed each other of the United States' attempts to put pressure on the two countries, and in certain cases, their attitude and response corresponded (West-East Trade). Finally, they decided to take common steps in situations where they were sharing a common task as neutral countries (Neutral Nations Commissions in Korea). In regards to defining her foreign policy, Sweden held an extraordinary position in the eyes of the Swiss authorities.


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M. Cerutti: La Suisse et les États-Unis en Amérique latine à l'époque de la guerre froide: la crise du Guatemala de 1954 (pp.95-113)
Après un survol des rapports américano-suisses au début des années 50, et un rappel de la crise guatémaltèque - qui débouche en 1954 sur le renversement du président Jacobo Arbenz, suite à l'intervention des Etats-Unis -, l'article passe en revue les relations entre la Confédération et le Guatemala jusqu'à la conclusion de la crise. Alors que les intérêts helvétiques dans ce pays d'Amérique centrale sont très marginaux, les liens de la Suisse avec les Etats-unis sont très importants. Il s'agira donc essentiellement d'apprécier le regard que la diplomatie suisse dirigée par Max Petitpierre a su jeter sur ces événements, et son degré d'autonomie par rapport à la position officielle de Washington. L'ascendance helvétique du principal acteur de ce drame - Arbenz -, introduit cependant dans l'histoire un élément non dénué d'intérêt.

Swiss American Relations and the Guatemalan Crisis of 1954
After a brief survey of the Swiss-American relationships at the beginning of the fifties and a reference to the Guatemalan crisis, resulting in the overthrowing of president Jacobo Arbenz due to US intervention, the article reviews relationships existing between Switzerland and Guatemala until the end of the crisis. As Swiss interests in this Central American country were quite marginal but ties between Switzerland and the United States were very important, a major point consists in examining how Swiss diplomats, led by Max Petitpierre, actually judged those events, and how autonomous they were with regard to official US positions. An interesting element, however, is also given by the Swiss origin of the main actor in this drama, president Arbenz.
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