Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 20, Dok. 70
volume linkZürich/Locarno/Genève 2004
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E2001E#1976/17#3437* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 2001(E)1976/17 495 | |
Dossiertitel | Militärdienstpflicht der Schweizer in Israel (1948–1963) | |
Aktenzeichen Archiv | B.37.21.0 • Zusatzkomponente: Israel |
dodis.ch/12036
J’ai l’honneur de vous faire savoir que j’ai récemment pris connaissance du rapport de gestion pour l’année 1955 adressé par le Conseil fédéral à l’Assemblée fédérale. Avec étonnement et regret j’ai constaté qu’il contenait des indications précises sur le contenu de l’accord conclu entre le Ministère israélien des Affaires étrangères et moi-même au sujet des obligations militaires des Suisses habitant Israël2.
La publication de ces indications soulève tant de questions délicates – aussi pour moi personnellement – que j’estime qu’il m’appartient de vous entretenir de cette affaire.
L’accord en question entre la Suisse et Israël a été conclu, avec le consentement de votre Département, sous une forme un peu particulière. Les autorités israéliennes attachèrent en effet un grand prix à ne pas faire de concessions par écrit dans une affaire qui, à leurs yeux, revêt une grande importance. Du côté suisse on tient compte de ce désir et au lieu d’un échange de notes on se contenta d’une notice pour le dossier3 dont l’existence fut ultérieurement confirmée par une note du Ministère israélien des Affaires étrangères. Il est vrai que l’accord dont il s’agit n’a pas eu d’emblée un caractère strictement confidentiel en ce sens qu’il n’aurait dû être communiqué qu’aux seules autorités directement intéressées. Ainsi par exemple les compatriotes personnellement touchés par cet arrangement devaient être informés de son contenu. De ce fait, les pièces du dossier n’ont pas eu la forme de documents rigoureusement secrets. C’est pourquoi j’ai également renoncé à porter la mention «confidentiel» sur toutes les lettres adressées au Département à ce sujet. En revanche, il m’a paru qu’il ressortait clairement de la correspondance échangée avec le Département que le désir essentiel des autorités israéliennes était d’éviter que les termes de cet accord ne fussent fixés dans un document que d’autres Etats pourraient invoquer comme précédent et, partant, de nous faire des concessions que pour autant que celles-ci ne fissent l’objet d’aucune publicité. A ce propos, je me réfère notamment à mes lettres du 25 avril 1955 (milieu de la première page)4 et du 20 juin 1955 (2 e paragraphe de la deuxième page)5. De plus, si mon souvenir est exact, le Directeur général du Ministère israélien des Affaires étrangères6 m’a dit en son temps que lui aussi, lors de son passage à Berne, avait insisté sur le caractère confidentiel que la conclusion d’un tel arrangement devait comporter. De mon côté, à l’occasion de conversations que j’ai eues l’année dernière pendant mes vacances à Berne, j’ai également souligné cet aspect particulier de la question. Enfin, la forme particulière donnée à cet accord à la demande des autorités israéliennes et avec l’agrément du Département signifiait, à mes yeux, que les deux parties étaient tacitement tombées d’accord d’observer la plus grande discrétion. Cette interprétation était certainement aussi celle des Israéliens.
A la suite de la parution du rapport de gestion du Conseil fédéral, il est donc arrivé exactement ce que les Israéliens voulaient éviter. Les précisions que contient le passage incriminé et le fait qu’il figure dans un document officiel communiqué à toutes les missions diplomatiques accréditées à Berne, vont donner à tous les pays entretenant des relations diplomatiques avec Israël la possibilité de demander que des concessions de même nature leur soient faites.
Si encore les termes de ce passage étaient moins nets, les autorités israéliennes auraient au moins eu la possibilité de donner des réponses évasives ou d’éluder les questions gênantes.
Il est certain que le nombre des Etats qu’intéressera cette affaire sera grand. Un commencement de preuve m’en a été fourni hier. En effet, M. Westlake, premier secrétaire de l’Ambassade britannique, m’a fait savoir que l’Ambassade venait de recevoir une communication urgente de Londres qui se référait au passage du rapport de gestion dont il s’agit et que celle-ci attacherait un grand prix à connaître la manière dont je m’y étais pris pour obtenir ce résultat, étant donné que du côté britannique on a tenté en vain depuis des années d’aboutir à un arrangement semblable. Mon interlocuteur ajouta avec un sourire entendu que je serai étonné par le grand nombre de missions diplomatiques qu’intéresse cette question, vu que jusqu’à ce jour seuls les Etats-Unis et la Suisse avaient réussi à conclure un tel accord avec Israël et que l’arrangement intervenu avec les Etats-Unis est resté secret pour l’essentiel.
Je m’efforçai de répondre de manière vague à M. Westlake; mais le même soir déjà, au cours d’une réception, l’Ambassadeur britannique lui-même m’interpella à ce sujet et me rappela qu’il n’avait pas omis de toujours me communiquer ses «tuyaux» sur la situation politique et qu’il espérait dès lors que je ne le laisserai pas sans informations au sujet de l’accord en question.
Du côté des autorités israéliennes à Jérusalem, il n’y a pas encore eu de réaction. Je pense que l’absence du Directeur général du Ministère des Affaires étrangères qui se prolongera encore quelques semaines, en est la cause essentielle. L’intéressé fut mon principal interlocuteur au cours des négociations. Je suis cependant persuadé que de ce côté aussi on réagira. Vous comprendrez sans doute qu’il me sera d’autant plus pénible de répondre aux questions que l’on me posera vraisemblablement à Jérusalem que l’adjoint du directeur de la Division de l’Europe occidentale du Ministère israélien des Affaires étrangères s’exprima naguère en des termes que j’avais rapportés au Département comme suit dans ma lettre du 7 octobre 1955: «Die israelischen Zusagen haben den Charakter einer persönlichen Geste Ihnen gegenüber, indem sich das Aussenministerium angesichts Ihrer zahlreichen Besuche in dieser Angelegenheit davon überzeugt hat, dass Ihnen persönlich an der Regelung der Sache besonders viel gelegen war»7. En effet, ces négociations ont été menées exclusivement par moi et jamais par mon collaborateur diplomatique. Je n’ai donc même pas la possibilité d’invoquer l’erreur d’un collaborateur.
Il ressort de ce qui précède qu’à la suite de la publication du contenu de l’accord entre la Suisse et Israël sur le service militaire, je me trouve dans une situation très désagréable qui ne saurait rester sans conséquences sur le futur accomplissement de ma mission. Dans ces conditions, je vous serais reconnaissant de me faire savoir aussitôt que possible comment je dois répondre à toutes nouvelles demandes de l’Ambassadeur britannique et d’autres collègues et comment vous souhaitez que je réagisse aux représentations que très probablement les autorités israéliennes me feront8.
- 1
- Lettre (Urgent): E 2001(E)1976/17/495.↩
- 2
- Cf. RG CF, 1955, p. 143. Il y est écrit que: Depuis des années, le Département politique était en pourparlers avec le gouvernement d’Israël pour obtenir que les ressortissants suisses fussent dispensés d’accomplir le service militaire […]Au cours de l’année 1955, une solution a pu être trouvée qui, dans les circonstances actuelles, peut être considérée comme satisfaisante. Les principales dispositions de l’arrangement intervenu prévoient: 1. Que, dans un délai de six mois à dater de leur arrivée, les ressortissants suisses pourront quitter Israël s’ils n’y ont pas rempli d’obligations militaires; 2. Que les ressortissants suisses résidant en permanence en Israël pourront, s’ils le désirent, accomplir un service civil au lieu du service militaire.↩
- 3
- Cf. la notice du Ministère israélien des Affaires étrangères du 1er août 1955, non reproduit.↩
- 4
- Non reproduit.↩
- 5
- Non reproduit.↩
- 7
- Non reproduit.↩
- 8
- Cf. lettre de M. Petitpierre à F. Hegg du 13 juin 1956, cf. E 2001(E)1976/17/495 (dodis.ch/12674).↩