Également: Lettre du Consulat de Suisse à Madrid au Ministre d'État du Royaume d'Espagne du 2.7.1894 (annexe).
Printed in
Die Schweiz und die Konstruktion des Multilateralismus, Bd. 1. Diplomatische Dokumente der Schweiz zur Geschichte des Internationalismus 1863–1914, vol. 13, doc. 21
volume linkBern 2023
more… |▼▶Repository
Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
Archival classification | CH-BAR#E2#1000/44#209* | |
Dossier title | Schutz der Schweizer in Marokko durch Deutschland, Frankreich, Oesterreich, Spanien und den USA (1889–1894) | |
File reference archive | D.324.03 |
dodis.ch/63967
Le Consul général de Suisse à Madrid, Lardet, au Chef du Département des affaires étrangères, le Conseiller fédéral Lachenal1
[Protection des Suisses établis au Maroc]
Hier j’ai été appelé au Ministère d’État pour me communiquer la Note du Ministre d’Espagne à Tanger, se référant à la représentation de la Suisse au Maroc, dont il donna connaissance à ses Collègues, lesquels tous se félicitèrent, moins le Ministre de France, qui répondit qu’il en prenait acte, tout en faisant observer, qu’étant chargé de la protection des Suisses établis au Maroc, il ne se dépossédait pas de sa mission avant d’avoir des actes de Son Gouvernement, auquel il ferait rapport.
Il n’est nullement nécessaire de manifester la désagréable surprise que cela a causé à Monsieur le Ministre Moret, ainsi qu’à moi, ignorant complètement que les Suisses au Maroc se trouvaient sous la protection de la France et rien ne pouvait me faire supposer qu’il y eut une entente à ce sujet entre la Suisse et la France; bien au contraire, voyant que votre recommandé, qui était sous la protection de l’Autriche-Hongrie, se dirigeait à votre Département pour demander de le mettre sous la protection de l’Espagne:2 cela impliquait qu’il y avait une liberté complète pour les Suisses de se mettre sous le pavillon qui paraissait le plus convenable à leurs intérêts3 et étant de fait votre recommandé sous la protection de la France, pourquoi accéder à sa demande en le recommandant avec tant d’empressement pour le mettre sous la protection de l’Espagne, quand ce fait seul aurait toujours produit un froissement entre le représentant de la France et celui de l’Espagne?
Je vous remets copie de ma lettre du 2 Juillet au Ministre d’État, demandant que l’Espagne veuille bien prendre sous sa protection les intérêts des Suisses dans l’Empire Ibérifien.4
Il semble naturel, – que dans un pays comme le Maroc, où la Suisse n’a aucune représentation consulaire, et que dans aucun cas, quand j’ai eu l’honneur de vous écrire au sujet de la création d’un Consulat à Tanger, je n’ai eu aucune information me donnant à connaître que les Suisses se trouvaient sous la protection française, – que la demande que vous me chargiez de faire devait s’étendre, non pas à un cas isolé, mais que les Suisses établis au Maroc devaient être tous sous le même pavillon.
N’étant guère d’usage d’intervenir pour un seul individu, sans connaître les circonstances qui pouvaient obliger à cela, je me serais dirigé tout d’une autre manière pour l’accomplissement de la mission dont vous me chargiez, si elle ne devait pas avoir une portée plus étendue et aurais évité de froisser l’amour-propre du Ministre d’État, qui s’empressait de prouver sa sincère amitié pour la Suisse, en accédant immédiatement au désir manifesté, pour se trouver ensuite en face d’une protestation du représentant d’une Nation-amie, qui était déjà chargé de la même mission.
Vous serez déjà au courant de ce que je vous indique, parce que le Ministre de France à Tanger a communiqué à Son Gouvernement ce qui arrivait et a demandé des instructions.
La situation ainsi créée est fort embarrassante. – Aucune raison n’existe pour retirer à la France l’engagement qu’elle a avec vous, de protéger les Suisses au Maroc. – Pourquoi chercher à morceler cette protection en demandant une protection spéciale et individuelle à une autre Nation?
Reconnaissant que j’aurais dû limiter ma demande à la protection de la famille Würth, protection qui n’aurait pu être accordée ayant su que c’était la France qui devait s’en occuper, laquelle a au moins autant d’influence au Maroc que l’Espagne, la raison avancée de chercher une plus forte protection n’est pas fondée dans ce cas.
En me faisant faire une demande de ce genre, sans que j’aie été informé auparavant que la France était déjà chargé de la représentation de la Suisse au Maroc, vous me lanciez les yeux fermés, pour arriver à un but qui fait fracasser les meilleures intentions du Ministère Espagnol et rend difficile l’annulation des ordres donnés à son Ministre à Tanger, transmis par celui-ci au Ministre des Affaires Étrangères du Sultan, qui s’est empressé d’en donner connaissance à S. M. Ibérifienne.
La première disposition prise par le Ministère d’État a été de faire tout suspendre et voir comment arriver à faire retirer les ordres donnés, mais l’impression restera toujours comme une conséquence très-fâcheuse et tout cela pour avoir mis tous trop d’empressement à vouloir servir: vous, un individu et ici en voulant trop faire pour servir la Suisse.5
Je saisis avec empressement cette opportunité, pour vous renouveler, Monsieur le Conseiller Fédéral, les assurances de ma considération la plus distinguée.
- 1
- CH-BAR#E2#1000/44#209* (D.324.03). Cette lettre est rédigée par le Consul général de Suisse à Madrid, Charles Lardet, et adressée au Chef du Département des affaires étrangères, le Conseiller fédéral Adrien Lachenal.↩
- 2
- Cf. les lettres de Paul Würth au Conseiller fédéral Lachenal, du 26 mai, 25 juin, 27 juin et 2 juillet 1894, CH-BAR#E2#1000/44#209* (D.324.03).↩
- 3
- À propos de cette question cf. dodis.ch/64371.↩
- 4
- Cf. la lettre du Consul général Lardet au Ministre d’État du Royaume d’Espagne, Segismundo Moret, du 2 juillet 1894 en annexe du facsimilé dodis.ch/63967.↩
- 5
- Annotation manuscrite dans la marge: et M. Würth! ↩
Tags
Trade relations Spain (Politics) Swiss citizens from abroad