Mendès-France erklärt seinen Standpunkt betreffend die unvermeidliche Unabhängigkeit der kolonisierten Völker und der einheimischen Führer, welche sich durchsetzen müssen.
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 19, doc. 73
volume linkZürich/Locarno/Genève 2003
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
Archival classification | CH-BAR#E2300#1000/716#792* | |
Dossier title | Paris, Politische Berichte und Briefe, Militärberichte, Band 107 (1953–1953) |
dodis.ch/8528 M. MENDÈS-FRANCE ET L’INDOCHINE
Un de mes collaborateurs a eu ces jours l’occasion de rencontrer M. Pierre Mendès-France à une table où l’on discutait avant tout la question des relations entre l’Europe et l’Asie. J’ai l’honneur de transcrire ci-après à votre intention les principales déclarations de l’homme politique français:
D’après M. Mendès-France, tous les peuples sous domination européenne ont développé des mouvements nationalistes ou vont le faire prochainement. Ces mouvements seraient irrésistibles et il n’y aurait aucun moyen de s’y opposer. La tâche de la puissance coloniale serait de mettre en place à temps les cadres indigènes aptes à reprendre l’administration d’abord, puis le gouvernement, et qui jouissent – condition primordiale – de la confiance de leur peuple. Il est absolument inutile et néfaste de vouloir imposer des dirigeants indigènes choisis selon le goût de la puissance coloniale. En ce qui concerne l’Indochine, c’est exactement ce qui aurait été fait avec l’Empereur Bao Daï. M. Mendès-France a déclaré sans ambages que le régime actuel du Viêt-nam était entaché du péché originel d’avoir été choisi et imposé par la France. Selon lui, il n’existe aucune possibilité de voir le peuple se rallier à ce régime. J’ajoute que deux collègues français de mon collaborateur, travaillant à la direction d’Asie du Ministère des Affaires étrangères, qui assistaient à cet entretien, ont protesté vivement en faisant état des ralliements au régime Bao Daï qui se produiraient à un rythme assez encourageant. Ils ne purent ébranler la conviction de M. Mendès-France.
Interrogé sur la manière dont il fallait procéder pour choisir parmi plusieurs groupes alors que chacun prétendait parler au nom d’un peuple opprimé, l’homme politique français répondit que c’était une simple question de fait. Le groupe qui a le peuple derrière lui et qui a la force pour lui doit être reconnu; qui n’a pas l’influence voulue doit être négligé. Il déclara expressément qu’il serait vain de vouloir rejeter, pour des raisons idéologiques, tel groupe important en fait parce qu’il était, par exemple, communiste et ne cherchait pas à assurer la liberté et un avenir démocratique au peuple. Il n’y a, selon lui, que les seuls rapports de force qui comptent. Il a répété qu’on devrait laisser tomber sans autre Bao Daï pour négocier immédiatement avec Ho Chi Minh. Sans se laisser arracher des précisions à ce sujet, M. Mendès-France a quand-même laissé entendre qu’on devrait essayer de séparer les éléments purement nationalistes du Viêt-minh des communistes inféodés à Moscou. Cela est très joli sur le papier, mais serait certainement difficile sinon impossible en réalité.
A la question de savoir si la même acceptation réaliste des faits ne devait pas s’appliquer aussi au problème de la reconnaissance de la Chine communiste, M. Mendès-France a refusé de répondre.
Je vous ai fait connaître il y a quelque temps l’opinion de M. Pierre-Etienne Flandin sur M. Mendès-France2, – opinion somme toute assez négative –. Mon collaborateur a eu également l’impression d’un homme habitué à tirer des conclusions logiques jusqu’au bout de prémisses qui, bien entendu, peuvent être justes ou fausses, et à dire ses pensées même dans des cas où d’autres se tairaient. Mais ce courage a nettement des limites et M. Mendès-France n’a pas fait l’impression d’être un chef, mais plutôt un théoricien et un politicien, plus habile et plus original peut-être que la majorité d’entre eux. On dit que parmi les aveugles, les borgnes sont rois. M. Mendès-France sort nettement de la moyenne des politiciens de la IVe République sans que cela me semble suffire pour faire de lui un grand homme d’Etat.
- 1
- E 2300(-)-/9001/350.↩
- 2
- Cf. la lettre politique No 55 du 5 octobre 1953, non reproduite. M. Flandin, qui connaît M. Mendès- France de longue date, l’estime intelligent, d’une bonne formation économique mais d’une énergie purement verbale. Lui, comme les autres, aurait tendance à confondre discours et réalisations. A peu près toutes les réformes préconisées par le député radical resteraient sur le papier.↩
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France (Politics) Vietnam (Politics)